En marge du plaidoyer pour la r[esponsabilité de monsieur Le Hir->29835].
En lisant la réponse de monsieur Michel Rolland à monsieur Le Hir, m'est
venue la réflexion qui suit.
Monsieur Rolland écrit : "Est-ce que ce ne sont pas les riches, les
puissants, le capital, qui ont le moins à assumer leurs responsabilités en
ce système capitaliste ?"
Le lundi 9 août 2010, [Joseph Savès nous faisait le résumé fort pertinent
d'un essai d'Emmanuel Todd intitulé : « Après la démocratie »->29686], publié chez
Gallimard en septembre 2008. Après la démocratie - Essai sur la
décomposition des démocraties.
On peut y lire, concernant les élites et le peuple au sujet du libre
échange et les nouveaux marchés qui en sont nés les commentaires suivants :
Les élites contre le peuple
"[…Pour Emmanuel Todd, la crise de la démocratie résulte clairement
du libre-échange. Ce dogme formulé par les représentants des entreprises
multinationales et repris en choeur par la classe politique, les
intellectuels et les médias, n'a pu s'imposer que par la dénégation du
suffrage universel, car les citoyens, y compris les petits patrons, y sont
pour leur part massivement opposés comme l'a montré le vote sur le traité
constitutionnel européen en mai et juin 2005.
Européen de raison, l'historien plaide pour l'application de la «
préférence communautaire », principe inscrit dans les traités européens
depuis un demi-siècle, mais largement oublié et que d'aucuns préfèrent
dénigrer sous le vilain mot de « protectionnisme ».
Il s'agirait en particulier de faire front à la Chine, qui contourne les
règles du libre-échange en sous-évaluant artificiellement sa monnaie avec
pour résultat de dynamiter l'industrie européenne. Car le principal défaut
de la mondialisation actuelle est dans le « dumping » monétaire pratiqué
par la Chine. Celle-ci convertit en bons du Trésor américain son excédent
commercial, ce qui revient à exporter à crédit (« Achetez maintenant, vous
nous paierez demain », dit-elle d'une certaine manière aux consommateurs
repus d'Amérique). Le yuan faible prive les ouvriers chinois d'une juste
rémunération ; il constitue aussi une concurrence déloyale pour les pays
pauvres du sud, par exemple les producteurs de textiles du bassin
méditerranéen.
Les oligarques occidentaux (grande distribution et multinationales)
acceptent ce dévoiement du libre-échange parce qu'ils y trouvent tout
simplement leur intérêt (à court terme du moins, car leurs enfants pâtiront
comme les autres de la société d'inégalités et de violences qu'ils auront
générée) : ils s'approvisionnent en effet en Chine en produits à très bas
coût (et généralement de qualité médiocre) puis les revendent en Europe à
un prix à peine inférieur à celui des produits fabriqués sur le territoire
national. Ainsi brisent-ils la concurrence intérieure tout en s'assurant
une marge maximale, mais c'est au prix de la ruine des industries
nationales et de la mise au chômage de ses salariés (*).
En France, les cinq représentants de la grande distribution ont profité de
l'accord multifibre pour importer massivement de médiocres textiles chinois
sans diminuer leurs prix pour autant. Ils s'approvisionnent de la même
façon en vaisselle, électroménager et même mobilier... En résumé, la
délocalisation n'est pas une fatalité, mais un choix (*), un choix qui
revient aux oligarques (*).
Le libre-échange contre les pauvres
Emmanuel Todd pourfend l'idée de gauche selon laquelle la mondialisation et
le libre-échange seraient à l'origine d'un plus grand bien-être du tiers
monde. D'une part les pays intermédiaires comme ceux du bassin
méditerranéen sont plus menacés qu'aucun autre par la concurrence chinoise.
