Un jurisconsulte dans l’eau bouillante

Le jupon « rouge Power » de Claude Bisson

Shame on Le Devoir

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Institutions et partisanerie ne font pas bon ménage

Le Devoir publie aujourd’hui un éditorial d’Antoine Robitaille d’une complaisance surprenante à l’endroit du jurisconsulte de l’Assemblée Nationale qui, en réponse à une question soulevée par le député et ministre Libéral Jean-Marc Fournier au sujet des affaires d’un autre député, en l’occurrence Pierre Karl Péladeau, devenu récemment chef du Parti Québécois et chef de l’Opposition officielle, a émis une opinion sur la possibilité pour celui-ci de donner instruction, au fiduciaire ou mandataire qu’il désignera en temps utile pour gérer son patrimoine de façon à éviter tout risque de conflit d’intérêts dans ses fonctions électives, de ne pas disposer de sa position de contrôle dans Québecor.

Il faut d’abord comprendre que le jurisconsulte est exactement ce que l’étymologie latine de son titre suggère, un conseiller juridique. Ni plus, ni moins. Même s’il a déjà été juge, les opinions du jurisconsulte, aussi chargées d’autorité et dignes de confiance puisse-t-on les trouver du fait de l’expérience judiciaire de leur auteur, demeurent des opinions, et n’ont aucun caractère décisionnel ou exécutoire. Une opinion, c’est toujours intéressant, mais toute personne le moindrement familière avec le droit et l’administration de la justice sait pertinemment qu’une opinion ne devient concluante que lorsqu’elle survit à la confrontation d’une opinion différente ou carrément contraire, ce qui n’est pas encore le cas en l’occurrence.

Quant à la confiance dont pourrait être digne le jurisconsulte, elle ne lui est pas acquise du simple fait de ses états de service. Comme le suggère une expression bien connue dans les milieux juridiques, « Pour être juge, on n’en est pas moins homme », c’est à dire une personne dont le jugement est susceptible d’être influencé par son environnement et les événements. Et c’est encore davantage le cas lorsqu’on n’est plus juge et qu’on n’a plus l’obligation d’impartialité qu’ont les juges.

Claude Bisson n’a pas toujours été juge, il l’est devenu à une époque où les nominations se faisaient essentiellement sur la base des liens politiques. À l’époque où il a été nommé, les Libéraux étaient au pouvoir, et il est donc certain qu’il émanait de la mouvance libérale. Et pendant qu’il était juge, il n’y a pas de raison de croire que Claude Bisson n'a pas continué à fréquenter ses amis Libéraux même si son statut l’obligeait à ne pas s’afficher ouvertement ou participer à des événements partisans. Il est même très vraisemblable de croire qu’il a continué à voter Libéral à Québec comme à Ottawa, car les juges conservent leur droit de vote en accédant à la magistrature.

Et depuis qu’il n’est plus juge, Claude Bisson n’est plus astreint à la moindre obligation ou réserve quant à ses activités ou ses fréquentations politiques. Tout jurisconsulte soit-il auprès de l’Assemble Nationale, il n'en n'est pas moins associé à un cabinet d’avocats, McCarthy Tétrault, notoirement connu pour sa partisannerie libérale qui remonte à ses origines. Si l’expression populaire « rouge teindu » à un sens, elle va comme un gant au cabinet McCarthy Tétrault... et aux avocats qui en font partie !

La simple consultation du site ne nous permet-elle pas de reconnaître les noms de Marc-André Blanchard, un ancien président du PLQ et gendre de Claude Ryan, l’ancien premier ministre Jean Charest, Marc Dorion, l’homme qui faisait des excursions de pêche avec Philippe Couillard et Arthur Porter, l’ancien premier ministre Daniel Johnson fils, pour ne s'en tenir qu'aux plus connus...

Claude Bisson a aussi une famille. Pierre Karl Péladeau a déjà eu l’occasion de soulever la question de son impartialité en raison du congédiement de son fils, journaliste au Journal de Montréal lors des compressions de personnel qu’il avait dû effectuer il y a quelques années alors qu’il était PDG de Québecor.

Mais Claude Bisson a aussi un frère, André, administrateur d’entreprises, qui a siégé au conseil d’administration de Donohue, une filiale papetière de Québecor, pendant quelques années du temps de Pierre Péladeau, le père de PKP, et aussi de Power Corporation et de la Corporation financière Power pendant 14 ans, de 1986 à 2000.

