INDÉPENDANCE DU QUÉBEC 296

Le premier Canada (2/5)

« Une colonie apte à devenir une nation si… »

Chronique de Bruno Deshaies


Le Canada en Nouvelle-France
« La perfection n’existait dans aucun domaine. […]

La semence avait besoin de se développer,

de grandir pour pouvoir suivre

la transformation de l’Amérique à cette époque.

On sent qu’elle tend vers l’industrialisation.

C’est complet mais petit… »
***
Lentement, la colonie canadienne de la France prend son essor. Cette colonie est à la fois sous l’autorité de l’État et de l’Église. Une symbiose existe, mais qui n’est pas parfaite. Comme ailleurs, il y aura des crises de fonctionnement. Le Fait marquant : « Le Canada est seul et uni ; il s’appuie sur la France… ». Un nationalisme local s’affirme, de même qu’une certaine forme d’impérialisme s’exprime déjà. C’est à la fois une colonie « embryonnaire » et une colonie « apte à devenir une nation ». Le Canada vit sous l’emprise d’une colonisation « intégrale ». Il faudrait toutefois que l’essor dure assez longtemps pour produire les effets coloniaux suffisants au développement progressif du Canada. D’où l’importance de l’effort de colonisation et de protection de l’intégrité de cette société naissante. En conséquence, des moyens de tout ordre sont nécessaires et en quantité suffisante.
Aujourd’hui, nous observons un énorme contraste. La Province de Québec est une dépendance britannique du système fédéral canadian. Son Assemblée nationale est limitée par les pouvoirs qui lui sont dévolus par la Loi constitutionnel de 1867 et l’existence de la Loi constitutionnelle de 1982 avec ses multiples conséquences sur l’avenir du Québec-Français. Les limitations du gouvernement provincial sont proportionnelles à l’intensité des tentatives constantes du fédéral de maintenir et de consolider systématiquement l’union politique, économique, sociale, démographique, territoriale et culturelle du Canada-Anglais coast to coast. Cette tendance ne s’amoindrira jamais compte tenu de la pression américaine. Il est vain d’imaginer que les oppressions accidentelles cesseront complètement, car l’oppression essentielle – soit la perte de l’agir par soi collectif, le remplacement et la subordination de superposition – demeurera toujours tant et aussi longtemps que les Québécois-Français resteront annexés dans une province (une parmi les autres) du Canada entier et qu’ils se contenteront d’administrer un état provincial.
Bruno Deshaies

http://blogscienceshumaines.blogspot.com/

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HIST 585 Introduction à l’histoire du Canada
Maurice Séguin
Synthèse générale de l’évolution

