Le mode de scrutin proportionnel est un pré-requis a l’indépendance du Québec

Réforme électorale


Cette affirmation peut sembler osée, voire ridicule, mais je tenterai de la justifier en me basant sur le syllogisme suivant : 1) L’indépendance nationale du Québec requiert un parti indépendantiste, et 2) un mode de scrutin proportionnel est nécessaire à l’émergence d’un parti indépendantiste ; donc, un mode de scrutin proportionnel est un pré-requis à l’indépendance du Québec.
L’indépendance nationale du Québec requiert un parti indépendantiste, capable de catalyser et de participer à la création d’une coalition politique pour l’indépendance du Québec. Il devient de plus en plus évident, selon une certaine lecture des choses du moins, celle que j’appelerais de « l’indépendantisme lucide », qu’il y a un manque dans le paysage politique québécois. En effet, le Québec n’a pas de parti indépendantiste.
Le PQ est un parti fendu en deux, avec une base militante qui désire l’indépendance, et un sommet embourgeoisé qui désire gouverner, et qui vend l’indépendance dans sa plate-forme politique, pour pouvoir gouverner. Il s’agit sans doute de la plus grande manipulation politique de l’histoire du Québec, celle de faire croire aux militants du PQ que les élites du parti sont indépendantistes, alors que plusieurs ne sont que des opportunistes de l’indépendance.
On ne peut cependant pas oublier que le RIN s’est rallié, par dépit, au PQ, peu après sa fondation, et que cet auto-sabotage, en fait, était conditionné par les règles du système politique québécois. L’unité, à ce moment, était nécessaire, mais surtout, c’est mon point, conditionnée par le mode de scrutin bipartisan qui fait que les divisions d’un camp minent ses chances de gouverner ou d’être adéquatement représenté.
Or, le scrutin proportionnel, parce qu’il permet de distinguer des formations politiques avant le vote, puis de les rassembler après le vote, pour gouverner, ou pour accomplir un projet politique, ne présente pas cet inconvénient. Plutôt, il favorise une certaine diversification de la pensée politique, donc le débat et la délibération, ce qui, de toute évidence, manque au Québec, avec les progressistes, les écologistes et les indépendantistes dans la marge.
Il y a quatre positions, au Québec, sur la question nationale : le oui (indépendantiste), le oui-non (souverainiste-association), le non-oui (affirmationistes-autonomistes) et le non (fédéralistes). Or, ce que l’on réalise, c’est que certaines de celles-ci sont ou ont été confondues, par force, mal-représentées, voire écartées. Il n’y a pas de raison qu’une démocratie agisse ainsi.
Il n’y aura pas de parti indépendantiste au Québec sans scrutin proportionnel. Il pourrait y avoir un parti, mais celui-ci demeurera mal-représenté, ou écarté, par l’effet du carcan bipartisan. Le tripartisme auquel nous assistons est une anomalie temporaire, rendue possible par le fait que trois forces sont, aux urnes, quasi à égalité. Cependant, il ne faut oublier qu’un simple jeu de quelques points pourrait, je dirais même fera, capoter la balance fragile qui s’est instaurée aux dernières élections.
De toute manière, il faut croire que même si l’anomalie tripartisane perdure, cela ne changera rien à la situation d’un éventuel parti indépendantiste. La pression au vote utile sera même plus grande et l’effet d’écartement proportionnellement plus important, lui aussi. Il n’y a donc pas d’issue, il faut mener la lutte pour l’indépendance, mais aussi y adjoindre une lutte pour la démocratie.
Le Mouvement pour une démocratie nouvelle a réinitié cette lutte, il y a quelques années, mais ce mouvement s’est embourbé dans une logique de demander aux acteurs qui profitent et dépendent du système de changer ce-dernier. Plutôt, la voie qui devrait être suivie, dans une perspective d’émancipation politique, est celle de l’Assemblée citoyenne, constituée de citoyens et citoyennes sélectionnés aléatoirement au sein de la population et habilités à proposer une question référendaire, un nouveau mode de scrutin.
Cette formule dite de démocratie délibérative pourrait également constituer une troisième voie, drôlement plus démocratique que les autres, pour mener à terme le projet d’indépendance nationale. Une Assemblée de citoyens du Québec pourrait, en effet, se voir attribuer le pouvoir de poser la question constitutionnelle par excellence aux Québécois.
De plus, une telle Assemblée, institutionnalisée, pourrait constituer la pierre angulaire d’un nouveau modèle politique, dans lequel le pouvoir d’initiative référendaire en matière constitutionnelle serait attribué en permanence à une Assemblée de citoyens. Plusieurs autres questions pourraient donc être étudiées sobrement, prenant tout le temps nécessaire, pour faire du Québec une nation indépendante, ayant choisie et constituée elle-même son régime politique, au lieu de reprendre le calque de la démocratie représentative de type britannique.
Je vois donc le projet d’une Assemblée citoyenne sur la réforme du mode de scrutin au Québec comme un premier pas, pour que le peuple du Québec soit souverain, ce qui est en soi une nécessité, pour que le Québec puisse être indépendant. L’indépendance, après tout, ne requiert pas seulement un État, mais aussi une culture politique, soit des citoyennes et citoyens capables de s’assumer comme tels, politiquement.
David Litvak
Campagne pour une Assemblée citoyenne sur la réforme du mode de scrutin au Québec : www.assemblee-citoyenne.qc.ca (avec une pétition en ligne)
Voir aussi cet article qui aborde la même question : http://www.pressegauche.org/spip.php?article717