Le tempérament bouillant de Pierre Péladeau et les critiques de son fils PKP à l’endroit de l’Empire Desmarais ont sûrement fait l’objet de discussions et de commentaires entre les deux frères Bisson, et tous ces facteurs, combinés à l’étroitesse des liens entre le PLQ, l’Empire Desmarais et les deux frères Bisson, sont largement suffisants pour soulever un doute sérieux sur l’impartialité du jurisconsulte de l’Assemblée Nationale.

Eût-il conservé un peu de la réserve à laquelle l’astreignaient ses anciennes fonctions de juge qu’il se serait bien gardé de s’embarquer dans cette affaire. Rien ne l’y obligeait, et surtout pas la question de Jean-Marc Fournier qui portait sur la situation d’un autre député, de l’Opposition officielle par surcroît, dans un but manifestement partisan, et avec l’intention d’impliquer le jurisconsulte dans une controverse incompatible avec la neutralité de ses fonctions. Pour le jugement, on repassera...

Quant à l’analyse sommaire de l’éditorialiste du Devoir, elle illustre on ne peut mieux le déclin de ce quotidien qui fut autrefois une très respectable institution.


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11 commentaires

  • Archives de Vigile Répondre

    10 juin 2015

    Voici un article fort intéressant.
    La rencontre entre M. Charest et M. Bellemare dure une heure trente. Le ministre de la Justice dit avoir exposé son agacement par rapport aux pressions «non équivoques» et à «l'arrogance» des collecteurs. «M. Charest m'a dit : "Franco, c'est un ami personnel, assure M. Bellemare. C'est un collecteur influent. On a besoin de ces gars-là. Il faut les écouter. C'est un pro du financement. S'il te dit de nommer Bisson et Simard, nomme-les."»
    http://www.lapresse.ca/le-soleil/dossiers/laffaire-bellemare/201008/24/01-4309292-marc-bellemare-aurait-nomme-trois-juges-sous-pression.php

  • Archives de Vigile Répondre

    9 juin 2015

    L’hypocrisie des libéraux et de tous les fédéralistes est criante dans cette affaire. L'empire Desmarais investit, directement et indirectement, massivement, illégalement, et sans aucun scrupule dans le fédéralisme et dans le parti libéral depuis plus de 40 ans.
    Les libéraux ont droit à du clé en main (incluant le financement) depuis belle lurette, et ils gagnent les élections au Québec directement à cause de ça.
    Ne serait-ce que le vote par anticipation qui permet à la machine illégale libérale de faire voter massivement le chiens, les chats, les morts, les non résidents, les confus ... pour gagner plusieurs comptés. Jean Charest avait même été proclamé officiellement perdant dans Sherbrooke par Radio Canada, jusqu'à ce que le vote par anticipation arrive !!!!
    Et, que dire de la division du vote par QS et autres qui font gagner encore une fois les libéraux. QS, et tous ces petits partis financés sournoisement, mais comment efficacement par l'Empire.
    Et, c'est Péladeau et Québécor les méchants .... les illégaux ...
    Sacré politique va ...
    JL

  • @ Richard Le Hir Répondre

    8 juin 2015

    Réponse @ Gaston Carmichael
    Les dispositions québécoises sur les conflits d'intérêt des membres du gouvernement (qui ne visent pas l'Opposition officielle) prévoient la possibilité pour la personne susceptible de se retrouver en conflit d'intérêts de recourir à un fiduciaire OU un mandataire pour lui confier la gestion de ses biens pendant qu'il occupe une charge publique visée par ces dispositions.
    Le jurisconsulte s'est exprimé sur les contraintes de la fiducie, mais il s'est bien gardé d'évoquer le cas du mandat qui permettrait à PKP d'introduire la restriction qu'il souhaite sur la possibilité pour son mandataire de disposer de sa position de contrôle dans Québecor.
    Le jurisconsulte a agi de façon totalement partisane, en violation du devoir d'impartialité associé à sa charge.

  • Archives de Vigile Répondre

    8 juin 2015

    Bon travail! Le jupon rouge dépasse un peu plus...

