La Loi 78 pourrait donner la victoire aux étudiants

Plus le gouvernement attend, plus il devra opter pour le moratoire.

Conflit étudiant - sortir de l'impasse


Comme tout ce qu’il a fait depuis trois mois, le gouvernement, avec sa dernière tentative pour mater le mouvement étudiant, a produit l’effet contraire. La loi 78 devait faire taire la rue : elle est plus galvanisée que jamais. « Cette loi a donné un nouveau souffle à la mobilisation », disent les représentants. C’est une évidence empirique.
Mais les effets les plus contreproductifs ne sont pas encore apparus. En suspendant les cours, le gouvernement a fait un énorme cadeau aux associations étudiantes : elles n’ont plus à se soucier des votes de reconduction. Le nombre d’étudiants en grève ne peut donc plus diminuer. La loi fait en sorte que la grève durera tout l’été.
Le gouvernement ne peut laisser perdurer les manifestations quotidiennes. Pas avec le Grand Prix qui s’en vient, activité capitaliste par excellence que même les modérés rêvent maintenant de pouvoir perturber. Car, insultés, les modérés se radicalisent.
Une nouvelle ronde de négociation devrait s’entamer en début de semaine. Le gouvernement devra substantiellement réduire la hausse. Car la nouvelle offre devra être acceptée par les associations locales. Ce sont elles qui ont le dernier mot. Or, les cours ne reprenant qu’en août, quels étudiants se présenteront en assemblée générale pour se prononcer sur la nouvelle offre ? Très peu de verts, quelques modérés, plusieurs vrais militants. Comment ceux-ci, mobilisés depuis des semaines, pourraient se contenter d’une simple réduction de la hausse ?
Autre contre-effet de la loi 78 : elle a donné les pleins pouvoirs aux plus militants!
Dans ce contexte, il est assez marrant de voir André Pratte et François Cardinal déclarer sentencieusement comme « ultime compromis » une réduction de 50$ par année du 1779 $ sur 7 ans.
Ces journalistes, comme le gouvernement, sont en décalage profond avec la réalité. Depuis la loi 78, on n’a plus affaire à un mouvement étudiant, mais bien à un mouvement social.
Une réduction de 50$ aurait eu des chances d’être acceptées à la 6e ou 7e semaine du conflit. De même, les différentes offres grotesques (la bonification des prêts et bourses, le remboursement proportionnel au revenu, l’étalement de la hausse sur 7 ans plutôt que 5, etc.) auraient peut-être pu mettre un terme à la grève si elles étaient apparues vers la 5e semaine.
Mais il en a fallu 8 pour que le gouvernement daigne contacter les représentants! Et on croit maintenant qu’une réduction de 50$ par année mettra un terme aux manifestations ? C’est aussi illusoire que d’avoir cru que les étudiants allaient accepter la supposée entente de principe, véritable trappe à rats du gouvernement qui prenait encore une fois les étudiants pour des idiots.
On ne fait tout de même pas la plus importante grève étudiante de l’histoire du Québec pour obtenir un vulgaire étalement de la hausse décriée ou une bonification du régime de prêts et bourses sans nouvel investissement (la bonification résulte de l’abolition d’un crédit d’impôt sur les frais de scolarité), encore moins pour sombrer dans les méandres bureaucratiques d’un comité provisoire sans pouvoir.
« Rien à négocier », tel était le titre d’un triste éditorial d’André Pratte paru le 13 mars. Il soutenait qu’encore deux ou trois semaines, et les étudiants allaient penser à la fin de la session et à leur emploi d’été. Ils retourneraient en classe. Deux mois et une loi spéciale plus tard, le mouvement est plus galvanisé que jamais et la population ressent toujours plus de dégoût envers ce gouvernement méprisant et arrogant.
Après 14 semaines de grève, même une augmentation de 100$ par année pendant 5 ans, comme de 2007 à 2012, risque de ne pas être acceptée en assemblée générale.
Plus le gouvernement attend, plus il devra opter pour le moratoire.
Pourquoi ne pas suspendre la hausse jusqu’aux élections? C’est peut être le seul moyen pour le gouvernement de sauver la face.
« Rien à négocier »… Aujourd’hui les manifestants peuvent le scander, en prouvant : « dans deux semaines, c’est le Grand Prix. »