politique et économique

des deux Canadas
Secteur culturel : juste ce qu’il faut.
Le système des écoles n’était pas hypertrophié, mais il y avait des écoles primaires, un enseignement secondaire, un commencement d’enseignement supérieur (dans une colonie à l’époque).
c) Une colonie intégrale : au religieux. Évêché, paroisses, collèges.
d) Une colonie dirigée par l’État et l’Église : État métropolitain et colonial.
Un régime semi-socialiste, par la force des choses : « au commencement c’était l’État ». Avec Talon, ça frise même le socialisme.
L’Église du Canada s’organise (Évêque, vicaire) soutenue par l’Église de France.
e) Une colonie où s’affirme le nationalisme local :
Une petite élite de Français qui désirent rester au Canada, des Canadiens nés dans la colonie. Très tôt, ils veulent participer au gouvernement : ils deviennent conseillers du gouverneur (Vaudreuil qui sera gouverneur de Montréal et de la colonie). Dans le domaine économique, ils font tout ce qu’ils peuvent pour avoir les premiers rangs dans les entreprises lucratives ; ils travaillent aussi à conserver le plus d’intérêts possibles aux coloniaux. L’armée les intéresse aussi : on veut faire admettre des Canadiens aux postes de commande. Il existe une mentalité canadienne, une politique coloniale canadienne, une façon canadienne d’envisager les relations avec les Indiens et les autres colonies : ça ne coïncide pas toujours avec les vues de Versailles. Conflits avec les métropolitains ; crises multiples au civil comme au religieux.
f) Une colonie où existe un impérialisme :
Des Canadiens qui finissent par percer réclament des postes dans la métropole et les autres colonies (par ex. : en Louisiane, dans la marine et dans l’armée française). Une attitude normale d’impérialistes. Talon n’envisage-t-il pas le jour où le Canada enverra des hommes pour défendre la France. Sentiment filial envers la mère-patrie.
g) Une colonie avec ses imperfections :
Comme dans toute société, nous savons que le rendement est passablement faible. Il ne faut pas dire cependant que tout allait mal sous le régime français. Il y aura sans doute des difficultés intrinsèques, par ex. : le Canada est situé au nord, sa principale richesse est la fourrure, et il sera difficile d’impressionner la France pour autre chose ; à cette époque la France a en outre un surplus de blé. Au niveau des hommes des difficultés aussi : parfois des administrateurs ordinaires, peu scrupuleux (gouverneurs ou intendants)… mais c’est comme ailleurs ; elle peut être paralysée par des luttes de clans montés contre le gouverneur ; plusieurs époques de la colonie ont connu la corruption administrative.
Mais le Canada est seul et uni ; il s’appuie sur la France, qui peut corriger les erreurs de tel ou tel homme… « Mieux vaut 100 Bigots bout à bout que le règne du vertueux Murray » (selon M. Séguin).
Importance de l’intégrité d’une société…
h) Une colonie « embryonnaire » :
Il y avait de tout dans les différents secteurs : politique, économique, culturel, religieux, mais un peu comme chez un enfant. C’était peu développé ; il y avait beaucoup à faire dans tous les secteurs. La perfection n’existait dans aucun domaine. Du point de vue démographique, économique, politique, culturel, il y avait beaucoup à faire pour atteindre une vie intégrale, parfaite. La semence avait besoin de se développer, de grandir pour pouvoir suivre la transformation de l’Amérique à cette époque. On sent qu’elle tend vers l’industrialisation. C’est complet mais petit ; nécessité pour la métropole d’alimenter dans chaque domaine (un effort qui aurait suffi pour une colonisation de l’an 800 p. Christum).
i) Une colonie apte à devenir une nation si…
Si la métropole continue à protéger la colonie, à la nourrir, si le Canada continue dans la ligne de son destin, dans les conditions qui l’ont fait naître et grandir : né de la France, il a encore besoin de l’impulsion française… Il est tout près d’un puissant voisin. (À remarquer que le Canada aurait pu ne pas devenir une nation même si le régime français avait continué ; il aurait pu devenir une province d’une nation française qui se serait développé à côté de la vallée du Saint-Laurent.)
CONCLUSION
Le Canada sous la France était une colonie comme les autres du Portugal, de l’Espagne, de l’Angleterre. Une colonisation de même type humain que les précédentes. Il faut se garder d’une tendance très fréquente : isoler la colonisation française des autres.
Fondamentalement, qualitativement, par sa façon d’être, par sa nature, une ressemblance totale avec les autres colonies du même type en Amérique.

NDLE. – Cette comparaison avec les autres colonies en Amérique du Nord est brillamment exposée par l’historien américain Daniel Boorstin dans son Histoire des Américains (Paris, Laffont, révision et mise à jour en 2003, coll. « Bouquins ») en ce qui concerne la période de « L’aventure coloniale » des États-Unis. La synthèse d’Henri Boorstin confirme donc la justesse du point de vue de Maurice Séguin en 1961-1962.

UNE COLONIE DE STYLE DIFFÉRENT : (suite à la prochaine chronique)
RÉFÉRENCE :
Maurice SÉGUIN, « Synthèse générale de l’évolution politique et économique des deux Canadas. » Notes de cours établies probablement par les étudiants qui ont suivi le cours HIST 585 intitulé « Introduction à l’histoire du Canada » en 1961-1962. Description : « Sociologie du national. Les principales explications historiques de l’évolution des deux Canadas. » (Université de Montréal, Département d’histoire.)

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Bruno Deshaies209 articles

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BRUNO DESHAIES est né à Montréal. Il est marié et père de trois enfants. Il a demeuré à Québec de nombreuses années, puis il est revenu à Montréal en 2002. Il continue à publier sa chronique sur le site Internet Vigile.net. Il est un spécialiste de la pensée de Maurice Séguin. Vous trouverez son cours sur Les Normes (1961-1962) à l’adresse Internet qui suit : http://www.vigile.net/Les-normes-en-histoire-1-20 (N. B. Exceptionnellement, la numéro 5 est à l’adresse suivante : http://www.vigile.net/Les-Normes-en-histoire, la16 à l’adresse qui suit : http://www.vigile.net/Les-normes-en-histoire-15-20,18580 ) et les quatre chroniques supplémentaires : 21 : http://www.vigile.net/Les-normes-en-histoire-Chronique 22 : http://www.vigile.net/Les-normes-en-histoire-Chronique,19364 23 : http://www.vigile.net/Les-normes-en-histoire-Chronique,19509 24 et fin http://www.vigile.net/Les-normes-en-histoire-Chronique,19636 ainsi que son Histoire des deux Canadas (1961-62) : Le PREMIER CANADA http://www.vigile.net/Le-premier-Canada-1-5 et le DEUXIÈME CANADA : http://www.vigile.net/Le-deuxieme-Canada-1-29 et un supplément http://www.vigile.net/Le-Canada-actuel-30

