Colloque du PQ

Le nationalisme compensatoire

Proposons l'indépendance pour agir, et non pas l'action en attendant l'indépendance.

Tribune libre 2009

Texte publié dans Le Devoir du 22 novembre 2009 sous le titre "Indépendance et nationalisme provincial"
***
Il y a quelques semaines, on nous annonçait la tenue prochaine d'un colloque péquiste, et, précédant tout juste ce rassemblement, le lancement d'un livre de Jacques Parizeau.

Ceux que le potentiel de controverse de cette séquence d'événements faisait saliver, n'avaient peut-être pas prévu que l'ouvrage de l'ex-Premier Ministre éviterait la polémique, et oubliaient peut-être que le PQ, depuis un moment, est en mode " flou artistique ", donc difficile à coincer, quant à la réalisation de l'indépendance.

Ainsi, cette semaine s'est déroulée sans turbulence ni déchirage de chemise, tant et si bien que les médias n'ont pu que parler d'indépendance, et seulement d'indépendance, pendant plusieurs jours, sans la moindre diversion. Ça ne s'était pas vu depuis des siècles, et il faut, ne serait-ce que pour cela, saluer la sagesse, et le dévouement, de M. Parizeau, notre Yoda national (pensez-y, au delà d'une vague parenté physique, les deux personnages dans leur entièreté on plus en commun qu'il n'y paraît à prime abord ! ).

Sauf que, si on met en parallèle le discours de M. Parizeau et les vapeurs qui émanent actuellement du PQ, on trouve bel et bien un important clivage, tout aussi spectaculaire que si le premier avait accusé le second d'être dans les patates.

Alors que, d'un côté, on parle calmement et sereinement d'indépendance, de l'autre, on s'affaire surtout à manipuler l'ingrédient instable -- et déprimant, en ce qui me concerne -- du nationalisme provincial.

Loi 101, constitution, cour suprême, etc. Bref, on joue défensif, dans un film qu'on a vu et revu depuis quarante ans, dont on connaît l'issue, invariable : c'est Ottawa qui tranche.

Cette façon qu'a le parti Québécois d'aborder les questions d'identité et de langue, sans d'abord proposer un indépendantisme consistant et décomplexé, relève clairement de ce que j'appelle le nationalisme compensatoire.

Cette démarche, qui tend à poursuivre l'oeuvre nationaliste de l'Union Nationale et des Libéraux d'autrefois, et qui fait comme si nous n'avions pas foncé dans le mur canadien depuis, est devenue une mauvaise manie si on la regarde sous l'angle indépendantiste.

Parce que, non seulement est-elle porteuse d'autant de défis électoraux que l'indépendance elle-même, sinon plus parce qu'elle ajoute le fardeau de la suspicion d'un l'échéancier caché, mais en plus, ceux qui la proposent font du même souffle la démonstration, volontaire ou non, qu'il est possible de satisfaire les aspirations québécoises à l'intérieur de la tutelle fédérale.

À mon sens, l'indépendance devrait être favorisée comme moyen de régler les questions identitaires, et non le cadre provincial.
Proposons l'indépendance pour agir, et non pas l'action en attendant l'indépendance.
On peut être en accord ou non avec ce que j'avance ici. Mais on doit admettre que cette semaine, et depuis un certain temps, Parizeau et le PQ ne parlent pas de la même chose.




Nic Payne
Montréal



Laissez un commentaire



2 commentaires

  • Jean-François-le-Québécois Répondre

    23 novembre 2009

    @ Monsieur N. Payne:
    Vous dites: «tout aussi spectaculaire que si le premier avait accusé le second d’être dans les patates».
    Mais, à mon avis, c'est bien ce que fait monsieur Parizeau, même s'il n'utilise pas exactement ces termes-là! Et le PQ actuel, depuis l'ère Boisclair jusqu'à aujourd'hui, le méritait amplement!
    Écoutez, pour qu'une véritable farce telle que l'ADQ devienne l'opposition officielle, aux avant-dernières élections, et que maintenant QS aille chercher des partisans déçus du PQ en s'étant déclaré un parti souverainiste (alors que Françoise David refusait de se prononcer sur la question, au début), il faut bien en conclure que le PQ a besoin de faire le ménage, et de corriger le tir.

  • Archives de Vigile Répondre

    22 novembre 2009

    En bref, Monsieur Payne, il faut parler clair, ce que le PQ ne fait pas depuis Parizeau. Il affectionne les faux semblants.
    C'est toujours un plaisir de vous lire.