Loi 104 - Un échec programmé par le PQ, selon Christine St-Pierre

Pierre Curzi qualifie de paranoïa la thèse voulant que les péquistes ont voulu créer une crise linguistique en sabotant le projet de loi visant à empêcher le stratagème des écoles-passerelles

Loi 104 - Les écoles passerelles - réplique à la Cour suprême

Québec -- L'échec de la loi 104 devant la plus haute cour du pays avait été programmé par le gouvernement péquiste pour créer une crise linguistique, comme celles que Jacques Parizeau estime bonnes pour la cause. C'est la surprenante thèse que Christine St-Pierre a défendue, lors d'une interpellation, hier en Chambre. Ce qui a conduit le porte-parole du Parti québécois en matière de langue, Pierre Curzi, à qualifier des propos de la ministre de paranoïaques pour une deuxième fois cette semaine.
Ministre de l'Application de la Charte de la langue française, Mme St-Pierre a soutenu qu'en 2002, plusieurs «mises en garde» avaient été faites au Parti québécois au sujet de ce projet de loi qui visait à empêcher le stratagème des écoles-passerelles: inscrire un enfant pendant un an dans une école privée non subventionnée pour s'acheter par la suite un droit au réseau scolaire anglophone subventionné. La Cour suprême l'a déclarée anticonstitutionnelle le mois dernier, donnant un an au gouvernement du Québec pour réagir.
Citant les débats qui avaient entouré l'adoption de la loi, la ministre a soutenu que «l'opposition libérale d'alors avait souligné le danger qu'une loi de ce genre ne passe pas le test constitutionnel». À l'époque, a-t-elle insisté, le Mouvement national des Québécois espérait que les tribunaux refusent la loi «afin de donner plus d'énergie au mouvement séparatiste, souverainiste, et nourrir son argumentaire». Elle voit ici à l'oeuvre une stratégie connue: «On croirait relire M. Parizeau, qui pense qu'il n'est rien de mieux qu'une bonne chicane avec le fédéral pour stimuler les souverainistes. C'est à se demander si les souverainistes ne se frottent pas les mains quand le Québec perd en Cour suprême sur cette question.»
Mme St-Pierre a par la suite enchaîné en lançant: «Je m'interroge sincèrement à savoir si le Parti québécois avait des avis juridiques à ce sujet lorsqu'il a présenté la loi. Si c'est le cas, les ministres ont dû en être informés. S'il en avait, le gouvernement du PQ [...] nous a engagés de manière délibérée dans un cul-de-sac [...]. Nous récoltons aujourd'hui le fruit, puisqu'il avait dû, je le répète, analyser.»
Paranoïa
Le député Pierre Curzi a soutenu en entretien avec Le Devoir que c'était là «de la pure et totale paranoïa». Il a fait valoir que les libéraux, Jean Charest en tête, avaient voté pour la loi. Plus tôt cette semaine, M. Curzi avait dit déceler des traces de paranoïa dans une surprenante attaque de la ministre en Chambre.
Par ailleurs, Mme St-Pierre n'a donné aucune indication, hier, de ce qu'elle entendait faire pour répondre au jugement de la Cour suprême. Elle a cité une kyrielle d'«experts» et d'observateurs qui divergeaient d'opinion sur la question, sans indiquer dans quel sens elle songeait se diriger.
M. Curzi et Alexandre Cloutier ont proposé leur «solution entérinée par la majorité des gens qui réfléchissent sur cette question depuis de nombreuses années»: appliquer la loi 101 aux écoles privées non subventionnées. Il faudrait selon eux en profiter pour ajouter à cette nouvelle loi la clause dérogatoire des deux chartes, la canadienne et la québécoise. On la nomme ainsi parce qu'elle permet à une loi de s'appliquer «nonobstant» certaines dispositions des chartes, celles sur les droits fondamentaux.
Pour répondre au jugement sur la loi 104, le gouvernement ne peut pas avoir recours à la clause nonobstant puisque le tribunal a tranché en vertu de l'article 23 sur les droits linguistiques. Toutefois, M. Cloutier a expliqué que le recours aux fameuses clauses préviendrait un recours contre une éventuelle loi 101 renforcée s'appliquant aux écoles privées non subventionnées. Ce recours invoquerait probablement, a expliqué le député, le droit à la liberté tant de la Charte canadienne que la Charte québécoise. «On pourrait utiliser la clause nonobstant pour ces deux avenues-là. Ce qui nous permet [...] de mettre la ceinture, puis de rajouter les bretelles», a illustré M. Cloutier.


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