REM. : Pour toutes les chroniques numérotées mentionnées supra ainsi : 1-20, 1-5 et 1-29, il suffit de modifier le chiffre 1 par un autre chiffre, par ex. 2, 3, 4, pour qu’elles deviennent 2-20 ou 3-5 ou 4-29, etc. selon le nombre de chroniques jusqu’à la limite de chaque série. Il est obligatoire d’effectuer le changement directement sur l’adresse qui se trouve dans la fenêtre où l’hyperlien apparaît dans l’Internet. Par exemple : http://www.vigile.net/Les-normes-en-histoire-1-20 Vous devez vous rendre d’abord à la première adresse dans l’Internet (1-20). Ensuite, dans la fenêtre d’adresse Internet, vous modifier directement le chiffre pour accéder à une autre chronique, ainsi http://www.vigile.net/Le-deuxieme-Canada-10-29 La chronique devient (10-29).

Vous pouvez aussi consulter une série de chroniques consacrée à l’enseignement de l’histoire au Québec. Il suffit de se rendre à l’INDEX 1999 à 2004 : http://www.archives.vigile.net/ds-deshaies/index2.html Voir dans liste les chroniques numérotées 90, 128, 130, 155, 158, 160, 176 à 188, 191, 192 et « Le passé devient notre présent » sur la page d’appel de l’INDEX des chroniques de Bruno Deshaies (col. de gauche).

Finalement, il y a une série intitulée « POSITION ». Voir les chroniques numérotées 101, 104, 108 À 111, 119, 132 à 135, 152, 154, 159, 161, 163, 166 et 167.





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10 commentaires

  • Joachim Lambert Répondre

    28 décembre 2007

    Suite à l'échange des plus dynamique entre messieurs Deshaies et Rodrigue, voici ce que j'ai trouvé et écrit dans un livre encore non publié intitulé Frankois. Peut-être que cela pourra éclairer le débat?
    Les Français.
    Découverte de la vallée du Saint-Laurent par Jacques Cartier en 1534
    et fondation de la Nouvelle-France par Samuel de Champlain en 1608.
    Utilisation de l’ethnonyme Français de 1608 à 1648
    et de l’ethnonyme Français-Canadiens de 1648 à 1672.
    Les Canadiens.
    Nouvelle-France ou Canada.
    adoption de l’ethnonyme Canadien de 1672 à 1845.
    Naissance d'une nouvelle nation ethnique,
    d'une nouvelle variété de la « race » française.

    Les French-Canadians.
    Ayant récupéré l’ethnonyme Canadien des vaincus de la Nouvelle-France
    en 1787 et se nommant dorénavant Canadians,
    les Canadians d’origine britannique donnent le nom de French-Canadians
    aux Canadiens d’origine française de la « Province of Québec ».
    Haut-Canada et Bas-Canada. Canada-Uni.
    Les Canadiens-Français.
    À partir de 1845, les Canadiens acceptent le nom de Canadiens-Français
    que leur ont donné les Canadians.
    Canada-Uni. Province of Québec.

  • Archives de Vigile Répondre

    26 septembre 2007

    Monsieur Rodrigue, les Canadiens étaient très attachés à la France et le sont demeurés après la conquête malgré une forme de ressentiment à son égard pour la perte du Canada telle que consignée dans le Traité de Paris. Mais ils étaient encore plus attachés au Canada. N'oublions pas que ce Traité de Paris , à son article 4, leur permettait pour une période de 18 mois, savoir jusqu'au 10 août 1864, de quitter le Canada pour n'importe laquelle destination dans le monde, y compris la France. Mais seulement une infime minorité de ses habitants usèrent de cette option pour regagner la France, la très, très vaste majorité préférant demeurer dans leur pays d'alors, le Canada...Par ailleurs, il est bon de rappeler certains témoignages de Canadiens après qu'ils eurent appris, un mois plus tard, la ratification le 10 mars du Traité de Paris par toutes les parties. Ainsi, le 5 août 1763, mère Marguerite d'Youville, affirme à l'abbé Villard de Paris ce qui suit: "Nous avons été surprises et nous nous sommes toujours flattées que la France ne nous abandonnerait pas, mais nous nous sommes trompés dans notre attente; Dieu l'a permis ainsi. Si nous sommes aussi libres d'exercer notre religion et de faire tout le bien que nous trouvons à faire comme nous l'avons été depuis que nous sommes sous la domination anglaise, nous ne serons pas à plaindre pour le spirituel; mais pour le temporel, il y aura plus de misères; on ne trouve pas à gagner sa vie avec eux comme avec les Francais, mais j'espère que la Providence y suppléera." Également, cet autre témoignage d'une Urseline de Québec qui écrit aux Mères ursulines de Paris ce qui suit: "La paix si longtemps désirée, mais conclue à des conditions si opposées à nos désirs, a mis le comble à notre douleur. Nous avons été d'autant plus sensibles à cette triste nouvelle, que nous nous flattions pour lors, plus que jamais, de l'apprendre à d'autres titres pour nous, ne pouvant nous persuader que le Canada entier eût été donné à si bas prix." Ces deux témoignages sont rapportés par l'historien Jacques Lacoursière, aux pages 346 et 347, du Tome I de son Histoire populaire du Québec.