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[Campagne pour une Assemblée citoyenne sur la réforme du mode de scrutin au Québec ->http://www.assemblee-citoyenne.qc.ca/]





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1 commentaire

  • Jacques Bergeron Répondre

    20 juillet 2007

    Cher monsieur, Je viens de lire avec le plus grand intérêt votre texte. Permettez-moi de diverger quelque peu sur la méthode à utiliser pour que notre «Patrie» devienne indépendante. Au-delà de la question du «mode de scrutin», il me semble exister une autre façon de faire la promotion de l'indépendance afin de convaincre les Québécoises et les Québécois du bien-fondé de notre idéal, ce que les tenants du mode de scrutin à la proportionnelle semble oublier, tout obnubilés par leur désir d'entrer dans le «Saint Lieu» de notre gouvernement, l'Assemblée nationale, malgré la volonté du peuple de ne pas vouloir les «y» voir.Depuis plusieurs années,disons depuis au moins la remise d'un certain mémoire sur l'avenir du Québec en février 1995, nous tentons de convaincre les indépendantistes du besoin de consulter l'ensemble de nos concitoyennes et de nos concitoyens sur le genre de pays dans lequel ils (et elles) veulent habiter. Bien sûr que cette consultation permettra de connaître leur opinion sur le mode de scrutin, puisqu'il me semble impossible d'oublier cette hypothèse dans la partie où ils (et elles) échangeraient sur les gouvernements autonomes des régions et sur le mode électoral qu'on devrait y associer.Comme je me suis permis de l'écrire à plusieurs occasions, il nous faut d'abord définir le pays avant de chosir un autre mode de scrutin, qui malgré ses défauts nous a permis de nous développer et même de remporter le référendum de «1995» qu'on nous a ensuite volé. Si notre gouvernement d'alors, au lieu d'abdiquer devant Chrétien et consorts, avait décidé de contester le résultat devant les nations Unies et le monde, nous ne rechercherions pas aujourd'hui un nouveau mode de scutin.Peut-être que Paul Cliche et les tenants du mode de scrutin à la proportionnelle,le groupe pour une nouvelle démocratie inclus,rechercheraient tout de même ce mode de scrutin étant surtout intéressés à entrer à l'Assemblée nationale pour y défendre leur philosophie. Quant à votre interlocuteur, il persiste à croire que la vraie méthode pour se donner un nouveau mode de scrutin doit passer par la consultation de l'ensemble des Québécoises et des Québécois sur le genre de pays dans lequel ils (elles) veulent vivre.Comme nos partis politiques sont plus intéressés par les opinions de leurs membres que par celles du peuple ils ne rechercheront jamais à connaître son opinion autrement que par la consultation de ces derniers qui ne peuvent représenter à eux seuls la volonté de nos concitoyens et de nos concitoyennes.C'est donc aux «sociétés nationales», et aux autres mouvements indépendantistes, que j'adresse, pour la «xème fois», ce projet de consultation, qui seul peut convaincre les Québécoises et les Québécois de se donner un pays indépendant de langue française en terre inhospitalière anglo-saxonne d'Amérique du nord. Comment un peuple ayant défini son pays pourrait-il ensuite dire «non à son indépendance»?