Le double échec de M. Boisclair

Québec 2007 - Parti Québécois



Le chef du Parti québécois, André Boisclair, a mené une bonne campagne. Il a stoppé l'érosion qui semblait le menacer au début du mois, il a fait preuve d'habileté et de fermeté lors du débat des chefs, il a maintenu le débat électoral à un niveau élevé et, ne l'oublions pas, à trois jours du scrutin, il peut toujours l'emporter.
Malgré tout, on peut dire que la campagne d'André Boisclair est un échec, indépendamment des résultats qu'il obtiendra lundi, parce que celui-ci n'a pas atteint les deux principaux objectifs qu'il s'était lui-même fixés.
L'accession de M. Boisclair à la direction du Parti québécois incarnait deux grands espoirs. Évidemment, dans ce parti dont c'est la raison d'être, son arrivée devait redonner un élan au projet souverainiste. Mais aussi, ce jeune chef, issu d'une autre génération, entendait moderniser son parti, proposer de nouvelles idées qui permettraient de recentrer le Parti québécois et l'amener là où sont la grande majorité des Québécois. Ces deux objectifs, André Boisclair ne les a pas atteints.
Le double échec s'explique en partie sans doute par la crise de leadership qui a secoué le PQ avant le déclenchement des élections. André Boisclair, pour obtenir les appuis dont il avait besoin, a dû se soumettre à l'orthodoxie du parti.
C'est ce qui a probablement amené ce jeune leader, modéré, qui n'est pas pressé par le temps comme ses prédécesseurs bien plus âgés, à promettre dans sa plate-forme électorale une démarche radicale, avec la tenue d'un référendum le plus tôt possible et la mise en branle de la mécanique référendaire dès l'arrivée au pouvoir.
Ce virage a déclenché un cercle vicieux. Car la démarche référendaire plus radicale a constitué un repoussoir pour les nationalistes moins convaincus, qui ne voulaient pas entendre parler ce cet enjeu, et que l'ADQ a accueilli à bras ouverts. Et le PQ, incapable d'élargir ses appuis, est revenu à une stratégie qui visait le retour au bercail de la famille souverainiste. On a donc pu observer le glissement vers un discours plus traditionnel adapté à cette clientèle traditionnelle.
Le résultat est là. Le référendum, M. Boisclair doit mettre une croix dessus. Et c'est certainement, pour un leader souverainiste, un échec important. Jonglons comme on veut avec les scénarios politiques: dans tous les cas de figure, il ne peut pas y avoir de référendum. Ce sera évidemment le cas si le PQ reste dans l'opposition. S'il forme un gouvernement minoritaire, il fera face à deux partis qui bloqueront sa stratégie référendaire. Et s'il est majoritaire, son appui populaire sera trop faible pour donner une quelconque légitimité à une initiative à laquelle plus des deux tiers des Québécois s'opposent.
Le second échec de M. Boisclair est lié au premier. Incapable de se déplacer vers le centre, le Parti québécois de M. Boisclair a essayé d'aller chercher des appuis à sa gauche, en ouvrant ses bras à ses vieux alliés, féministes, altermondialistes, progressistes, davantage attirés par Québec solidaire. Ce virage à gauche comporte un coût élevé. Il peinture le PQ dans un coin où il n'y a pas beaucoup d'espace. Il nous rappelle qu'André Boisclair ne contrôle pas suffisamment son parti.
Mais surtout, il compromet le virage idéologique que M. Boisclair avait amorcé dans son parti. Et c'est très dommage, parce que le chef péquiste a de bonnes idées, qu'il a su maintenir un bel équilibre entre le conservatisme économique et le progressisme social, et que, des trois chefs, c'est lui qui propose la vision économique la plus intéressante sur de grands enjeux stratégiques comme la place de la métropole ou l'importance de l'éducation, dont il fait sa priorité.
Ce programme prometteur a été édulcoré au fil de la campagne: le virage à gauche, l'appui de la FTQ, qualifié de moment marquant de la campagne, certaines promesses, comme le maintien du gel des droits de scolarité, qui valorise le statu quo, une façon d'accuser Jean Charest d'exporter des jobs dans le dossier de l'électricité, qui s'inspire d'une doctrine d'un autre âge. Tout cela compromet le recentrage du PQ, et la capacité d'André Boisclair de défendre, soit au pouvoir, soit dans l'opposition, des idées qui feraient avancer le Québec.
Bien sûr, si le scénario référendaire est compromis, et si le PQ ne prend pas le pouvoir, le risque est grand que ce parti, impitoyable avec ses chefs, pour éviter de réfléchir à l'impasse dans laquelle se trouve son option, soit tenté d'en attribuer l'échec à André Boisclair, qui deviendra une commode victime expiatoire. Et de se priver d'un chef qui voulait ramener le PQ sur la voie de la modernité.


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