AUSTÉRITÉ

Le prix d’un café?

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Le gouvernement, ce n'est pas une «business»

En faisant son entrée à l’Assemblée nationale en mai dernier, le gouvernement Couillard affirmait sa volonté de réformer l’État québécois pour qu’il cesse de vivre au-dessus de ses moyens. Huit mois plus tard, l’équilibre budgétaire est en vue, au prix toutefois d’une austérité que ressentent la majorité des Québécois.​

L'intention du gouvernement avait été posée clairement. « Nous ne reculerons pas devant l’ampleur de la tâche », avait déclaré le premier ministre Philippe Couillard dans le discours inaugural. Au-delà de l’atteinte du déficit zéro, il pointait les problèmes structurels que sont l’endettement et la fiscalité qui privent l’État de toute marge de manoeuvre.

Ce discours n’est pas nouveau. D’autres l’ont tenu avant lui, le péquiste Lucien Bouchard comme le libéral Jean Charest. Chaque récession, pour peu qu’elle soit prolongée, entraîne un déséquilibre des finances publiques qu’il est difficile par la suite de corriger. Après avoir investi dans les dépenses publiques pour soutenir une économie au ralenti, voilà qu’ils doivent comprimer leurs dépenses, abolir des emplois, alourdir le fardeau fiscal des contribuables.

Le premier ministre Couillard tient au terme « rigueur »pour qualifier l’actuel processus de redressement budgétaire alors que les Québécois y voient très majoritairement de l’austérité. Certes, on peut parler de rigueur dans le sens de fermeté. Croyons-le lorsqu’il dit et répète qu’il ne reculera pas sur l’objectif de présenter en mars prochain un budget équilibré pour l’exercice 2015-2016.

La stratégie de communication libérale minimise l’effort demandé. Sur la hausse des tarifs de garderie, le premier ministre ne cesse d’insister pour dire que, pour la très grande majorité des parents, l’effort est nul ou limité à quelque 50 sous par jour. Pour le ministre de l’Environnement, David Heurtel, l’augmentation de 2 ¢ le litre d’essence que se feront refiler les automobilistes par les distributeurs de pétrole représente moins d’un café par semaine. Vraiment ? Le Journal de Montréal a fait l’addition. L’ensemble des hausses de tarifs et de taxes décrétées jusqu’ici représente 17 cafés par semaine, ou l’équivalent de 1343 $ pour une famille.

L’austérité n’est pas qu’affaire de perception. Le fardeau financier est bien réel et pourrait s’alourdir dans l’avenir. Ce sont aussi des services qui seront réduits à la suite des compressions de personnel. Puis il y a cette incertitude quant à l’avenir de plein d’organismes bénévoles dont les budgets ont été ou pourront être réduits. C’est aussi la paralysie qui frappe certains organismes en voie de restructuration, comme les CLD.

La mobilisation contre l’austérité, qui est bien réelle comme l’ont démontré les grandes manifestations de samedi dernier, tient par ailleurs aux craintes que la réingénierie entreprise n’entraîne l’abandon de certaines des missions de l’État. Les propos du président du Conseil du trésor, Martin Coiteux, sur « l’État du XXIe siècle » n’est pas sans rappeler le rapport Gobeil de 1986, qui affirmait que « l’État-providence ne cadre plus dans le contexte d’aujourd’hui », l’État devant devenir « animateur » et « supporteur » plutôt que maître d’oeuvre.

L’austérité peut être plus qu’une simple méthode de gestion. Ce peut être un projet. Paul Gobeil disait que l’État doit être mené « comme une business responsable ». Une « business » vend ses services, ce que fait de plus en plus l’État québécois, qui tarife ses services et en délègue de plus en plus la gestion au privé. Le test véritable quant aux intentions de ce gouvernement viendra lorsqu’on s’attaquera à l’évaluation du système de santé. Saura-t-on protéger ces deux vaches sacrées que sont l’universalité et la gratuité des soins de santé ? Rappelons qu’aux yeux de Martin Coiteux il n’existe aucune vache sacrée… !


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