Les Flamands moins forts que les Québécois

Chronique de José Fontaine


Les six communes francophones à la périphérie de Bruxelles dont certains bourgmestres n’ont pas encore été nommés alors que les élections ont eu lieu il y a deux ans, cela attire l’attention internationale. Ces communes appartiennent à un arrondissement électoral commun avec Bruxelles, Bruxelles-Halle-Vilvorde (BHV). Les Flamands veulent le scinder dans la mesure – symbolique – où cette scission les séparerait de Bruxelles, ville bilingue en fait francisée.
Comme il n’y a pas d’entente entre partis wallons et flamands et francophones sur BHV et que les Flamands, majoritaires au Parlement fédéral belge , pourraient décider de leur sort sans la minorité, le Parlement wallon a voté une motion qui empêche constitutionnellement les Flamands de le faire pour plusieurs mois. Comiquement, ce sont les Flamands membres du Gouvernement fédéral qui le souhaitaient! dans la mesure où un vote Flamands contre Wallons ferait voler en éclats la coalition gouvernementale et qu’ils désirent trouver un arrangement. (1)
Cette non nomination des bourgmestres a l’air choquante. Une disposition belge ancienne veut que le Gouvernement nomme les bourgmestres. Autrefois, c’était le roi. Et lui-même (ou le gouvernement qu’il présidait alors), s’est servi de cette prérogative, notamment, avant la Grande guerre pour ne pas nommer les bourgmestres socialistes, car à l’époque ils étaient républicains. Mais ils exerçaient les fonctions de bourgmestre de facto. C’est la même chose avec les bourgmestres non nommés par le gouvernement flamand . Il n’y a pas là de quoi fouetter un chat. Des pressions sont exercées pour limiter les facilités accordées aux francophones de ces communes. Mais ces francophones ne sont pas dans la même position qu’au Canada. Ils ne sont pas menacés par le néerlandais et, au contraire, le français menace l’identité linguistique de la Flandre qui se défend comme elle peut, avec moins d’habileté peut-être que le Québec et parce qu'elle est dans une position plus difficile avec une élite qui a toujours été francophone (mais fait semblant de ne plus l'être), à 1h de Paris en TGV et avec une langue dotée d'un vrai rayonnement, mais bien plus infériorisée face au français que celui-ci face à l'anglais. C’est un problème difficile à résoudre mais, manifestement, dans les deux camps, tant en Flandre qu’en Wallonie et à Bruxelles, on est déterminé à trouver une solution à ce problème – et on la trouvera, en fonction du droit des gens et de la démocratie.
On retrouve dans le camp des défenseurs de ces francophones les pires unitaristes belges. Le Parlement wallon a obéi aux directives des partis. L’une des chefs de partis a même dit que cela lui était égal que ce soit le parlement wallon ou un autre (ce pouvait être aussi le parlement de la petite communauté germanophone qui a une position belge en cette affaire, pas antiflamande, d’ailleurs , les Flamands souhaitant eux-mêmes qu’on les contre !). Cette chef de parti, sans le vouloir, a dévoilé ainsi son sentiment profond : sa carrière politique se jouant dans un jeu politique fédéral belge, le parlement wallon, psschit !
Evidemment, sur les six communes de la périphérie bruxelloise elle criera à la démocratie bafouée. Mais je ne la crois pas. Son jeu est un jeu belge. Belge francophone. Le sort de la Wallonie ne l’intéresse pas. Il y a à se positionner politiquement parce que les francophones de la périphérie possèdent une visibilité politique. Bien plus que si c'était pour le destin d’un peuple. Et les hommes politiques doivent gagner les élections avec des trucs visibles. Il faut une solution juste pour les francophones de la périphérie, c’est évident, mais je ne suis pas dupe des politiciens qui ne respectent pas les Wallons et se contentent de jouer leur jeu électoral en se moquant de nous et de notre parlement. Je le répète : ni le français, ni la Wallonie ne sont menacés en quoi que ce soit dans cette affaire - ni Bruxelles. Seule l’est la Flandre comme le serait, par analogie, le Québec au Canada. Flamands et Québécois défendent leur langue et c’est bien. Ni les Flamands, ni les Québécois ne sont fascistes pour cette seule raison comme le prétendent des Francophones excités qui feraient bien de se servir de mots pareils plus judicieusement...
José Fontaine
(1) Philippe Moureaux, l'homme politique bruxellois le plus influent confirme mon analyse par ces mots dans La Libre Belgique de ce 17 janvier «Cessons la comédie et mettons-pous à table»

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José Fontaine355 articles

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Né le 28/6/46 à Jemappes (Borinage, Wallonie). Docteur en philosophie pour une thèse intitulée "Le mal chez Rousseau et Kant" (Université catholique de Louvain, 1975), Professeur de philosophie et de sociologie (dans l'enseignement supérieur social à Namur et Mirwart) et directeur de la revue TOUDI (fondée en 1986), revue annuelle de 1987 à 1995 (huit numéros parus), puis mensuelle de 1997 à 2004, aujourd'hui trimestrielle (en tout 71 numéros parus). A paru aussi de 1992 à 1996 le mensuel République que j'ai également dirigé et qui a finalement fusionné avec TOUDI en 1997.

Esprit et insoumission ne font qu'un, et dès lors, j'essaye de dire avec Marie dans le "Magnificat", qui veut dire " impatience de la liberté": Mon âme magnifie le Seigneur, car il dépose les Puissants de leur trône. J'essaye...





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