  • Archives de Vigile Répondre

    8 juin 2015

    Nicole Hébert a fait un excellent commentaire sur Independantes.quebec
    Il est totalement absurde qu'en mettant ses actifs dans une fiducie sans droit de regard, un détenteur de fortune ne puisse pas donner certaines directives bien précises au fiduciaire.
    Par exemple, il est totalement justifié de ne pas vouloir investir dans l'industrie pétrolière. Ou dans des minières qui exploitent plus les populations que le minerai. Ou dans les fonds vert (si on est un pétroleux). Ce sont des choix idéologiques que le fiduciaire devra respecter.
    Si PKP donne la directive de ne pas vendre ses actions de Québécor, il devra en assumer les conséquences. Par exemple, si le fiduciaire prévoit que la valeur des actions va s'effondrer dans les mois à venir, il ne pourra prendre aucune mesure de protection de ces actifs. Même si PKP a la même vision des choses, il ne pourrait pas alors renverser sa directive initiale. Cela peut être très dangereux.
    PKP serait mieux avisé de faire comme tout bon libéral ferait: Se trouver un fiduciaire accommodant avec qui on peut aller prendre un café au Tim Horton de temps en temps.
    Ou faire comme Paul Martin et donner ses actions à Julie.
    Cette histoire de fiducie sans droit de regard n'est qu'une fumisterie destinée à endormir la population en lui donnant l'illusion que tout le monde est pur et incorruptible.

  • Archives de Vigile Répondre

    7 juin 2015

    Monsieur Le Hir
    Merci de vos précisions supplémentaires sur ce personnage en total conflit d'intéret avec le poste qu'il occupe et qui demande pourtant la plus grande neutralité politique et la plus grande discrétion
    Ses états de services avec tout ce qui a trait a la mouvance fédéraliste et les libéraux font peur et démontre bien qu'il est la marionette et le rapporteur officiel des libéraux de Fournier et de ses magouilles et que ses décisions sont empreintes de partisanneries politiques

  • Archives de Vigile Répondre

    7 juin 2015

    Il n’est pas mauvais que les députés du PQ rappellent à la population que l’appareil d’état est totalement paqueté d’opportunistes libéraux et cela n’est pas anodin, car "la machine" à un pouvoir certains, voire énorme. À cet égard je vous suggère de lire sur le blogue de Daniel Breton, une anecdote très révélatrice sur la "machine" et l’expérience qu’elle lui a fait vivre.
    http://www.journaldequebec.com/2014/12/10/la-machine-nen-veut-pas
    N’est-ce pas Franco Fava lui-même qui avouait candidement au juge Bastarache que "ça refoulait aux portes" en parlant des militants libéraux qui cherchaient à obtenir un job après la victoire libérale de 2003? Sans parler de corruption on peut à tout le moins accueillir les avis des hauts fonctionnaires libéraux avec méfiance. Cette méfiance est légitime quoiqu’en dise le pitbull édenté de St-Laurent.
    Je sais que tout le monde donne des conseils à M. Péladeau, mais dans cette affaire, je ne peux m’empêcher de lui suggérer de s’appuyer sur la population, sur l’opinion publique.
    Les répondants au dernier sondage Léger souhaiteraient surtout qu’il « confie le mandat de gérer ses actions à une fiducie » (43 %). Une tranche de 30 % préférerait qu’il vende ses actions, alors que 19 % opteraient pour le statu quo.
    Mais de manière générale, la population (52 %) se dit "plutôt indifférente" à l’enjeu.
    Dans le dernier Crop, une majorité de Québécois (61%) juge qu’il serait acceptable que M. Péladeau place ses actions dans une fiducie sans droit de regard.
    Il y a la joute politique et la joute populaire. Les libéraux et leur club-école, la CAQ, tentent d’amener PKP sur la glace politique avec la commission parlementaire et le jurisconsulte. Ils y ont un avantage de taille lors de ses travaux, car nos adversaires bénéficient de l’immunité parlementaire. Ils peuvent avancer n’importe quoi sans risquer d’être poursuivis pour libelle diffamatoire. Ce n’est pas négligeable.
    À mon avis, les stratèges libéraux savent pertinemment que la population se contenterait que PKP place ses avoirs dans une fiducie. C'est pour cela que le PQ doit ramener la joute sur la glace populaire.
    La question de l’instruction de ne pas vendre est très secondaire. Pour le citoyen moyen, le fait de donner une seule fois, en début de mandat une instruction au fiduciaire de ne pas vendre, ne constitue pas une ingérence inacceptable. Sans compter que bon nombre de Québécois ne veulent pas que Québécor tombe sous la main d’intérêts étrangers. Ce n’est sûrement pas moins acceptable que quand Paul Martin a cédé ses actions à ses fils pendant qu’il était premier ministre canadien. On se doute bien qu’au repas dominical, le père discutait des affaires de CSL avec ses rejetons et passait ses instructions en douce. Légalement, tout était conforme.
    Mais quelle hypocrisie ces fédéralistes arrogants! Comme dirait Michel Audiard: " les cons ça ose tout, c’est même à ça qu’on les reconnaît!"
    Autrement dit, les libéros-caqueteux peuvent piailler à l’infini, la population à déjà tranché. M. Péladeau placera ses avoirs en fiducie et l’actualité passera à autre chose. Nos adversaires là ramèneront de temps à autre, mais sans jamais pouvoir apporter de preuves. Hors de l’enceinte de l’Assemblée nationale, ils sont moins baveux, car ils ne bénéficieront pas de la protection de l’institution.