D'autre part, « l'alphabétisation de masse, achevée chez les jeunes en
Chine, mais qui s'accélère en Inde, explique la chute de la fécondité qui
s'affirme dans ces deux pays, et l'augmentation du niveau d'efficacité
économique de leurs populations, indépendamment de l'ouverture aux échanges
». En Inde, « l'accélération qui s'est produite dans les années
quatre-vingt, à 5,9%, a nettement précédé l'ouverture aux échanges et les
mesures de libéralisation prises en 1991 » (page 162)…]"
Ceci s'applique tout à fait à nous et à notre industrie. Je pense, par
exemple, à l'industrie du piano en Amérique du Nord et en Europe.
Juste chez nous, au Québec, alors que nous avions une industrie prospère
dans ce domaine, il n'en a rien subsisté, sinon l'entreprise familiale
d'André Bolduc, « Pianos André Bolduc » fondée en 1978 à
Saint-Joseph-de-Beauce, qui fabrique, entre autres, des tables d'harmonie
et des sommiers qui sont très convoités par les constructeurs américains,
européens et asiatiques ainsi que par les spécialistes en restauration
d'instruments anciens. Nous avons également un distributeur de pièces et de
matériaux pour la réparation et la réfections des pianos qui fabrique
également des cordes pour la section des basses des pianos. Il s'agit de la
maison Pianophile, installée à Brossard.
Au Québec, entre 1891 et 1986, année où elle ferma ses portes, la compagnie
Lesage de Sainte-Thérèse a fabriqué 67,300 instruments.
La compagnie Willis, également de Sainte-Thérèse en a fabriqué 47,000 entre
1907 et 1965. Elle a fermé ses portes en 1978, laissant derrière elle la
production de très intéressants instruments dont de nombreux modèles de
pianos à queue allant du petit instrument d'appartement au grand piano de
concert de 9'.
En Ontario la maison « Mason & Rich », fondé en 1871 avait construit
152,000 instruments au moment de sa fermeture en 1972.
De même, la maison « Heintzmann & Company » de Toronto, reconnue pendant
plus de quarante ans pour fabriquer le meilleur piano droit au monde, a
fermé ses portes au début des années 1980 après avoir mis plus de 164,000
instruments sur le marché allant du petit piano droit d'appartement aux
grands instruments de concert de 9'. En 1885, la compagnie était même fière
de faire savoir à sa clientèle qu'un de ses pianos à queue avait été acheté
pour le "Royal Albert Hall" en Angleterre.
Ce ne sont là que quelques exemples parmi les 240 marques et/ou facteurs de
pianos répertoriés au Canada entre 1851 et la fin des années 1980.
Aujourd'hui, il n'en reste aucun.
Ce phénomène ne s'applique pas seulement au Canada, mais aussi aux
États-Unis et à l'Europe, où l'on retrouve les grands facteurs dont la
renommée internationale a fait et continue de faire la gloire. Je parle ici
de facteurs comme Steinway New York, Steinway Hambourg, l'américain
Baldwin, l'Autrichien Bösendorfer, l'Allemand Bechstein, et bien d'autres
dont certains continuent à mettre sur le marché de remarquables instruments
et dont d'autres, comme Baldwin, ont disparu, victimes du marché asiatique.
En tout, on peut répertorier, entre le début du XVllle siècle et la fin du
XXe, plus de 12,500 marques et/ou facteurs de pianos dont il ne reste que
quelques centaines de représentants. Bien sûr, il est tout à fait normal
qu'il en soit ainsi compte tenu de l'évolution de l'industrie et du
commerce particulier desquels dépendent les facteurs de pianos.
Par ailleurs, nous devons réaliser qu'actuellement, si l'industrie est en
faillite technique dans la plupart des pays occidentaux, c'est à cause de
ce que précisément Manuel Todd nous explique lorsqu'il affirme que les
oligarques occidentaux (grande distribution et multinationales) acceptent
le dévoiement du libre-échange parce qu'ils y trouvent tout simplement leur
intérêt en s'approvisionnant en Chine en produits à très bas coût (et
généralement de qualité médiocre) pour les revendre en Europe à un prix à
peine inférieur à celui des produits fabriqués sur le territoire national.
