Le Nous de Pauline fait mouche

Pauline Marois a joué gros avec son projet de loi sur l'identité, mais elle semble avoir tiré le bon numéro.

Climat politique au Québec


Voilà l'une des conclusions de notre plus récent sondage CROP: la chef du PQ a fait mouche en faisant de la protection de la langue française la pierre d'assise de son projet identitaire.
En tapant sur le clou de l'identité, Mme Marois a voulu cet automne bousculer Mario Dumont sur un terrain qu'il occupait seul depuis un an. Contrairement à l'écrasante majorité des commentateurs, les Québécois semblent penser que Pauline Marois n'est pas allée trop loin en liant la connaissance minimale du français au droit de se présenter aux élections. Que cette mesure n'ait à peu près aucune chance de survivre au test des tribunaux n'a pas ému les électeurs. Ce qu'ils ont retenu, c'est que le Parti québécois de Pauline Marois place la langue française au centre de la citoyenneté québécoise.
Le plus ironique de l'affaire, selon ce qui se dit au PQ, c'est que Pauline Marois elle-même aimerait bien trouver une façon de reculer sur cet aspect rébarbatif de son projet de loi sans perdre la face. Elle pensait, apparemment, que Jean Charest ou Mario Dumont accepterait de débattre de son projet de loi et elle était disposée à retirer la mesure concernant l'éligibilité aux élections en fonction de la connaissance du français. Évidemment, ni Mario Dumont ni Jean Charest n'allaient faire une telle fleur à leur adversaire péquiste, préférant laisser ce projet de loi mourir de sa belle mort. Ce n'est tout de même pas la chef du troisième parti qui va dicter les priorités de l'Assemblée nationale, ont naturellement objecté l'ADQ et le PLQ.
N'empêche, Mme Marois a réussi à imposer son projet identitaire au sein de l'électorat. Pour elle, c'est même le meilleur des scénarios. Elle peut continuer de prôner une politique plus ferme de francisation des immigrants, sans avoir à défendre un projet de loi qu'elle savait elle-même défectueux.
Si Mario Dumont avait usé d'une telle stratégie, nous aurions été quelques-uns à parler d'opportunisme politique et d'électoralisme à courte vue. À l'évidence, ce n'est pas très différent avec Pauline Marois. Comme le chef de l'ADQ, elle s'est aventurée sur un terrain émotif et a lancé un beau gros ballon d'essai pour voir comment réagiraient les Québécois.
Coup de chance ou grande stratégie (la chef du PQ est plus reconnue pour son expérience que pour son instinct), Pauline Marois a non seulement visé juste, mais les astres de la grande constellation du Nous semblent s'aligner en sa faveur en ce moment.
Les données du recensement de 2006, rendues publiques ce mardi et qui démontrent un recul du poids démographique des francophones, serviront la cause des gardiens de l'orthodoxie identitaire.
Le vrai test de Pauline Marois dans les mois qui nous séparent des prochaines élections est de savoir jusqu'où elle ira pour rassurer une base électorale francophone inquiète, surtout en région.
Faudra voir aussi comment Mario Dumont et Jean Charest réagiront à cette remontée marquée du PQ dans les intentions de vote et, surtout, à son avance très forte chez les francophones. Si le deuxième a pris un peu de mieux cet automne, le premier, par contre, connaît des moments difficiles.
Éclipsé sur son terrain de prédilection de l'identité, Mario Dumont n'a pas réussi à accrocher les électeurs avec sa croisade contre les commissions scolaires. On constate aussi que la performance très moyenne des députés adéquistes à l'Assemblée nationale cette session se répercute dans les sondages.
Depuis septembre, l'ADQ a perdu 8 points dans les intentions de vote et Mario Dumont se retrouve troisième à la question «lequel des leaders politiques ferait le meilleur premier ministre» avec un maigre 23%, contre 27% pour Jean Charest et 36% pour Pauline Marois. L'ADQ est aussi troisième dans les intentions de vote générales.
De toute évidence, M. Dumont est desservi par une équipe parlementaire inexpérimentée qui a commis quelques gaffes au cours des dernières semaines. Le problème du chef de l'ADQ, c'est que son équipe À est dans l'ombre et il sera difficile de trouver des circonscriptions «prenables» pour les Pierre Brien, Joëlle Lescop ou Diane Bellemare.
Dans les circonstances, une mauvaise performance de l'ADQ dans les partielles (à venir en 2008) de Pointe-aux-Trembles et Bourget ferait très mal à Mario Dumont.
Jean Charest, lui, a connu une bonne session, mais il partait de loin. Son gouvernement, qui a multiplié les annonces depuis quelques mois, a vu le taux de satisfaction des Québécois à son égard augmenter de 14 points depuis septembre (il est maintenant à 47%). Il a aussi gagné 6 points dans les intentions de vote, mais il reste troisième, à 23% chez les francophones.
Chez les libéraux, on fait le pari que la satisfaction à la hausse continuera de se répercuter sur les intentions de vote. En priant pour que les allégations de Karlheinz Schreiber ne laissent pas trop de traces.
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