  • Nicolas Rodrigue Répondre

    25 septembre 2007

    Vous parlez comme si les colons Français de la Nouvelle France avait le désir d'être abandonné de la France. Comme si c'était leur désir de ne plus être Français. C'est peut-être le vôtre, mais ce n'était pas leur désir. Même après la guerre de conquète, il craignait de n'être plus Français et ils espéraient encore que la France revienne. Il n'est question d'aucun canadien dans le traité de Paris, on y parle que d'"habitant du Canada" et de "François".

    ARTICLE 4
    « Sa Majesté Britannique convient en outre, que les Habitans François ou autres, qui auroient été Sujets du Roy Très Chretien en Canada, pourront se retirer en toute Sûreté & Liberté, où bon leur semblera, et pourront vendre leurs Biens… »
    ARTICLE 7
    « Afin de retablir la Paix sur des Fondcmens solides & durables, & écarter pour jamais tout Sujet de Dispute par Rapport aux Limites des Territoires Britanniques et François sur le Continent de l'Amerique, il est convenû… »
    Vous pouvez trouvez le mot "canadien" en cherchant dans les archives, mais se sera toujours plus marginale que l'expression identitaire d'une nation Française. Leur attachement à la France était palpable, même après 1763. Même en 1826,soit plus de 50 ans après la guerre de conquête, le journal Minerve se défendait encore d'être un journal canadien voici un extrait:
    « Fait pour les Canadiens, notre papier aura pour bût morale leur union, leur instruction, leur attachement à la morale et à leur religion; pour bût politique, la libre jouissance de leurs justes droits et le respect pour l’empire florissant(Angleterre) dont nous dépendons, et pour son chef auguste. Nous ne croyons pas qu’on nous fasse un crime de dire après cela, que la Minerve sera un papier Canadien. Les intérêts du peuple de ce pays ne sont pas contraires aux droits de la mère-patrie (La France) , des bienfaits de laquelle il n’a qu’à se louer; et aussi son attachement pour elle ne le cède-t-il à aucun sentiment. Mais il est tout naturel que, dans un pays habité par deux peuples d’origine différente quoi qu’également sujet d’un même empire, protégés par les mêmes lois, et jouissant de droits égaux; … » Archives nationales du Québec.

  • Gaston Boivin Répondre

    25 septembre 2007

    Monsieur Rodrigue, l'histoire documente très bien, entre 1750 et 1763, qu'il ya une différence identitaire entre Francais et Canadiens. Durant ce que les Américains ont appellé "The French and Indian War"(appellation beaucoup plus appropriée que " La Guerre de 7 ans"), il n'y a pas beaucoup de batailles où les effectifs n'ont pas été décrits tant par les autorités militaires francaises que par les historiens francais, anglais, américains et canadiens de la facon suivante:-Tant de soldats, dont X des troupes régulières(généralement des Francais), Y miliciens Canadiens, et Z Sauvages. (Cf: Les batailles suivantes: -Jumonville Glen -Fort Necessity -Monongahela -Lac George -Fort Bull -Fort Oswego(Fort Ontario, Fort Chouagen et fort George) -Kittaning -Louisbourg -Fort Carillon -Fort Saint-Frédéric- Granville -Fort William Henry- Village de German Flatts -Fort Frontenac -Fort Duqesne -Fort Ligonier -Fort Niagara -Beauport -Plaines d'Abraham -Sainte-Foy -Restigouche -Mille-iles -Signal Hills, -Fort Levis, toutes, à l'exception de quelque'unes.) Par ailleurs, même la facon de combattre était différente: "On peut considérer les Canadiens comme troupes légères, note encore Parsacau du Plessis(un enseigne des troupes régulières francaises qui s'est battu avec les Canadiens en 1755-1756, tel qu'il l'a écrit dans une lettre à sa dame); ils font la guerre à la manière des Sauvages, étant plus propres pour surprendre l'ennemi et en embuscades qu'à attaquer à découvert. Ils sont robustes et habiués, dès leur bas âge, à courir les bois et à supporter les fatigues de la chasse. Les Anglais, qui ne sont ni aussi alertes ni aussi braves, se laissent toujours surprendre parcequ'ils ne s'exercent pas comme nos Canadiens à faire la guerre dans les bois, ce qui nous donnera toujours la supériorité, puisqu'on ne peut se battre que dans les bois qui couvrent toute l'étendue de ce pays, à moins de se tenir enfermés dans les forts, ainsi que le font les Anglais."Histoire populaire du Québe, tome I, page 278, de Jacques Lacoursière). Wolfe lui-même, après avoir grandement contribué à la prise de Louisbourg en juillet 1758, impatient qu'il est de se rendre tout de suite dans le Saint-Laurent pour attaquer Québec, écrit ce qui suit à Amherst: "Je ne peux regarder de sang-froid les incursions sanglantes de cette meute infernale, les Canadiens (en référence sans doute aux attaques fréquentes qu'ils ont faites avec les indiens et parfois avec les francais depuis plusieurs années contre les villages et les troupes des colonies anglaises); et si nous ne pouvons accomplir rien de plus je dois exprimer le désir de quitter l'armée"( Cf: Histoire populaire du Québec, tome I, page 290)..../ Il s'agit vraiment d'une identité différente, mais les canadiens d'alors, quoiqu'attachés à leur mère-patrie, n'ont pas totalement les pouvoirs d'orienter leur destinée: Ils dépendent de la France pour leur existence et protection.../Quant au sentiment d'abandon qui s'est développé après la conquête à l'égard de la France, il est bien réel : Les Canadiens sont demeurés aigris car ils ont perdu leur pays en raison de décisions et d'absences de décision qui venaient d'ailleurs, d'outre mer, de France!