Ainsi brisent-ils la concurrence intérieure tout en s'assurant une marge
maximale et ce, au prix de la ruine des industries nationales et de la mise
au chômage de leurs salariés.
Exactement ce que nous pouvons constater dans l'industrie du piano et des
instruments de musique en général, la Chine étant devenue une productrice
de première importance dans ce domaine. Ainsi, de plus en plus de facteurs
de pianos Européens et Américains font-ils fabriquer leurs instruments en
Chine, dans des usines ultramodernes, équipées des outils mécanisés les
plus perfectionnés, assistés par ordinateurs et capables de produire à un
coût dérisoire, pièces, structures et meubles pour des centaines de modèles
d'instruments différents allant du petit piano droit d'appartement de 46
pouces aux grands pianos de concert de neuf pieds.
Pendant ce temps, dans nos pays, l'industrie se meurt et la
main-d'œuvre spécialisée, héritière d'une tradition vieille de trois
siècles n'est plus transmise aux jeunes générations.
Qu'arrivera-t-il lorsque la main d'œuvre chinoise décidera qu'elle ne
désire plus travailler à des salaires de famine pour enrichir de riches
occidentaux qui ont, sans remords et sans la moindre reconnaissance pour
ceux qui avaient fait leur gloire et leur fortune, fermé leurs usines pour
faire faire le travail par les plus pauvres de ce monde ?
Il arrivera exactement ce qui est arrivé avec le Japon au début des années
1960. Alors que nous considérions que tout ce qui venait du Japon était de
la pacotille, nous découvrîmes avec stupéfaction qu'ils avaient mis sur
pied une industrie des instruments de musique unique au monde et qui inonda
littéralement les marchés occidentaux avec, entre autres, des pianos dont
la qualité, la fiabilité et la renommée ont atteint et parfois dépassé
celles des plus grands facteurs de la tradition européenne et
nord-américaine. Les trois diapasons de Yamaha sont visibles sur les cinq
continents et continueront de l'être encore longtemps.
Cependant, nous parlons ici d'une industrie essentiellement japonaise
fondée en 1887 par Tarakusu Yamaha et qui compte aujourd'hui, juste pour
son secteur piano, la construction de plus de 5,500,000 instruments.
Lorsque Yamaha commença à exporter ses pianos au début des années 1960,
elle comptait, parmi les grands fabricants de pianos, le plus petit nombre
d'instruments construits de l'industrie avec 122,000 pianos. Dix ans plus
tard, elle était au premier rang avec 978,000 instruments. À la même
époque, Steinway & Sons comptait 365,000 instruments en 1960 et 418,000 en
1970.
Ce succès, Yamaha le dut à la discipline de sa main d'oeuvre, aux
conditions salariales et à la qualité de l'environnement dans lequel ils
travaillaient. Pendant ce temps ici, nous tentions péniblement de maintenir
une industrie trop artisanale, dont l'histoire et la valeur patrimoniale
n'émouvaient aucunement nos dirigeants politiques qui ne firent rien pour
prioriser l'achat de ses instruments dans nos institutions d'enseignement
et qui ne l'aida jamais en subventionnant la recherche et le développement
afin d'améliorer la qualité de ses produits tout en facilitant leur mise en
marché.
