Le sondage Léger Marketing pour Le Devoir pourrait signifier que l'ADQ de Mario Dumont va former l'opposition officielle dans le prochain Parlement. Pourquoi pas? Ce n'est pas la première fois qu'on assiste à la mort d'un parti politique au Québec!
C'est le coloré Victor-Lévy Beaulieu qui, le premier cette semaine, a évoqué «la fin du Parti québécois». Est-ce possible que l'on assiste à la disparition d'un autre parti politique, comme en 1973 le Parti québécois a pris la place de l'Union nationale sur les banquettes de l'opposition officielle à l'Assemblée nationale? L'Union nationale avait duré un peu plus de 40 ans. L'âge du Parti québécois aujourd'hui!
Les historiens ne s'entendent pas sur les raisons de la fin de l'Union nationale mais certainement que la disparition prématurée de ses chefs y fut pour beaucoup. Après la mort du fondateur, Maurice Duplessis, en 1959, ses successeurs Jean-Paul Sauvé et Antonio Barrette ne durèrent que quelques mois. On crut le parti en pleine renaissance avec l'arrivée au pouvoir de Daniel Johnson (père) mais celui-ci mourut prématurément deux ans plus tard et le Parti disparut lentement sous Jean-Jacques Bertrand, Gabriel Loubier, Maurice Bellemare.
Les chefs péquistes
Le Parti québécois aussi fait grande consommation de chefs depuis le décès du père fondateur, René Lévesque: son premier successeur, Pierre-Marc Johnson, n'a duré qu'un hiver, puis Jacques Parizeau n'a pas voulu gérer son échec référendaire, Lucien Bouchard a baissé les bras devant l'arrogance de Jean Chrétien, et Bernard Landry a lui aussi abandonné devant la grogne de ses troupes. André Boisclair a le rare privilège de vivre avec quatre prédécesseurs encore vivants, dont deux au moins - Parizeau et Landry - n'ont pas la langue dans leur poche. Situation intenable.
Ce qui m'a frappé cette semaine, c'est l'âge moyen des contestataires du jeune chef du Parti québécois. Victor-Lévy Beaulieu, Yves Michaud, Bernard Landry, Gérald Larose... Cela commence à faire un peu ligue du vieux poêle, non? Et le discours du Parti québécois et de son chef, jusqu'à cette semaine, était trop montréalais.
Par contraste, l'Action démocratique semble en prise directe avec ce que certains appellent «le Québec profond», celui qui n'a pas accès aux grands médias de Montréal et qui accumule les frustrations sans que les dirigeants politiques s'en inquiètent. Les interventions de Mario Dumont sur la multiplication des accommodements «déraisonnables» et «l'à-plat-ventrisme» des dirigeants libéraux et péquistes ont fait mouche. Même si le premier ministre Jean Charest continue à minimiser la question, il a envoyé sa ministre Julie Boulet calmer les petites municipalités de la Mauricie. Et André Boisclair a pour sa part plongé dans la mêlée jeudi dernier - il était temps!
C'est le sondage de Léger Marketing qui me donne l'audace d'envisager, comme Victor-Lévy Beaulieu, la disparition du PQ.
Le PLQ plafonne
Un autre sondage, de CROP pour La Presse, confirme la glissade du Parti québécois dans les intentions de vote depuis l'arrivée d'André Boisclair à sa tête. Mais le Parti libéral plafonne - autour du tiers des intentions de vote - et son impopularité demeure. C'est au niveau des intentions de votes destinés à l'Action démocratique que les deux sondages diffèrent. Les questions posées aux sondés différaient: CROP demandait aux Québécois s'ils étaient prêts à voter pour tel ou tel parti, sans préciser davantage, tandis que Léger associe le nom du chef à celui du parti, comme dans «l'Action démocratique de Mario Dumont».
Cela fait toute une différence mais elle est justifiée. La personnalité des chefs tient une telle place dans les campagnes électorales qu'elle influence les résultats. En fait, avec le développement de la couverture télévisée, le chef est probablement le principal atout, ou le pire handicap des partis politiques, avant le programme et avant la qualité des candidats.
Va donc pour une bonne performance électorale de l'Action démocratique en 2007! On avait prédit la même chose en 2003, avec le résultat que l'on sait. La différence est qu'en 2003, Mario Dumont avait bâti un programme en fonction des priorités des gens d'affaires et des grands bourgeois d'Outremont. En 2007, et ses prises de position sur les accommodements raisonnables en sont l'illustration, il parle au nom d'une majorité silencieuse qui ne se taira plus: les élus municipaux d'Hérouxville lui ont donné le goût de s'exprimer.
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