  • @ Richard Le Hir Répondre

    7 juin 2015

    Autre précision utile sur la carrière de Claude Bisson. Il appartient à lla garde prétorienne de l'État fédéral comme l'atteste son mandat pendant six ans, de 1996 à 2002, de Commissaire du Centre de la sécurité des télécommunications (CST), ce qui le rapproche singulièrement de Philippe Couillard et d'Arthur Porter qui ont exercé des fonctions similaires au Comité de surveillance des activités de renseignement de sécurité (CSARS).
    En effet, on trouve les informations suivantes sur le site du Bureau du Commissaire de la CST :
    Son mandat est d'examiner les activités du CST, organisme cryptologique national du Canada, en vue de déterminer si elles sont conformes à la loi du Canada. Le 8 juin 1999, le mandat de M. Bisson a été renouvelé pour une autre période de trois ans.
    Et l'on mesure ainsi mieux le rôle du cabinet McCarthy Tétrault auquel est attaché Claude Bisson dont l'associé Marc Dorion organisait entre autre les excursions de pêche de Philippe Couillard et de son ami Arthur Porter, tous deux membres du CSARS.
    L'appartenance de Claude Bisson à l'establishment de la sécurité de l'État canadien illustre on ne peut mieux les liens de celui-ci avec le PLQ de Philippe Couillard, et expliquent son intervention dans l'affaire PKP, perçu comme une menace au régime fédéral encore plus grande que Jacques Parizeau.
    À travers cet incident, on découvre aussi à quel point l'élimination de toute ambition à la souveraineté de l'État québécois constitue une priorité vitale pour l'État canadien, et combien le PLQ de Philippe Couillard et son gouvernement constituent pour celui-ci des alliés stratégiques de première importance, au point qu'il soit prêt à leur apporter son soutien de mille et une manières aussi discrètes que possible pour éviter toute réaction négative des Québécois.

  • Archives de Vigile Répondre

    5 juin 2015


    C'est pas supposer être strictement confidentiel quand un député consulte le juriconsulte pour avoir ses conseils et ses opinions au même titre que le secret professionnel entre un client qui
    demande conseil a son avocat ?
    Aussitôt qu'un député du parti Québécois le consulte ,il vire les talons pour aller mémérer et rapporter tout ce qui s'est dit a Jean Marc Fournier ou a La Presse de Gesca
    On se croirait dans un épisode des belles histoires des pays d'en haut avec un père Ovide libéral
    Ce matin encore ¸
    Publié le 05 juin 2015 à 07h23 | Mis à jour à 09h07
    Un député péquiste a sollicité les conseils du jurisconsulte en avril

    Un député du Parti québécois a sollicité l'avis du jurisconsulte Claude
    Bisson en avril, au moment où son parti lui reprochait de se trouver en
    conflit d'intérêts.En entrevue avec La Presse, Me Bisson a révélé qu'il a communiqué une opinion à un député péquiste quelques semaines après que sa formation politique l'eut accusé d'être en conflit d'intérêts.
    Pour qui roule ce père Ovide qui rapporte tout a J. M Fournier et a La Presse aussitôt qu'un député du Parti Québécois le consulte pour avoir une opinion ?
    De toute évidence il roule a fond de caisse pour Fournier et les libéraux

  • Archives de Vigile Répondre

    5 juin 2015

    Cher maître Le Hir,
    Comme vous fûtes inscrit au tableau de votre ordre professionnel, non pratiquant mais toujours croyant, puis-je vous demander une question simple.
    Éthiquement, si je vous demande si Madame Chose est une pute compte tenu de ses fréquentations, avez-vous le droit de me donner votre opinion professionnelle et la permission de la publier?
    Je souligne que par putes, je ne désigne pas l’ensemble des dames, messieurs, majeurs ou mineurs qui contribuent à l’essor touristiques de Montréal mais bien à ceux et celles qui contribuent au charme de Québec, de l’autre côté de la rue du Centre des Congrès.
    Veuillez, agréer, l’ensemble des platitudes que nos logiciels de traitement de texte ajoutent maintenant automatiquement à la moindre missive.
    Jean-Yves Durocher

  • Archives de Vigile Répondre

    5 juin 2015

    Bravo et merci pour ce texte.
    Et merci d'exister. Vous êtes nécessaire.
    C.B.