Ce sont maintenant les Chinois qui dominent l'industrie du piano avec des
instruments fabriqués pour des spéculateurs qui achètent des marques de
commerce comme, par exemple, « Knabe ». La compagnie Knabe fut fondée en
1839 à Baltimore et ferma ses portes en 1994 après être passée aux mains de
plusieurs acheteurs à partir de 1908, date à laquelle ils avaient fabriqué
plus de 65,000 instruments. À sa fermeture définitive en 1994, plus de
200,000 instruments portaient le nom Knabe. En 1996, les frères Kirk et
Gary Burgett achetèrent le nom Knabe et mirent sur le marché, pendant
quelques années, des instruments fabriqués en Corée, devenue comme la
Chine, un important fabricant d'instruments de musique. Aujourd'hui, non
seulement la Chine fabrique-t-elle des instruments pour des facteurs
occidentaux d'Europe et d'Amérique, mais aussi pour des fabricants
Japonais, Australiens, Africains… Elle fournit également le marché
des pièces pour les mécaniques des pianos à la grande industrie pour la
fabrication de leurs instruments, et même les acheteurs les plus avertis ne
se doutent pas que les pianos de $100,000 et plus qu'ils se procurent sont
en partie fabriqués en Chine à des coûts ridiculement bas qui ne se
reflètent aucunement dans le prix qu'ils paient.
Nous pourrions multiplier à l'infini les exemples de ce que je viens
d'exposer dans les différentes sphères de l'industrie et du commerce, et
ce, à l'échelle mondiale. L'appât du gain, l'argent vite fait, l'absence
d'éthique et le manque de considération pour la main-d'oeuvre locale qui,
dans la plupart des cas, a fait la fortune des petites comme des grandes
entreprises, le peu de scrupule à l'égard de la misère de leurs ex-employés
et l'absence totale de politiques fiscales justes et équilibrées, ont
ouvert la voie toute grande à l'hécatombe à laquelle nous assistons depuis
quelques années et qui ne pourra nous mener qu'à la faillite du capitalisme
qui est devenu sauvage, immoral et meurtrier.
Lorsque nous nous réveillerons, nous ne pourrons que constater tout le
retard que nous aurons pris en exportant notre industrie à l'étranger pour
profiter d'une main-d'œuvre à bon marché, alors que nous aurons non
seulement perdu la nôtre, mais que nous aurons en même temps perdu le
savoir-faire qui non caractérisait tout en nous différenciant.
Claude G. Thompson
Lorsque nous nous réveillerons...
Pendant ce temps, dans nos pays, l'industrie se meurt et la main-d'œuvre spécialisée, héritière d'une tradition vieille de trois siècles n'est plus transmise aux jeunes générations.
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7 commentaires
Archives de Vigile Répondre
22 août 2010Ce que vous nous détaillez avec tant de précision pour votre Québec, cher Monsieur Thompson, et dont nous vous remercions, est malheureusement ce qui se passe partout aujourd'hui dans le monde, dirigé par la seule libéralisation à outrance des échanges, et cela depuis plusieurs décennies déjà, mais qui est en train d'arriver à son terme, et de nous conduire à une impasse, telle que vous nous la décrivez si bien...
Madame Mance Vallée, évidemment avant cette grande Noirceur, avant même la conquête, avant, bien avant les Anglais, la Nouvelle France fonctionnait déjà! Des industries s'étaient solidemment implantées avec l'aide conséquente d'ailleurs de l'intendant jean Talon, il avait encouragé les colons Français à subvenir à leurs propres besoins, sans attendre que tout arrive de France, sur les vaisseaux du roi chaque printemps. C'est ainsi qu'avait vu le jour la première tannerie sur la pointe Lauzon, et donc les premières chaussures fabriquées en Nouvelle France, les premiers pêcheurs de morue, dés la confection de barques en bois plus solides commandées à Pierre Miville, pour affronter les eaux profondes de l'embouchure de votre immense Kaniatarowane-neh, l'instruction, autant des enfants des colons que des autochtones qui le désiraient, était largement prise en charge par les religieux et religieuses et ce depuis bien longtemps, le petit séminaire de Québec formait les premiers prêtres sur son sol même, le premier magasin général de Québec tenu par les frères Gagnon, Mathurin et Pierre, avait ouvert dès 1635, d'autres suivirent par la suite .. Puis une administration identique à celle de la France sera alors mise en place, avec l'arrivée au pouvoir du jeune roi Louis XIV lorsqu'en 1663 il révoque la Compagnie des Cent Associés, et crée le Conseil Souverain. La Nouvelle France est alors administrée exactement comme une région de France... des chantiers navals, des cultures, de l'instruction, la Nouvelle France est largement autosuffisante lorsqu'en 1759 il arrive ce qui arrive.. Alors quelle grande Noirceur ?
