Allons-nous encore une fois rater l’occasion de réformer la Loi sur les mines au Québec ? Espérons que non. Depuis 2009, le gouvernement du Québec a tenté à trois reprises de moderniser cette antique loi. Après avoir échoué le mois dernier, la ministre Martine Ouellet a proposé jeudi une quatrième tentative, le projet de loi 70, lequel comprend plusieurs compromis. Les parlementaires auraient vraiment l’air fou d’échouer. Tous, sans exception.
Heureusement, aucun élu n’a osé bloquer le dépôt du projet de loi 70 jeudi. Depuis le 15 novembre — date limite de dépôt des projets de loi pour adoption avant Noël — l’Assemblée nationale est entrée dans une zone dangereuse : l’unanimité est constamment requise pour passer d’une étape législative à l’autre. Ceci donne aux députés, même indépendants (comme les deux de Québec solidaire), un rôle crucial qu’ils ont rarement.
QS savourait le moment jeudi, laissant planer le doute sur les décisions qu’il prendrait dans les prochaines heures. Amir Khadir et Françoise David ont même suggéré que le gouvernement fasse du vote sur ce projet de loi une question de confiance ! Quoi, le projet de loi sur la charte a bien eu droit à cette dramatisation ! ont-ils dit en guise d’explication.
On comprend l’inquiétude du parti de gauche quant aux compromis faits par Mme Ouellet. Notamment sur les pouvoirs pour Québec de s’assurer que les projets miniers respectent les volontés des municipalités. Mais les députés de QS doivent faire preuve de souplesse. Pensez donc, même la très exigeante coalition Québec meilleure mine enjoignait jeudi aux députés d’adopter le projet de loi 70 « avant les Fêtes ». Déplorant certes quelques « reculs », la coalition juge que le projet de loi comprend tout de même des « avancées nécessaires par rapport au statu quo ». Elle sait bien que, dès le printemps, un nouveau gouvernement pourrait s’installer au pouvoir, et relancer encore une fois un long exercice de rénovation de la loi. Jamais quatre sans cinq ? Un tiens vaut mieux…
Quant au Parti libéral du Québec, il aurait intérêt à montrer plus d’ouverture. Les libéraux s’indignent lorsqu’on les soupçonne de souhaiter l’échec de Martine Ouellet, ce qui les vengerait du filibuster de cette dernière, en 2012, contre le projet de loi 14 (précédente tentative de réformer la Loi sur les mines). Pourtant, en conférence de presse mercredi, le leader de l’opposition officielle, Pierre Moreau, martelait ce qui suit : « Il n’est pas question pour nous […] de passer en 24 heures ce que cette ministre-là s’est employée à détruire en 200 heures en commission parlementaire. » Jeudi, le ton avait légèrement changé, mais on se demande si l’attitude revancharde ne refera pas surface dans les difficiles négociations qui se sont engagées.
Le temps n’est plus aux reproches : si ce n’est que tactiquement, Mme Ouellet devrait elle-même cesser de consacrer une bonne partie de ses points de presse à rétorquer aux libéraux, à répondre à ce qu’elle a qualifié de « dénigrement », d’« insultes » et d’« attitude bassement partisane ». Justement, la partisanerie ou les blessures d’orgueil doivent impérativement être mises de côté. C’est ce que la CAQ et François Bonnardel ont fait la semaine dernière, et même Martine Ouellet les en remerciait jeudi.
Les difficultés actuelles du secteur minier au Québec ne s’expliquent pas uniquement par l’incertitude découlant du flottement à adopter une nouvelle loi ; la baisse des prix des métaux, partout, n’a assurément pas aidé. Mais l’industrie a besoin de plus de prévisibilité et de règles du jeu claires. Et le Québec a besoin de cette industrie, surtout avec le nouvel encadrement que propose le projet de loi 70.
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