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10 commentaires

  • Archives de Vigile Répondre

    28 mai 2012


    Parizeau l'as dit, pas un seul drapeau canadien dans ces manifestations.
    La seule chose que les etudiants ont a faire est de tenir jusqu'a la Saint-Jean.
    Ensuite, le jour meme de la Saint-Jean, utiliser le momentum et declarer l'Independance de facto avec une declaration faite depuis le parlement par le peuple.
    Il n'y pas d'autres jours ou nous pourrons avoir 1 million de gens dans la rue. C'est des lors ou jamais.

  • Dominique Beaulieu Répondre

    26 mai 2012

    "Une réduction de 50$ aurait eu des chances d’être acceptées à la 6e ou 7e semaine du conflit. De même, les différentes offres grotesques (la bonification des prêts et bourses, le remboursement proportionnel au revenu, l’étalement de la hausse sur 7 ans plutôt que 5, etc.) auraient peut-être pu mettre un terme à la grève si elles étaient apparues vers la 5e semaine."
    FAUX! En tant que proposeur qui a envoyé les 11 700 étudiants de maîtrise et de doctorat de l'Université Laval en grève, en bas de 10 ans d'étalement, AUCUNE NÉGOCIATION POSSIBLE. Et je suis un des moins radicaux.

  • Archives de Vigile Répondre

    26 mai 2012

    Article bien intéressant. Merci beaucoup :)
    S’il m’advenait de fumer des substances illicites et hallucinatoires, je révérais tout haut de l’utilisation immense et unique de la situation des étudiants pour demandé le levier qui permettrait de faire que tout soit possible…
    On ne cesse de leur parler que leur rêve de gratuité est impossible parce que l’argent manque, on ne cesse de nous dire que la social-démocratie est impossible dans un monde de marché. On ne cesse de nous dire que l’indépendance est impossible parce que le Québec est trop faible économiquement. Comme on le dit, le nerf de la guerre est l’argent.
    Allons chercher l’argent où elle se trouve. Redevenons maîtres chez nous…
    Que les étudiants demandent un moratoire et un état généraux sur l’exploitation des ressources naturelles au Québec (ce qui inclus le plan nord, le gaz de schiste, les forets, le pétrole d’Anticosti, Hydro-Quebec, les éoliennes..) et promettre de financer leur éducation gratuite sur les économies… Ils demandent cette fois-ci une place sérieuse à la table et demandent que tous les contrats et les accords soient examinés
    Je ne connais pas grand monde (à part les médias) qui peut être contre cette situation en sortie d’un gouvernement clairement corrompue. Du coup les étudiants deviennent les héros d’une nouvelle révolution québécoise.
    Aujourd’hui 25 Mai 2012, la situation est catastrophique pour le gouvernement qui n’auras pas d’autre choix que de se plier aux demandent des étudiants. Il est coincé ce malgré l’utilisation de tous les médias et toutes les tribunes pour discrédité le soulèvement étudiant. Ils ne reculent devant rien, aucune violence n’est exagérée, mais les étudiants continus, ils ne reculent devant aucune bassesse, même des faux sondages, pour faire fléchir l’opinion publique, sans succès.
    La situation est mûre et n’arrive qu’une fois par génération. Profitez-en, donner un grand coup et sacrer ces renards en dehors du poulailler…. Après ça on s’occupera des concentrations médiatiques…

