La passe du «Je vous salue Marie»

À peine nommé ministre des Finances, le 26 février 2005, c’est exactement ce que soutenait Michel Audet à nos collègues du Devoir : «Les revendications du Québec, ce n’est pas une demande pour baisser les impôts. Ce qu’on cherche, c’est d’avoir plus de marge de manœuvre pour maintenir des services de qualité au Québec»

Québec 2007 - Parti libéral du Québec


En un tour de main, Jean Charest aura donné raison à Jean Chrétien. Lui qui avait toujours nié l’existence même du déséquilibre fiscal en disant que les gouvernements provinciaux avaient bien assez de ressources pour s’occuper de santé et d’éducation et qu’ils ne voulait cet argent que pour se rendre populaires en baissant les impôts.
En un tour de main, à la toute fin d’une campagne qui tourne mal, M. Charest a utilisé presque toute la marge de manœuvre que lui accorde le budget fédéral de la veille pour baisser les impôts de la classe moyenne –comme par hasard, précisément dans les tranches de revenu où se retrouve la clientèle qui est attirée par l’ADQ.
Même si on peut certainement dire que M. Charest a toujours promis des baisses d’impôts, il avait toujours séparé cette question du règlement du déséquilibre fiscal. Pour la bonne raison que la justification première et essentielle de cette revendication a toujours été le fait que les provinces n’avaient pas les ressources requises pour assurer convenablement les services dont elles avaient la responsabilité.
À peine nommé ministre des Finances, le 26 février 2005, c’est exactement ce que soutenait Michel Audet à nos collègues du Devoir : «Les revendications du Québec, ce n’est pas une demande pour baisser les impôts. Ce qu’on cherche, c’est d’avoir plus de marge de manœuvre pour maintenir des services de qualité au Québec».
Hier, M. Charest a tout balancé cela par la fenêtre. La presque totalité de sa toute nouvelle marge de manœuvre, soit 700 millions de dollars, se retrouvera en baisses d’impôts. Précisément cette promesse de 2003 qui est venue hanter M. Charest depuis le début de la campagne électorale.
On a même distribué aux journalistes une version amendée des pages du dernier budget provincial, montrant les baisses d’impôt qui entreraient en vigueur le 1er janvier 2008.
Depuis le début de la campagne électorale, M. Charest disait que la santé était sa première priorité. Or, il n’y avait pas beaucoup d’argent supplémentaire pour la santé dans le budget de M. Flaherty. La quasi totalité de la croissance des transferts fédéraux venait plutôt de la péréquation.
Il faudrait donc, en toute logique, que M. Charest nous dise que sa véritable priorité, ce sont maintenant les baisses d’impôt et pourquoi, à cinq jours du scrutin, il effectue un tel virage.
Mais, en fait, tout le monde connaît la réponse et elle se trouve, en partie, dans le sondage sur les intentions de vote dans la région de Québec que nous publions ce matin.
Dans le Québec métropolitain, les libéraux sont en voie de perdre la presque totalité de leurs sièges à l’Assemblée nationale – à la possible exception de leur forteresse de Jean-Talon.
Quand on sait que le PLQ de disposait, à la dissolution, que d’une majorité de neuf sièges à l’Assemblée nationale, on comprend qu’il est devenu quasi-impossible pour Jean Charest de se retrouver à la tête d’un gouvernement majoritaire, lundi soir prochain. Selon notre sondage, juste dans la région métropolitaine de Québec, les pertes libérales seraient suffisantes pour garantir une situation de gouvernement minoritaire.
Dans les temps désespérés, on essaie des mesures désespérées. La dernière chance de M. Charest de sauver un gouvernement majoritaire, c’était d’essayer un jeu à haut risque. Comme ces entraîneurs de football qui traînent de l’arrière en fin de match et qui jettent le plan de match par-dessus bord pour essayer «la passe du Je vous salue Marie».
On envoie tous les receveurs disponibles dans la zone des buts et le quart fait une longue passe, récite la prière en question et espère que ce sera l’un de ses joueurs qui attrapera le ballon.
Au football, ça marche des fois, mais pas souvent. En politique, c’est encore plus rare. Mais, clairement, Jean Charest pense qu’il en est rendu là.


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