«Le Québec me tue»

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Les titres qui tuent...



Isabelle Hachey - Emmanuelle Manigat est née à Montréal et a grandi sur la Rive-Sud. Il y a un peu plus d'un an, cette jeune mère de famille, noire et musulmane, a déménagé à Mississauga, en banlieue de Toronto. Le Québec, dit-elle, la tuait à petit feu.

Les regards soutenus à cause de son hijab, le «défoulement populaire» qu'est devenue la commission Bouchard-Taylor, «je n'avais plus envie de ça. Je me suis dit: le monde est vaste, si je peux vivre à un endroit où c'est plus facile pour moi et ma famille, pourquoi pas?»
Pour Mme Manigat, le choix de Toronto s'est imposé naturellement. La capitale ontarienne, explique-t-elle, fait tout pour plaire à sa communauté musulmane. «Par exemple, chaque année, il y a un Muslim Day au parc thématique Canada's Wonderland. Imaginez une journée musulmane à La Ronde; tout le monde aurait paniqué!»
Si Toronto est si «accommodante», c'est d'abord une question de démographie, dit le conseiller municipal Joe Mehivc. «En 2002, nous avons passé un cap important de notre histoire, quand la population blanche de la ville est devenue minoritaire. Aujourd'hui, de 55% à 60% de la population est non blanche.»
Résultat, «il n'y a pas de débat à Toronto à propos des accommodements raisonnables. Cela n'existe pas. Il y a trop de races pour qu'il y ait du racisme», soutient Michael Adams, président du groupe de recherche Environics. La ville est devenue si cosmopolite que «même les restaurants chinois servent de la viande halal!» dit Mme Manigat.
Pas si rose
Malgré tout, l'Ontario est loin d'être un nirvana pour les immigrés. Le débat qui a lieu au Québec «reflète des inquiétudes qui existent ici aussi», selon Jeffrey Reitz, directeur du département d'études ethniques à l'Université de Toronto.
À preuve, l'énorme levée de boucliers provoquée par la promesse du chef conservateur John Tory de financer les écoles confessionnelles de l'Ontario à même les fonds publics, lors de la récente campagne électorale provinciale.
La controverse, qui a finalement eu raison de M. Tory, a révélé un profond malaise collectif, selon Margaret Wente, chroniqueuse au Globe and Mail. Toronto, écrivait-elle en octobre, est devenue «une ville de ghettos religieux et ethniques de plus en plus séparés. Alors, la question du financement des écoles s'est transformée en référendum sur la sorte de province dans laquelle nous voulons vivre. Devinez quoi? Nous ne voulons plus être une mosaïque, après tout.»
Seulement un Ontarien sur cinq (21,6%) pense qu'il est raisonnable d'accommoder les minorités religieuses et ethniques, selon un récent sondage effectué par l'Institut de recherche en politiques publiques. La moitié d'entre eux (49,6%) estiment plutôt que les immigrés devraient s'adapter totalement à la culture canadienne.
Cet état d'esprit se reflète clairement dans les lettres publiées cette semaine dans le Toronto Star à la suite de la suspension de Halima Muse, une gardienne de sécurité musulmane de l'aéroport Pearson. Mme Muse a été suspendue pour avoir rallongé sa jupe de quelques centimètres afin de couvrir ses mollets. «L'uniforme devrait être le même pour toutes les employées, écrit Kent Chapman, de Toronto. C'est comme cela que cela fonctionne au Canada. Si les immigrés n'aiment pas ça, ils n'ont qu'à retourner d'où ils viennent.» La plupart des lettres sont de la même eau.
Plus inquiétant, les crimes haineux envers les musulmans ont augmenté à Toronto, surtout depuis l'arrestation, en juin 2006, de 17 jeunes hommes accusés d'avoir planifié des attentats terroristes dans la métropole. Des mosquées et des écoles islamiques ont été vandalisées. «Ce n'est pas très rassurant», admet M.D. Khalid, responsable d'une mosquée de Mississauga attaquée à deux reprises cet été.
Les universités ontariennes ne sont pas à l'abri. Un récent rapport de la Fédération canadienne des étudiants fait état de douzaines de cas de vandalisme et d'attaques ciblant les musulmans. «Les exemples d'islamophobie ne sont pas des cas isolés, conclut le rapport. La discrimination envers les étudiants musulmans est une caractéristique systémique du système d'éducation postsecondaire de l'Ontario.»
Les Ontariens plus prudents
Neil Edwards, un Torontois de race noire, a vécu plusieurs années au Québec avant de fuir, dit-il, le racisme ambiant qui l'empêchait de progresser. «Même en Ontario, je n'ai pas échappé au racisme, admet-il. La différence, c'est qu'ici, il y a beaucoup plus de voix qui le dénoncent. Alors, les gens ont tendance à être plus prudents.»
Ce qui permet les débordements actuels au Québec, explique l'universitaire Jeffrey Reitz, «c'est le sentiment de la part de plusieurs Québécois que leur propre statut n'est pas complètement assuré. Dans ce contexte, donner voix aux prétendues menaces posées par les immigrés a une plus grande légitimité sociale qu'en Ontario».
Pour l'ex-montréalaise Emmanuelle Manigat, le résultat est le même. «Ici, tu ne peux pas aller à la télévision et dire: les musulmans, je n'en veux plus, qu'ils retournent dans leur pays. Je ne dis pas que les Ontariens ne sont pas racistes, mais au moins, ils te laissent vivre.»
- source


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1 commentaire

  • Jacques Bergeron Répondre

    26 novembre 2007

    Seulement 21,6% des Ontariens acceptent des accommodements exigés par les Intégristes religieux, et ce sont les Québécois qui sont racistes et xénophobes! Comprendra qui voudra ce raisonnement.Il faut souhaiter à ces gens un bon et long séjour à Toronto,et aux Torontois de ne pas regretter de les avoir accueilis, car ils risquent d'être considérés comme des «racistes» et des «xénophobes» s'ils persistent à n'être que «21,6%» à «vouloir accommoder» leurs nouveaux concitoyens et leurs nouvelles concitoyennes issu-e-s de l'immigration.