  • Archives de Vigile Répondre

    26 mai 2012

    L'augmentation des frais de scolarité à l'université n'est que la goutte d'eau qui a fait déborder le vase. Il y a un ras-le-bol généralisé sur les augmentations qu'on impose aux citoyens sans qu'ils puissent lever le petit doigt: taxes, rqap, rrq, AE, assurances, frais bancaires, médicaments, permis de conduire, Hydro, taxe santé.
    Tout en étant les plus imposés et taxés en Amérique du Nord, les services publiques et les infrastructures laissent à désirer. Pendant ce temps, au gouvernement on se permet de garocher par la fenetre l'argent des contribuables dans toutes sortes de dépenses suspectes: primes de rendement, primes de départ et des salaires de fonctionnaires qui frisent l'indécence.
    Beaucoup de choses restent à revoir dans la fonction publique, nombre de fonctionnaires, salaires, avantages sociaux. L'adoption de la loi 78 est une atteinte grave aux libertés. Les députés doivent méditer sur le cri de colère des Québécois et Québécoises. J'ai honte de voir la police de Montréal à cheval repousser les jeunes dans la rue. Le Québec a de meilleurs images à offrir au monde, celle-là appartient à un passé révolu qui me rappelle la colonisation.

  • Jean Lespérance Répondre

    25 mai 2012

    Plus le fouvernement attend, plus il y aura d'étudiants en âge de voter. Et on sait qu'ils ne vont pas voter pour le PLQ.

  • Archives de Vigile Répondre

    25 mai 2012

    Non à l'État policier au Québec
    http://www.youtube.com/watch?v=ivDFsX9L6Yg

  • Archives de Vigile Répondre

    25 mai 2012

    Plus les citoyens sont prospères, plus ils ont tendance à désirer un gouvernement autoritaire. Encore et comme toujours, ce sont les classes défavorisées qui écopent de la situation. Ne s’agit-il pas d’un comportement visant la protection de privilèges ?
    "La prospérité ne se mesure pas d'après le bonheur de tous mais d'après le malheur des autres"
    Thomas More, Chancelier d'Angleterre

  • Archives de Vigile Répondre

    25 mai 2012

    "Les différentes offres grotesques (la bonification des prêts et bourses, le remboursement proportionnel au revenu, l’étalement de la hausse sur 7 ans plutôt que 5, etc.)"
    Vous pouvez les qualifier d'insuffisantes - on pourra se mettre d'accord là-dessus ou pas en analysant leurs impacts -, mais elles ne sont objectivement grotesques ni pour ceux qui en bénéficieront ni pour ceux qui en défraieront le coût. Ce qui me paraît "grotesque" (tout autant que l'attitude du PM qui brandissait cette épithète il y a quelques semaines), c'est le peu de cas que vous semblez ici faire de ces réalités matérielles, tant c'est le renversement du gouvernement seul qui semble vous faire saliver.
    Il y a là une part de confusion dont j'espère que les négociateurs étudiants sauront se déprendre en présence de la ministre. Qu'ils demandent comme depuis le début ce dont ils sont sûrs de ne pas l'obtenir afin de discréditer encore plus le gouvernement (ce qui n'est pas du tout en soi un vilain programme!) ou qu'ils cherchent le meilleur compromis dans l'intérêt à court terme de leurs commettants (ce qui me semble malgré tout plus conforme à leur vocation de représentation), mais qu'ils lèvent une fois pour toutes le soupçon de duplicité qui pèse sur eux de la part de leurs adversaires. Les sophismes ne sont pas des effets de discours réservés à ceux qui ont tort (ou sont nommés tels). J'aime à penser que ceux qui ont le courage et les moyens de leurs convictions peuvent s'en passer, quitte à être moins persuasifs.

  • Archives de Vigile Répondre

    25 mai 2012

    Pratte est un crétin et le lire une imbécillité. La Presse, un torchon avec lequel je ne me torcherais pas le c...
    Mais osera-t-on publier une vérité qui ne respecte pas la modération des ignares...
    La Révolution démontre bien que les étudiants ont raison. Le Grand Prix des reptiliens arrive. Il faudra ranger les barricades, nettoyer les manifestants au Karcher. Heureusement, Sarkozy est en vacances. Charest peut bien lui passer un petit coup de fil...

  • Jean Lespérance Répondre

    25 mai 2012

    Le fouvernement est mieux de se dépêcher car le festival juste pour les étudiants va remplacer le festival de Rozonzon. On ne pourra pas poivrer et gazer les touristes. Les étudiants vont bien s'amuser.