Après l'avoir entendu sur toutes les tribunes dénoncer le manque de leadership du maire Tremblay, il est assez savoureux de voir Benoît Labonté inviter tous les Montréalais à s'unir derrière M. Tremblay pour faire respecter le poids électoral de la métropole à l'Assemblée nationale. «Et je l'appuierai avec beaucoup d'enthousiasme sur cette question», a-t-il ajouté.
Dans cet appel à la guerre sainte pour délivrer Montréal du joug des régions, M. Labonté n'est pas allé jusqu'à appeler M. Tremblay «mon maire», mais sa main tendue rappelait un peu l'invitation que Jacques Parizeau avait lancée à Robert Bourassa au lendemain de l'échec de l'accord du lac Meech.
On ne fera pas à l'aspirant calife l'injure de penser que son intervention ait pu être motivée par des considérations partisanes, alors que «les intérêts supérieurs de Montréal sont en jeu», mais il ne se gênera certainement pas pour accabler le maire en cas d'échec.
Il est vrai que la froideur avec laquelle la refonte de la carte électorale proposée par le Directeur général des élections a été accueillie à Québec est de bien mauvais augure pour ceux qui espèrent la correction des distorsions qui se traduisent par une sous-représentation relative de la région montréalaise au Salon bleu.
Selon toute vraisemblance, le projet d'éliminer trois circonscriptions en région (Gaspésie, Bas-du-Fleuve, Beauce) au profit de la grande région de Montréal (Montérégie, Laval, Lanaudière) sera officiellement enterré à l'issue de la tournée de consultations qui devait avoir lieu d'ici la mi-juin, mais que le DGE a décidé de suspendre en attendant, dit-il, que les politiciens annoncent leurs couleurs.
D'ailleurs, bien peu de Montréalais se plaignent ou même savent que leur vote pèse moins lourd que celui d'un Gaspésien, tandis que la perspective de perdre une circonscription provoque toujours de très vives réactions en région. Pourquoi les partis représentés à l'Assemblée nationale se créeraient-ils des problèmes en cherchant à corriger une situation dont tout la population s'accommode plutôt bien?
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Les députés se retrouvent dans une situation de conflit d'intérêts évidente quand ils discutent de la carte électorale. Puisqu'elle a permis leur élection, c'est nécessairement qu'elle a de grands mérites.
Cela vaut aussi pour le mode de scrutin. De tous les obstacles qui s'opposent à l'introduction d'un élément de proportionnelle dans le système, les réticences des députés est sans doute le plus difficile à vaincre, même si leur parti y est officiellement favorable.
Remarquez, la représentation électorale ne peut pas obéir aux seules lois de la mathématique. Quand le gouvernement Harper a présenté le projet de loi C-56, qui accordera plus de sièges à la Chambre des communes à l'Ontario, à l'Alberta et à la Colombie-Britannique, alors que le nombre de députés en provenance du Québec demeurera inchangé, l'Assemblée nationale a été unanime à protester, même s'il s'agissait simplement d'accorder la carte électorale canadienne à la nouvelle réalité démographique du pays.
Personne au Québec n'a contredit le Bloc québécois, quand il a accusé Ottawa de chercher à «marginaliser la nation québécoise». Peu importe que le vote des électeurs de l'ouest du pays se trouve dévalorisé par rapport à celui des Québécois, il semblait évident dans l'esprit de tous que la reconnaissance de la «nation québécoise» exigeait une représentation garantie de 25 % des sièges aux Communes, quelle que soit sa proportion de la population canadienne.
Si le principe de la «représentation selon la population» peut souffrir une exception quand il s'agit de maintenir le poids politique du Québec au sein des institutions fédérales et de respecter sa spécificité, pourquoi certaines régions du Québec ne pourraient-elles pas bénéficier d'un traitement particulier en raison de leur étendue et de la faible densité de leur population? Même avec un mode de scrutin proportionnel, il faudrait en tenir compte.
La Coalition pour un Québec des régions propose la création de l'équivalent d'un sénat, qui comprendrait un nombre égal de représentants élus au suffrage universel dans chacune des 17 régions administratives, mais l'aménagement de cette nouvelle institution dans le cadre d'une province canadienne n'irait pas de soi.
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Faut-il attribuer à la sous-représentation de Montréal à l'Assemblée nationale le fait que seulement 19,4 % des dépenses d'immobilisation du gouvernement y aient été effectuées entre 1996 et 2002, alors que 24,8 % de la population québécoise habitait la métropole? Se pourrait-il que certaines régions aient plus besoin d'aide que d'autres?
En avril 1995, une vision strictement économique des choses avait amené l'ancien président de la Banque nationale, André Bérard, à déclarer qu'il faudrait fermer les régions qui n'arrivaient pas à se prendre en main. Une déclaration qu'il avait amèrement regrettée.
S'il y a une raison à la relative impuissance politique de la métropole, cela n'a sans doute rien à voir avec le nombre de députés qu'elle envoie à Québec. C'est plutôt que les jeux sont toujours faits d'avance.
D'une élection à l'autre, la répartition des sièges montréalais entre les partis demeure presque immuable. Même si l'ADQ présente deux candidats de calibre aux élections partielles du 12 mai prochain dans Pointe-aux-Trembles et Bourget, ses chances de briser le monopole que le PLQ et le PQ exercent sur l'île depuis près de quarante ans semblent bien faibles.
Si la ville de Québec a bénéficié d'une proportion des dépenses d'immobilisation sans commune mesure avec sa population entre 1996 et 2002, c'est principalement en raison de son statut de capitale, mais elle a aussi le grand avantage qu'aucun parti ne peut la tenir pour acquise.
D'ailleurs, cela est également vrai au niveau fédéral. Si le gouvernement Harper a prêté une oreille aussi attentive aux demandes de reconstruction du Manège militaire, ce n'est peut-être pas uniquement dû à son souci pour le patrimoine architectural.
mdavid@ledevoir.com
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