  • Archives de Vigile Répondre

    25 septembre 2007

    Sans les documents, notre discussion est stérile. (2)
    Mardi 25 septembre 2007 Bruno Deshaies

    Ce que je cite sont soit des originaux ou des copies d’originaux ou des fac-similés.

    Je profite de l’occasion pour corriger une erreur de date dans mon commentaire du 22 septembre au sujet de la Capitulation de Montréal. Il fallait lire le 8 septembre 1760 et non le 13 septembre 1759 qui est la capitulation de Québec.
    Quatrième texte :
    Il s’agit d’un document de l’Intendant Hocquart en 1737 que l’on trouve aux Archives des colonies, Série C11 A, vol. 67 : 40. Reproduit par Michel Allard, et al., éds., L’histoire canadienne à travers le document, Montréal, Guérin, 1976, vol 2, p. 149.
    « Les Canadiens sont naturellement grands, bien faits, d’un tempérament vigoureux. […] »
    Cinquième texte :

    Dans Yves Zoltvany, éd.,The French Tradition in America, New York, Harper & Row, 1969, p.149

    Zoltvany donne la traduction suivante :
    « … The Canadians, that is to say, the Creoles of Canada draw in with their native breath and air of freedom, which renders them very agreeable in the commerce of life […] »
    Texte français :
    Dans CHARLEVOIX, [Pierre]-François-Xavier de, Histoire et description générale de la Nouvelle France, avec le Journal historique d'un Voyage fait par ordre du Roi dans l'Amérique
    septentrionnale
    , Montréal, Éditions Elysée, 1976, (fac-similé de 1744). [TÉMOIGNAGE DE 1720]
    [Troisième lettre datée du 28 octobre 1720 et intitulée :
    « Description de Quebec,Caractere de ses Habitans, & de la façon de vivre dans la Colonie Françoise »] « [...] On jouë, on fait des Parties de Promenades; l'Eté, en Caléche, ou en Canot; l'Hyver, en Traîne sur la Nége, ou en Patins sur la Glace. On chasse beaucoup; quantité de Gentilshommes n'ont guéres que cette ressource pour vivre à leur aise. Les nouvelles courantes se réduisent à bien peu de choses, parce que le Pays n'en fournit presque point, & que celles de l'Europe arrivent tout-à-la fois, mais elles occupent une bonne partie de l'année : on politique sur le passé, on conjecture sur l'avenir; les Sciences & les Beaux Arts ont leur tour, & la conversation ne tombe point. Les Canadiens, c'està-dire, les Créoles du Canada, respirent en naissant un air de liberté, qui les rend fort agréables dans le commerce de la vie, & nulle part ailleurs on ne parle plus purement notre Langue.
    On ne remarque même ici aucun Accent. On ne voit point en ce Pays de Personnes riches, & c'est bien dommage, car on y aime à se faire honneur de son bien, & personne presque ne s'amuse à thésauriser. On fait bonne chere, si avec cela on peut avoir de quoi se bien mettre; sinon, on se retranche sur la Table, pour être bien vêtu. Aussi faut-il avouer que les Ajustemens font bien à nos Créoles. Tout est ici de belle Taille, & le plus beau Sang du Monde dans les deux Sexes; l'esprit enjoué, les manieres douces & polies sont communs à tous; & la rusticité, soit dans le Langage, soit dans les façons, n'est pas même connuë dans les Campagnes les plus écartées. ? (vol. 3, pp. 79-80)
    Source : http://www.tlfq.ulaval.ca/quebetext/PDF/CHARLEVOIX4.pdf
    Site du Trésor de la langue française du Québec (Université Laval) « Base de données textuelles Québétext ». http://www.tlfq.ulaval.ca/quebetext/
    C.Q.F.D.

