Hélène Buzzetti Ottawa — Un premier clivage est apparu hier entre les troupes néodémocrates et leur chef Jack Layton sur une question toute québécoise. Si un autre référendum sur la séparation du Québec devait avoir lieu, quel niveau d'appui le Oui devrait-il obtenir pour être reconnu par le NPD? 50 % + 1 des voix, disent certains députés. On verra, dit plutôt M. Layton.
Le nouveau caucus élargi du NPD se réunissait hier pour la première fois en chair et en os depuis l'élection du 2 mai. Les 103 députés ont convergé vers Ottawa pour une réunion «stratégique» de deux jours. M. Layton s'est d'abord adressé à ses troupes en leur faisant dos et en lisant son discours sur trois énormes télésouffleurs. Qu'importe. La foule était gonflée à bloc et applaudissait à tout rompre toutes les deux ou trois phrases.
«Au Québec, le message est sans équivoque, a déclaré le chef. Les Québécois ont voté pour le changement. Ils nous ont dit qu'ils en avaient assez des vieux débats et de la vieille façon de faire de la politique. [...] Les Québécois ont fait confiance au NPD pour les représenter au Parlement. C'est une très grande responsabilité et tous les députés du NPD l'ont à coeur. Je n'ai aucun doute qu'avec notre extraordinaire caucus du Québec avec un mélange de sagesse, d'expérience et de jeunesse, nous allons être à la hauteur et allons fièrement représenter les Québécois. Aux Québécois, le message est clair: vous pouvez compter sur moi pour défendre vos intérêts.»
Immédiatement après le discours, certains députés se sont fait interroger par les journalistes à propos d'un éventuel référendum au Québec. À partir de quel pourcentage d'appui à la souveraineté accepteraient-ils un résultat? «Le NPD a reconnu depuis des années le droit à l'autodétermination du Québec et pour moi, c'est clair que c'est 50 % +1 la règle qui doit être respectée. Mais c'est hypothétique comme question, car si Mme [Pauline] Marois est élue, c'est loin d'être certain qu'il y aura un référendum sur la souveraineté», a expliqué Alexandre Boulerice, le député de Rosemont-La Petite-Patrie.
Selon Guy Caron (Rimouski-Neigette), la déclaration adoptée par le NPD à Sherbrooke en 2005 entérinant la règle du 50 % +1 n'est pas compatible avec la Loi de clarification, dite la loi sur la clarté référendaire, de Stéphane Dion adoptée par le gouvernement libéral en 2000.
«Pour nous, c'est deux choses différentes. Ce qu'on a comme position pour le parti, c'est la déclaration de Sherbrooke et c'est ce qu'on va mettre de l'avant.»
De fait, les deux énoncés ne disent pas la même chose. La loi sur la clarté adoptée par le Parlement canadien, sans imposer de seuil précis, rejetait la majorité simple en stipulant que d'autres critères devaient être pris en compte, notamment le taux de participation au référendum. Pour être considérée comme claire, la question devrait porter sur le désir de cesser de faire partie du Canada et ne faire aucune mention d'un partenariat avec le reste du Canada. La déclaration de Sherbrooke stipule pour sa part que le Québec a le droit de rédiger la question de son choix. Le seuil de 50 % + 1 est retenu.
À l'autre bout du spectre, il y a le député vétéran Peter Stoffer (Nouvelle-Écosse) qui dit comprendre que la loi sur la clarté s'applique encore. «Je respecte la loi sur la clarté.» Son collègue de Winnipeg, Pat Martin, croit que la règle du 50 % +1 doit s'appliquer, mais qu'elle n'est pas incompatible avec la loi sur la clarté.
Confusion? Le chef Jack Layton n'a pas clarifié les choses pour autant par la suite. Invité à neuf reprises par les journalistes à dire s'il accepterait de laisser le Québec quitter le Canada après un vote positif à 50 % +1, il s'est enfermé dans la même réponse évasive:
«La décision de la Cour suprême avait été acceptée par les deux [clans]. Je pense que cette décision est la base pour déterminer un résultat. Non, il n'y a pas de chiffre, mais c'était précisé d'une façon qui établissait un bon cadre pour régler cette affaire.»
La décision de la Cour suprême à laquelle il fait référence est plutôt un avis sur renvoi qui avait été formulé en 1998. Cet avis, auquel la loi sur la clarté se voulait une réponse, existait déjà quand la «déclaration de Sherbrooke» a été avalisée par le NPD. Pourtant, M. Layton est allé jusqu'à dire en anglais hier que «la décision de la Cour suprême établit un processus si excellent qu'il a été accepté par les deux clans, alors pourquoi ne pas procéder sur cette base? Pour nous, c'est l'approche privilégiée». Alors, est-ce à dire que la «déclaration de Sherbrooke» ne tient plus? «Elle vaut encore», a-t-il répondu en français.
M. Layton s'est aussi fait demander s'il croyait que tous ses députés québécois croyaient en un Canada uni. «Ils font partie d'un parti qui y croit et ils se sont enrôlés pour être candidats et députés.» Certains élus ont dit qu'ils ne sauraient pas comment ils voteraient si un référendum sur la souveraineté survenait. Certains ont déjà appuyé la cause souverainiste.
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