Cela me ramène à nos livres d'Histoire en France où nous aussi, avant les Romains, les peuplades Ligures, Celtes, Arvernes, Cavares Voconces.. etc.. n'étaient décrites que comme des tribus sauvages, en gros surnommées péjorativement par le conquérant les "Galli" ! d'où ce nom de "Gaulois" !
Lorsqu'on se penche sur le Passé on est étonné de voir combien ces peuples possédaient comme organisation, administration, culture, industries poteries ..là encore quelle grande Noirceur?..
L'engagé Répondre
21 août 2010Une analyse d'une grande rigueur, cette manière d'utiliser concrètement votre connaissance des pianos pour mettre en lumière le texte d'autrui témoigne de ce que j'appellerais une grande noblesse intellectuelle.
Votre amour des pianos résonne et c'est l'écho de toute une résistance humaniste que l'on entend. Merci pour ce texte.
Archives de Vigile Répondre
21 août 2010M. Thompson nous a dépeint une situation avec clarté affolante. Claude G. Thompson nous décrit un domaine de son expertise, bien sûr, mais en même temps cela nous dépeint ce qui s’est passé au Québec, et aussi ailleurs dans le monde depuis quelques décennies, une situation d’autant plus catastrophique qu’elle passe relativement inaperçue. C’est l’érosion de nos sociétés. Nous accélérons notre course droit devant un mur de pierre ; le heurt sera très douloureux. Ce qui s’est passé au niveau du piano s’est aussi passé dans beaucoup de domaines. Il n’y a pas si longtemps, nous étions des as de la chaussure. Nous étions réputés pour fabriquer les meilleures chaussures au monde. Qu’en reste-t-il ? Rien, absolument rien. Même les chaussure italiennes de luxe sont souvent fabriquées en ASIE. Ils transitent par l’Italie qui appose ses étiquettes. Nous étions aussi réputés pour fabriquer des meubles de première qualité. Certaines compagnies subsistent encore de peine et de misère. Regardez dans les grandes surfaces du meuble et tâchez de repérer ceux qui sont fabriqués ici ; objet rares. Je connais un jeune de talent qui fait du design de mode haut de gamme. Il tente de trouver ici les tissus et la main d’œuvre compétente mais il y en a de moins en moins. Assez souvent il doit se tourner vers l’Asie pour la couture. Pourtant, ici même, il y a plein de couturières expérimentées sans travail. Le jour où les chinois demanderont des salaires décents, et c’est en voie de se faire, ce ne sera plus nécessaire d’aller en orient pour faire fabriquer à meilleurs marché, ça deviendra plus coûteux mais quand on se retournera vers notre propre main d’œuvre, elle se sera éteinte, c’est brillant n’est-ce pas. M. Thompson nous en a fait une claire démonstration.
La mondialisation ne profite qu’aux riches, aux multinationales, finalement aux oligarques justement ceux qui dirigent nos « dirigeant » serviles dans le style Charest. J’ai lu hier, dans un entrefilet du journal Le Devoir, que AliBaba Charest et ses 40 voleurs se prépare à privatiser le ministère du revenu. Vous rendez-vous compte du danger de dérapages. Les oligarques en question vont, si cela se fait, avoir le pouvoir de venir fouiller dans nos poches et littéralement nous siphonner en empochant des profit pharaonesques. Si nous ne nous réveillons pas à temps pour évacuer du portrait politique du Québec ce résidu scatalogique de la politique, nos enfants vont en payer le prix et il sera élevé.