  • Nicolas Rodrigue Répondre

    24 septembre 2007

    Vous n'avez que des traductions écrite en 1963. Pendant près de deux siècles, les historiens ont remplacé l'expression "colon Français" par "Canadiens" afin d'attaché leur appartenance identitaire au passé. Le rejet de la France a été la cause de beaucoup de révisionnisme, lors de la traduction du vieux français. Et on a retrouvé des documents au Québec en "François" jusqu'en 1826. Le mot "Canadien" lui-même ne semble pas existé en vieux français, on parlait plûtot de "la colonie françoise du Canada". À partir de ces traductions, on a commencé à parler de l'histoire du Canada plutôt que de l'histoire de la nouvelle-France. Et on répète la même erreur aujourd'hui dans nos livres d'histoire avec le "Québécois" ou encore le "Québécois-Français". Les acadiens eux-mêmes ont oubliés que leur drapeau n'est qu'une réplique du tricolore Français de la révolution de 1789, soit après 1760.
    Il y a plusieurs document que je n'ai pas en ma possession qui exprime bien ce sentiment d'abandon de la France qu'on peut retrouver dans des chants et des poèmes populaire de l'époque. C'est de cette triste époque que vient l'expression connu de "Maudit Françâ". Car la France avait réellement abandonné sa colonie en faveur des antilles française et de ses épices. La nouvelle France n'était plus pour eux que quelques arpents de neige et le commerce de la fourrure n'était plus autant rentable.
    Alors, les colons n'ayant plus de sentiment d'appartenance avec la France, le Canada comme territoire fut alors devenu leur seul port d'attache identitaire. Une belle erreur selon moi qu'on répète aujourd'hui avec l'identité Québécoise. On se divise pour mieux se faire dominer.

  • Archives de Vigile Répondre

    22 septembre 2007

    Sans les documents, notre discussion est stérile.
    « L’identité canadienne s’est fondé par un sentiment d’abandon et de rejet vis-à-vis la France et lorsque celle-ci se laïcisa lors de la révolution française, ce sentiment d’appartenance c’est rompu en encore plus affermissant ainsi leur nouvelle identité "Canadienne", car nous étions plus catholique qu’en France. Mais tout cela n’a pas été voulu d’eux, mais imposé par les évènements. » (Nicolas Rodrigue)
    samedi 22 septembre 2007 Bruno Deshaies
    Personne ne nie l’influence de la culture française et de la religion catholique au cours de l’évolution historique des colons du Canada en Nouvelle-France. Ce que je dis concerne des colons qui s’adaptent à un nouveau milieu géographique et qui sont confrontés à des défis différents de ceux de la France. Ces événements se passent avant 1760.
    C’est commettre un anachronisme que de vouloir faire intervenir la Révolution française vingt-neuf ans plus tard dans le débat au sujet des Canadiens de la Nouvelle-France. Veuillez noter que dans cette deuxième chronique sur le Canada en Nouvelle-France nous parlons surtout de colonie, de colonisation, de façonnement et de développement progressif d’une colonie française dans la vallée du Saint-Laurent qui ne sera pas différente de l’évolution de celle des autres colonies européennes en Amérique.
    Quant au nom « Canadien », il faut vraiment faire appel aux documents.
    Premier texte :
    – Capitulation de Montréal (18 septembre 1759)
    Art. 36 : Si par le traité de Paix, Le Canada reste à sa Mté Britannique, Tous Les Francois, Canadiens, Acadiens, Commerçans et Autres personnes…
    Source : Marcel Trudel et Guy Frégault, éd., Histoire du Canada par les textes, Montréal, Fides, 1963, Tome I (1534-1854), p.110. Ces mêmes historiens écrivent dans la présentation du document ce qui suit : « Le 18 septembre 1759, le sort d’une ville avait été en jeu ; en 1760, c’est le destin de la nation canadienne. » Je crois que ces deux grands spécialistes du régime français en Nouvelle-France n’étaient pas sans savoir qu’une nation « canadienne » prenait forme lentement.
    Deuxième texte :
    – Lettre de Vaudreuil au ministre de la Marine en France (5 octobre 1759)
    Vaudreuil raconte la bataille du 13 septembre 1759. Il écrit :
    Le désordre fut inséparable de la vivacité de la marche, notre troupe fit une décharge générale sans réserver un seul coup à tirer ; aussi se replia-t-elle avec beaucoup de confusion, les ennemis qui étaient en bon ordre les poursuivirent jusque dans les faubourgs Saint-Louis : ce fut dans ce moment que j’arrivai sur les hauteurs de Québec, je me flattai d’abord de rallier les troupes, mais rien n’égalait leur déroute et leur découragement. Les Canadiens furent plus sensibles à ma voix. J’en rassemblé 1,000 à 1,200 qui revinrent sur la hauteur…
    Source : Marcel Trudel et Guy Frégault, éd., Histoire du Canada par les textes, Montréal, Fides, 1963, Tome I (1534-1854), p. 100.
    Troisième texte :
    – Extrait du Journal des campagnes du Canada de 1755 à 1760 par le comte de Maurès de Malartic, lieutenant général des armées du roi, gouverneur des îles de France et de Bourbon. Édition de G. de Malartic et P. Gaffarel à Dijon, 1890, p. 368-369.

