Le premier ministre des riches

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Grosse casserole à traîner pour PeeWee Trudeau

Pour un premier ministre qui a si bien soigné son image depuis son élection en 2015, il est pour le moins curieux de voir Justin Trudeau la laisser autant dilapider depuis quelques semaines. Emmanuel Macron s’est fait étiqueter à son grand dam par les médias français comme « le président des riches ». M. Trudeau semble peu se soucier du risque de se faire accoler un pareil surnom.



Est-ce par excès de confiance ou par inattention que M. Trudeau a exonéré le chef du financement du Parti libéral du Canada et ami Stephen Bronfman avant même que l’Agence du revenu du Canada ne fasse enquête sur les révélations selon lesquelles ce dernier aurait utilisé ou financé des fiducies dans des paradis fiscaux ?



Pense-t-il que les Canadiens lui pardonneront le fait qu’il s’entoure de riches amis, qu’il s’agisse de M. Bronfman ou de l’Aga Khan — chef spirituel chez qui le premier ministre a passé ses vacances sur une île privée des Bahamas, et durant lesquelles sa sécurité fut assurée aux frais des contribuables —, si seulement il continue à se déclarer le champion de la classe moyenne ? À se vanter d’avoir sorti 300 000 enfants de la pauvreté grâce à l’allocation canadienne pour enfants ? À se dire déterminé à s’assurer que les riches paient leur juste part d’impôts et ne se prévalent pas des privilèges dont le Canadien ordinaire ne dispose pas ?



Or cette réputation si méticuleusement construite en prend pour son rhume depuis que M. Trudeau s’est dit satisfait des démentis de M. Bronfman, et depuis que son riche ministre des Finances, Bill Morneau, s’embourbe dans un scandale entourant la gestion de ses propres affaires. La révélation selon laquelle M. Morneau a décidé de ne pas mettre ses actifs dans une fiducie sans droit de regard après son entrée en politique en 2015 a complètement miné la crédibilité de son initiative visant à éliminer des échappatoires fiscales dont bénéficient des propriétaires d’entreprises privées, dont bon nombre de médecins et d’agriculteurs.



Le ministre des Finances blâme la commissaire à l’éthique Mary Dawson pour cette décision, malgré le fait que cette dernière a déjà réclamé la fermeture de la faille dans la loi dont s’est prévalu M. Morneau. « Je suis toujours surpris que des gens intelligents, qui savent que quelque chose est dans une zone grise, ne se demandent pas : quelle est la réponse la plus sage à cette question pour que je ne me retrouve pas dans le trouble ? » a déclaré au National Post l’ancien président du Régime de retraite des enseignants de l’Ontario Claude Lamoureux. Bien des Canadiens ont eu la même réaction, laissant planer des doutes quant au jugement non seulement de M. Morneau, mais aussi du bureau du premier ministre, qui était au courant de la décision du ministre des Finances. N’y voyaient-ils pas un drapeau rouge ?



Maintenant, la commissaire à l’éthique enquête sur un possible conflit d’intérêts de M. Morneau, qui a déposé un projet de loi sur les pensions qui bénéficierait à la firme Morneau Shepell, dont il possédait encore des millions d’actions lors du dépôt et qu’il présidait avant son saut en politique. Il s’est engagé depuis à vendre ses actions et à faire don des profits, ainsi qu’à mettre finalement ses autres actifs dans une fiducie sans droit de regard. Mais le mal est fait.



M. Morneau a dû en plus payer une amende de 200 $ pour avoir violé la Loi sur les conflits d’intérêts en omettant de déclarer sa participation dans la compagnie qui détient sa villa familiale en France. Même si cette enquête de Mme Dawson, tout comme celle qu’elle fait sur le séjour de M. Trudeau sur l’île privée de l’Aga Khan, ne mène nulle part, elle s’ajoute à une série d’incidents qui malmènent l’image du gouvernement Trudeau dans l’esprit des électeurs. M. Trudeau risque de passer de champion de la classe moyenne à premier ministre des riches en moins de temps qu’un égoportrait.



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