Durant les périodes d’élections, j’aurais toujours voulu aller alerter les personnes agées devant qui les fédéraux agitent toujours les repoussoirs des dangers de l’indépendance et leur suggérer d’avoir au moins le courage de laisser un pays à leurs enfants, un pays qu’ils pourraient contrôler eux-mêmes, un Québec fier et tourné vers l’avenir au lieu d’être sous la botte des étrangers. Malheureusement, le P.Q. n’a pas trouvé mon discours intéressant, il aimait mieux la parlotte nationale et les valses hésitations. J’ai rengainé mon épée pour ne pas donner des coups inutiles dans l’eau et l’empêcher de rouiller. Peut-être, un jour, en aurais-je besoin pour préparer le jour de la fierté nationale chèrement acquise.
Ivan Parent
Archives de Vigile Répondre
21 août 2010Avant la fameuse révolution tranquille, il y avait au Québec, des Écoles d'Arts et Métiers, des Écoles techniques, des Écoles d'infirmières, des Écoles de commerce, des Écoles de secrétariat et des Écoles normales. Et les Séminaires qui dispensaient le cours classique. Et j'en oublie certainement comme le démontre si bien M. Thompson.
Si ces écoles avaient été aussi nulles qu'on le disait à l'époque de la RT, le Québec aurait-il été aussi performant dans les années qui ont suivi la RT ? Ce sont les élèves de ces écoles qui l'ont fait la RT, n'en déplaise à tous ceux, y compris Guy Rocher et Paul Gérin Lajoie, qui pensaient à l'époque avoir inventé les boutons à quatre trous.
C'est à cette époque, à mon avis, que nous avons courbé l'échine à force de nous faire que nous étions des nuls, des gens de peu et des riens. Propos que nos ennemis ont repris à leur compte. L'occasion était trop belle...
C'est toujours la même chose au Québec : il n'y a pas eu de Nouvelle-France qui possédait toutes les institutions essentielles à un pays à cette époque. Qui sait que la première faculté de droit au monde se trouvait en Nouvelle-France ?
Avant la RT, il n'y avait rien, c'était la grande noirceur. Si c'était si vrai pourquoi apprenions-nous la chimie, la physique, la géométrie, l'algèbre, la biologie, l'Histoire générale du monde et celle du Canada dans le plus petit village reculé, et arriéré disait-on avec mépris, du Québec ? (cf. Département de l'Instruction publique) Il est vrai qu'il ne faut pas le dire puisque ce sont des religieuses qui nous enseignaient, oh malheur! aussi la religion, l'art domestique, le dessin, l'art oratoire (spectacles, séances, tableaux vivants) etc. Et que ces institutions avaient été fondées par le méchant, l'ignoble Duplessis qui avait refait les routes qui nous permettaient de nous rendre en ville pour fréquenter ces institutions le moment venu.
Nous sommes des indécrottables...
Archives de Vigile Répondre
21 août 2010« L'appât du gain, l'argent vite fait, l'absence d'éthique et le manque de considération pour la main-d'oeuvre locale qui, dans la plupart des cas, a fait la fortune des petites comme des grandes entreprises, le peu de scrupule à l'égard de la misère de leurs ex-employés et l'absence totale de politiques fiscales justes et équilibrées, ont ouvert la voie toute grande à l'hécatombe à laquelle nous assistons depuis quelques années et qui ne pourra nous mener qu'à la faillite du capitalisme qui est devenu sauvage, immoral et meurtrier. »
Voilà où mène la cupidité…
Que de vérité et de justesse dans ce propos !
Michel Rolland
Claude G. Thompson Répondre
20 août 2010Monsieur Le Hir,
merci pour cette précision. Je me souviens effectivement avoir eu la chance de faire des stages dans les différents ateliers de l'école technique à Trois-Rivières, nos institutions d'enseignements scientifique et général ayant eu la bonne idée de consacrer un après-midi par semaine à cette activité qui devait nous introduire aux différents métiers enseignés dans nos "écoles des métiers" ou "écoles techniques".