    ...supposé qu’il y eut nécessité d’attaquer, il fallait faire des dispositions, former trois colonnes avec les cinq bataillons, placer les Canadiens dans les intervalles et les laisser tirer et marcher suivant leur usage….
    L’auteur dit bien : « placer les Canadiens dans les intervalles ET LES LAISSER TIRER ET MARCHER SUIVANT LEUR USAGE….
    Source : Marcel Trudel et Guy Frégault, éd., Histoire du Canada par les textes, Montréal, Fides, 1963, Tome I (1534-1854), p. 102.
    Voilà des documents non-équivoques qui disent bien que le nom « Canadien » était utilisé dans les écrits portant sur la population française au Canada en Nouvelle-France.
    Ces quelques références invalident votre théorie que « l’identité canadienne s’est fondé par un sentiment d’abandon et de rejet vis-à-vis la France ». Les Canadiens avant 1760 s’appuyaient sur la France pour se défendre contre les « ennemis » et les « Anglais ». Les documents de l’époque l’attestent.

  • Nicolas Rodrigue Répondre

    22 septembre 2007

    M.Deshaies, vous n'avez qu'à relire les traductions fidèle des textes qui datent de l'époque de la Nouvelle-France et vous allez constatez qu'il n'est pas question de "Canadiens" dans leurs écrits. Il y a une constance dans les vieux documents historiques qui date d'avant 1760 et cette constance est l'affirmation d'une nation Française et non Canadienne. Le concept même d'une nouvelle France avait pour but de fonder ici une nouvelle France et non un nouveau Canada. C'est d'une nouvelle race Française qu'on parlait à cette époque. Et l'effort d'assimilation des indiens était justement dans le but de faire d'eux des "Français", ils étaient même considéré comme tel par décret du Roi. L'identité canadienne c'est fondé par un sentiment d'abandon et de rejet vis à vis la France et lorsque celle-ci se laïcisa lors de la révolution française, ce sentiment d'appartenance c'est rompu en encore plus affermissant ainsi leur nouvelle identité "Canadienne", car nous étions plus catholique qu'en France. Mais tout cela n'a pas été voulu d'eux, mais imposé par les évènements.
    Pourquoi pensez-vous qu'on retrouve en Guadeloupe ou à Saint Pierre et Miquelon, une culture beaucoup plus Française qu'ici? Et bien c'est parce qu'ils n'ont pas subit cette abandon de 1760. Et pourtant, ils ne sont pas moins éloigné géographiquement de la France que nous.
    Vous avez un conception civique du nationalisme "Canadien" lié au territoire du Canada. La race Française de l'époque n'avait pas ce concept de leur identité. Le roi de France était aussi le roi des Français. Le concept de l'identité "Francaise" était sans frontière, elle n'était pas liés au territoire de la France. C'est pour cela qu'on a retrouvé l'idée d'une Amérique française, d'une Afrique française ou encore l'indo-Chine Française. Est-ce que votre Canada est réellement Français, j'en doute. Francais de langue oui(sauf si on parle le canadianisme), mais non de coeur ou de culture française.

