Lu Chan Khuong contre-attaque

La bâtonnière suspendue met en demeure le Barreau du Québec

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La section québécoise de l'Association du Barreau canadien prend fait et cause pour la bâtonnière évincée

La guerre se poursuit entre la bâtonnière suspendue du Barreau du Québec, Lu Chan Khuong, et son ordre professionnel. La directrice générale, la secrétaire générale et les 13 membres du conseil d’administration se sont vu adresser jeudi matin une mise en demeure réclamant l’annulation de la décision et des excuses publiques.

Dans la mise en demeure, la bâtonnière en sursis, qui avait déjà annoncé son intention de riposter par la voie des tribunaux, affirme ne pas avoir d’autre choix compte tenu de la décision « intempestive, illégale et déraisonnable » prise par le conseil d’administration.

Élue à la tête du Barreau le 22 mai dernier avec l’appui de 63 % des membres, Mme Khuong a été suspendue le 1er juillet par les membres du conseil d’administration à la suite d’informations publiées selon lesquelles cette dernière a fait l’objet d’une plainte pour vol.

Jeudi, l’avocat de Mme Khuong, Me Jean-François Bertrand, a soutenu que la mise en demeure exige des administrateurs du Barreau qu’ils corrigent « l’erreur grossière » qu’ils ont commise. Selon Mme Khuong, toute cette histoire a déjà nui considérablement à l’image du Barreau et à sa réputation. Cette dernière exige d’ailleurs des excuses publiques et dit réserver ses droits pour d’éventuels recours en diffamation et en dommages et intérêts.

« Le conseil d’administration n’avait pas le pouvoir légal de prendre cette décision, qui n’est pas prévue par le Code des professions ni par le Code de déontologie des avocats. Nous demandons que cette décision illégale soit annulée et que les règles de justice naturelle soient respectées », a-t-il soutenu.

Le conseil d’administration du Barreau du Québec a pour sa part décidé de former un comité indépendant. Trois membres du Barreau, soit Paul-Arthur Gendreau, Madeleine Lemieux et William Atkinson doivent étudier le dossier dès le début de la semaine prochaine, « compte tenu du caractère exceptionnel des procédures », a expliqué au Devoir l’administrateur Pierre Lévesque. Il s’agit d’un processus parallèle à celui judiciaire, qui concerne avant tout la saine gouvernance de l’ordre professionnel dans cette « affaire délicate et particulière ».

Quant à la mise en demeure, un avocat vient d’être mandaté pour y répondre au nom de tous les membres du conseil d’administration. Cette lettre ayant pour effet de judiciariser le dossier, Me Lévesque refuse de commenter les procédures entamées.

Vol présumé

Mme Khuong avait appris le 1er juillet sa suspension par l’entremise des médias, avant même qu’elle ne soit convoquée par le conseil d’administration du Barreau du Québec. Cette dernière s’est toujours défendue de la plainte pour « vol présumé » faite à son endroit par un commerce de détail. Affirmant avoir agi par « simple » distraction, Mme Khuong a conclu ces démêlés avec ce commerce lors d’un processus de non-judiciarisation.

Son avocat souhaite d’ailleurs que la lumière soit faite sur la fuite dont a fait l’objet le dossier de Mme Khuong, le programme de non-judiciarisation garantissant normalement la confidentialité totale des dossiers. Ayant accepté de se soumettre à ce processus de bonne foi, Mme Khuong n’avait ni le devoir légal ni moral de révéler les déboires survenus dans ce commerce avant de se porter candidate au bâtonnat, et bénéficiait de la même présomption d’innocence que tout autre citoyen, affirme-t-il.

Depuis sa suspension, Mme Khuong a reçu l’appui de nombreuses associations d’avocats, notamment celles du Barreau de Longueuil, de Laval, d’Arthabaska, de l’Outaouais, de Richelieu et de la Mauricie. Réuni d’urgence ce midi, le Conseil exécutif de l’Association du Barreau canadien, division du Québec (l’ABC-Québec) a adopté unanimement une résolution voulant que Lu Chan Khuong puisse reprendre ses fonctions immédiatement.

« On demande aux gens d’être raisonnables et de réintégrer la bâtonnière dans les plus brefs délais », a déclaré à Droit-inc le président de l’ABC-Québec, Me Antoine Leduc, qui exige lui aussi une enquête sur la fuite survenue afin que les coupables soient sanctionnés.


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