Ce que j'y ai appris m'a toujours servi même si j'ai fait des études universitaires en musique. Par ailleurs, ces stages m'ont aussi appris à apprécier et à respecter les gens de métiers.
Malheureusement, pour ce qui concerne notre industrie du piano, les choses ne sont pas allées aussi bien ni aussi loin, même si la compagnie Lesage, au début des années 1980 a tenté, mais en vain, de mettre sur le marché un petit piano à queue de 5'2" qui ne connu aucun succès, dépassés que nous étions par la technologie et la confection japonaise.
Claude G. Thompson
@ Richard Le Hir Répondre
20 août 2010M. Thompson,
Votre analyse est brillamment juste. Comme vous utilisez le domaine de la fabrication des instruments de musique, vous ne m’en voudrez pas de faire un jeu de mot facile en vous suggérant un bémol dans le cas du Québec.
Au début des années 1990, alors que j’étais président de l’Association des manufacturiers, j’avais eu l’idée de lancer un concours (Les Meilleurs) pour revaloriser la formation technique au Québec. L’industrie éprouvait de plus en plus de difficultés à recruter une main d’oeuvre capable d’assimiler les nouvelles technologies. Les travailleurs âgés d’une quarantaine d’années, entrés à l’usine à l’âge de 16 ou 17 ans avec comme gros maximum une « 7e année forte » (comme on disait à l’époque), gâtés par des salaires élevés pendant des années et des habitudes de consommation facile (bateaux, « skidoos », voyages en Floride ou Acapulco, souvenez vous de « los tabarnacos » comme les surnommait Jacques Parizeau), savaient à peine lire, et étaient totalement capables d’assimiler la formation technique nécessaire pour passer à l’ère des machines programmées. Ils n’avaient pas « appris à apprendre ».
S’il est toujours tentant de blâmes les autres, cette fois-ci nous avions une part de responsabilité. Dans les années 1940 et 1950, pour aider le Québec à prendre le virage de l’industrialisation et profiter de la manne de guerre, l’ancien premier ministre Duplessis avait mis sur pied un réseau de collèges techniques qui avaient rapidement permis au Québec de combler ses lacunes et de tirer avantageusement son épingle du jeu.
Au début des années 1960, Paul Gérin-Lajoie, ministre d’éducation libéral collègue de rené Lévesque, avait décidé de réformer le système d’éducation et avait formé une commission d’enquête (Commission royale d'enquête sur l'enseignement dans la province de Québec) dont il avait confier les rênes à Mgr Parent. La Commission devait produire un rapport, rédigé en bonne partie par le sociologue Guy Rocher, qui prônait la formation des CEGEPs (Collèges d’enseignement général et professionnel), et privilégiait la démocratisation de l’enseignement et l’accès du plus grand nombre à la formation universitaire. Les collèges d’enseignement technique furent donc rapidement amalgamés aux CEGEPs et devinrent rapidement le parent pauvre du système au point de disparaître presque complètement en moins de dix ans. L’une des rares réussites de l’époque duplessiste en matière d’éducation se retrouvait complètement escamotée.
Au début des années 1990, le problème de la relève de la main d’oeuvre technique était devenu criant. Vous n’avez aucune idée des difficultés que m’ont causées les fonctionnaires du ministère de l’Éducation dans la mise sur pied de mon concours malgré les appuis dont je m’étais assuré auprès du premier ministre Bourassa et du ministre de la main d’oeuvre André Bourbeau. L’idée même d’un concours leur déplaisait, la notion d’excellence étant anti-démocratique à leurs yeux. Ce concours n’a d’ailleurs pas survécu à mon départ en politique.
Il y a parfois des coups de pied au cul qui se perdent.