  • Archives de Vigile Répondre

    21 septembre 2007

    « Ils étaient Français et non Canadiens. Et encore moins Québécois. » (Nicolas Rodrigue)
    vendredi, 21 septembre 2007 Bruno Deshaies
    Cher Monsieur Nicolas Rodrigue,
    Il y a beaucoup d’affirmations dans votre commentaire. Il faudrait démontrer maintenant avec des documents à l’appui ce que vous affirmez. C’est mon premier point. Les Français qui venaient au Canada, une des régions de la Nouvelle-France, étaient des « colons » français, bien sûr, et non des immigrants. Mon deuxième point. Cette « colonie » française était comparable aux autres colonies de l’Amérique. C’est ce que les deux chroniques viennent de mettre en évidence. Troisième point. Lorsqu’on fait de l’histoire, il faut bien comprendre que le document est une information sur le passé et qu’il faut en décoder le sens. Les gouverneurs du Canada en Nouvelle-France ont bien compris les aspects de l’évolution de cette société coloniale qui prenait forme avec l’apport de la France et la canadianisation d’un ensemble de traits qui étaient propres aux coloniaux. Quatrième point. Bien sûr, il y a des coloniaux français au Canada, mais ils prennent conscience progressivement de leur différence tout en admettant que l’apport de la Métropole française est nécessaire. Ils vivent dans l’empire français ; demain, ils deviendront malgré eux des « sujets » britanniques.
    Voilà une leçon que nous pouvons tirer de l’histoire des colons du Canada (le plus gros groupe de Français) en Nouvelle-France. Ce n’est pas un hasard que la guerre en Amérique du Nord a cherché à détruire le Canada pour mettre fin à cette colonisation française en Amérique. Les Colonies anglaises aidées de la Grande-Bretagne ont réussi à briser le Canada Français naissant et en voie de mettre au monde une nation « canadienne » qui aurait été une conséquence du premier Canada français. Pour comprendre un des aspects importants de la société canadienne en Nouvelle-France, lisez la brochure d’Eccles sur La société en Nouvelle-France.

  • Nicolas Rodrigue Répondre

    21 septembre 2007

    M. Deshaies, je crois que vous avez une fausse perception de l'identité des premiers colons. L’affirmation national de l’identité canadienne était très marginal avant 1760, le mot « canadien » lui-même est presque inexistant. Les colons se déclaraient plutôt comme étant des Français et non comme des Canadiens. Le Canada de la Nouvelle-France n’était pas un pays indépendant, mais une région de France au même titre que la Lorraine. Ce n'était que le nom d'un territoire, rien de plus. Il y avait autant de personne qui se disait "canadien" dans le Canada de la Nouvelle-France que de personnes qui se disait "Québécois" dans le Québec d’avant la révolution tranquille, soit presque personne. Ensuite, plusieurs se demande pourquoi notre histoire a-t-elle un passé qui ne dépasse guère 30, 40 ou 50 ans ? La raison est pourtant simple, la nation Québécoise n’a pas plus de 50 ans. Nous ne sommes plus ce que nos ancêtres étaient, ce n’est plus la même nation qu’autrefois. Un groupe ou une collectivité devient une nation lorsque les membres de ce même groupe exprime leurs sentiments d’appartenance au même groupe de LA MÊME MANIÈRE. La nation est lié à un sentiment, à une émotion et non au territoire. Chaque façon différente d’exprimer une identité véhicule automatiquement un esprit, une culture et une mentalité différente. L'identité des premiers colons n'était pas lié au "Canada", qui n'était pour eux que le nom du territoire. Et pour ce qui est du territoire, on mettait beaucoup plus l'accent sur le terme de "Nouvelle-France", car ils étaient attaché de coeur à la mère patrie.
    De plus, nous occultons notre passé parceque nous avons rejeté un passé qui se définissait comme étant Catholique. Et le passé lointain, soit à l’époque de la Nouvelle-France se définisait comme étant à la fois Catholique et Français. Nous avons tout simplement rejeté notre appartenance Française et Catholique. La nation Française avant la révolution Française était catholique par définition. Nous regardons ce passé comme dans un miroir qui ne reflète pas notre image, qui ne reflète pas l’identité "Québécoise" ou "Canadienne".
    Il ne faut pas regardez le passé avec les yeux d’aujourd’hui, mais il faut regarder le passé avec les yeux de ceux qui ont vécu à cette époque. La nation Québécoise est laïque par définition. Et la nation qui a vécu au temps de la Nouvelle-France était Catholique et Français par définition. Notre crise d’identité se trouve dans ce déracinement. Nous ressentons un peu aujourd’hui ce que les Français d’ici ont ressenti lorsqu’ils ont été déraciné de la France par la force, en 1760. Ce qui a provoqué l’émergence de la nation dites "Canadienne". Alors, M.Deshaies, vous seriez aimable de ne pas leur attribué une identité à laquelle, ils ne s'identifiaient pas. Vous répétez l'erreur des historiens du 19e siècle. Ils étaient Français et non Canadiens. Et encore moins Québécois.