Le spectacle désolant que le Québec offre depuis plus de 100 jours à la face du monde dépasse l'entendement. Il ternit la réputation du Québec à l'étranger avec plus de 3000 reportages fracassants, dans 77 pays, sur les arrestations massives, les émeutes de Montréal et la violence, selon Influence communication.
Il fait paraître le Québec comme une dictature, une région où tout va mal, où les perspectives économiques et sociales pour les jeunes sont bouchées et exécrables, où les libertés fondamentales sont bafouées, alors que la réalité est aux antipodes. Cet épisode du «carré rouge» fera mal au Québec, et longtemps, peu importe l'issue des négociations.
Le symbole fort du «cacerolazo», la cacophonie par la casserole popularisée sous le régime chilien d'Augusto Pinochet et utilisé par les manifestants québécois, a de quoi donner le vertige quand on sait que sous ce régime, plus de 3000 personnes ont été assassinées par les forces gouvernementales, 38 000 torturées pour leur opposition au régime et des centaines de milliers, exilées. C'est une insulte à leur mémoire.
Le Québec, ce n'est pas la Syrie, le régime despotique de Bachar al-Assad. Ni aucun des pays qui, avec raison, pour combattre la dictature, le népotisme, le crime d'État, l'absence de liberté d'action et de parole, ont joint le mouvement du Printemps arabe. Là aussi ce n'est pas crédible - c'est même loufoque - lorsque certains osent faire un rapprochement entre le mouvement d'opposition à une hausse des droits de scolarité de 50 cents par jour et le Printemps arabe.
Nous sommes dans une société libre et démocratique et dans un État de droit. Il est consternant de voir au surplus des juristes se joindre aux manifestants et «bananarchos» de ce monde dans la rue, en toge, symbole fort de la magistrature. Bien sûr, ils étaient là pour contester des aspects de la loi d'exception qui bafouent, selon eux, la liberté d'association, la liberté de manifester. Mais où étaient ces juristes lorsqu'il y a à peine quelques semaines, c'était la casse dans les rues de Montréal, où on défiait injonction par-dessus injonction ordonnées par des juges qu'ils sont censés respecter et les lois qu'ils sont censés appliquer? Où étaient-ils lorsqu'on intimidait la majorité des étudiants qui désiraient retourner en classe, lorsqu'on brimait justement leur liberté? Nous sommes dans une société de droit, mais aussi de devoir et ils ont clairement failli au leur.
Sur le plan économique, le psychodrame québécois n'a rien de comparable avec ce que vivent les jeunes de moins de 25 ans dans une Grèce ou une Espagne en crise et en récession profonde, où plus de la moitié d'entre eux sont chômeurs depuis le début de la récession mondiale, en 2009, et où il y a peu de perspectives d'embellie. C'est encore une fois aux antipodes de la situation des jeunes au Québec.
Et, s'il vous plaît, cessons de faire des liens avec la Révolution tranquille où on modernisait le Québec, où on construisait le système d'éducation, où on se dotait d'institutions et d'outils formidables pour nous développer économiquement et socialement, pour nous démarquer comme nation. Rien à voir avec le tintamarre et la contestation à 50 cents tous azimuts, l'appel à la désobéissance civile par des politiciens-législateurs irresponsables, ou le soutien inconditionnel des autres, même dans les périodes de désordre et d'anarchie. Franchement!
J'écris aujourd'hui pour la majorité silencieuse qui finance 87% des droits de scolarité du régime québécois par ses taxes et impôts les plus élevés en Amérique. J'écris pour ceux qui ne peuvent se payer le luxe de frapper des casseroles toute la soirée dans les rues de Québec et Montréal. Pour ceux qui travaillent d'arrache-pied, du matin au soir, pour financer l'éducation, la sécurité du revenu, les congés parentaux, les garderies à 7$, le système de santé, l'assurance médicament, les soins aux personnes âgées, etc.. Et qui, jusqu'à présent, acceptaient de le faire avec conviction et fierté pour contribuer au développement du Québec.
De voir dans quel chaos on a précipité le Québec et d'imaginer les coûts astronomiques qu'aura occasionnés ce psychodrame à 50 cents et que nous paierons en surplus, la fierté et la conviction en auront pris, pour plusieurs, un solide coup.
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Yvan Loubier
L'auteur est économiste et conseiller principal au cabinet de relations publiques National.
Un psychodrame à 50 cents
Le spectacle désolant que le Québec offre depuis plus de 100 jours à la face du monde dépasse l'entendement. Il ternit la réputation du Québec à l'étranger avec plus de 3000 reportages fracassants, dans 77 pays, sur les arrestations massives, les émeutes de Montréal et la violence, selon Influence communication.
S'il fallait dénaturer toute cette énergie dépensée depuis plus de 100 jours - régler pour une baisse de 35$ des frais de scolarité -, il y aura des responsables à crucifier... Les bien-pensant verraient leur condescendance justifiée...
Yvan Loubier15 articles
L'auteur est économiste et conseiller principal au cabinet de relations publiques National, à Québec.
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