La Constitution remise à René Lévesque revit

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PQ - gouvernance nationale<br>Conseil national 14-15 et 16 mars


Daniel Turp (ci-dessus) estime que le gouvernement péquiste de l’époque aurait dû endosser le projet de Jacques-Yvan Morin et emprunter la voie d’une Constitution. (Le Soleil, Jocelyn Bernier)


Martin Pelchat - Demeuré secret depuis plus de 20 ans, après avoir été remis à René Lévesque à ses derniers jours au pouvoir, le premier véritable projet de Constitution québécoise à l’intérieur du cadre fédéral sort finalement de l’oubli.



Jacques-Yvan Morin, le président du comité qui avait accouché de ce document de 21 pages transmis à l’ex-PM en mai 1985, a accepté de lever le secret en le faisant remettre en décembre par Pauline Marois au député péquiste Daniel Turp. Ce dernier est l’auteur d’un nouveau projet de Constitution que la chef du PQ a endossé en l’intégrant, en octobre, à sa croisade sur l’identité québécoise.
Depuis que son comité avait élaboré un projet de Constitution de 100 articles demeuré sans suite, Jacques-Yvan Morin s’était contenté d’en remettre solennellement copie à chacun des chefs péquistes ayant succédé à M. Lévesque, conformément à l’engagement qu’il avait pris auprès de ce dernier. Aucun d’entre eux n’a voulu reprendre à son compte ce projet qui prévoyait notamment que la future Constitution devrait ultimement être approuvée par la population dans le cadre d’un référendum.
Comment expliquer qu’aucun des chefs précédents n’ait repris l’idée? «Je pense que c’est à cause du fait qu’il s’agit de la Constitution d’un Québec qui n’est pas souverain», lance Daniel Turp, qui avant décembre dernier n’avait jamais pu prendre connaissance du texte de 1985, et ce, même si Jacques-Yvan Morin et lui ont été voisins de bureaux à la faculté de droit de l’Université de Montréal.
M. Morin a jugé qu’il était temps de le rendre public après que Mme Marois eut fait sien le projet de M. Turp et constatant que l’idée d’une Constitution québécoise gagnait du terrain. L’actuel ministre des Affaires intergouvernementales canadiennes, Benoît Pelletier, l’a déjà qualifiée de «porteuse», tandis que l’ADQ l’a incorporée à sa plate-forme électorale.
C’est en décembre 1984, alors qu’il était engagé dans le controversé «beau risque» de pourparlers avec Ottawa en vue d’une réforme du fédéralisme, que René Lévesque a demandé à Jacques-Yvan Morin de rédiger un document sur l’opportunité de doter le Québec d’une Constitution dans la cadre fédéral. Ex-ministre des Affaires intergouvernementales, M. Morin avait démissionné quelques mois plus tôt. Pour accomplir ce mandat, il était entouré d’un «comité officieux» où René Lévesque avait délégué son conseiller constitutionnel Jean K. Samson et où le nouveau ministre des Affaires intergouvernementales, Pierre Marc Johnson, avait aussi un représentant, Guy Versailles.
Le 21 mai 1985, M. Morin a remis son «avant-projet» de Constitution. Certains passages de sa lettre à René Lévesque, dont Le Soleil a pris connaissance, ont des échos familiers aujourd’hui. «Dans notre esprit, un tel projet socio-économique et culturel peut non seulement être un instrument de progrès pour notre société, mais également un facteur d’identité», écrit M. Morin.
«Le Peuple québécois, désireux de se bien gouverner et d’exprimer son identité nationale, en vertu de son droit de disposer de lui-même, adopte solennellement la présente Constitution du Québec», annonce le préambule du projet. Comme les moutures récentes de projets semblables, le texte reprend ensuite les principes de la Charte des droits et traite notamment de la langue officielle, des droits des minorités, et décrit les institutions. Jacques-Yvan Morin attendait la réaction de René Lévesque. Elle ne viendra pas. Un mois plus tard, le 20 juin 1985, il démissionne comme président du PQ. Son successeur Pierre-Marc Johnson ne reprendra pas l’idée avant la victoire libérale de décembre.
Joint hier par Le Soleil, Jean K. Samson rappelle que son patron René Lévesque était au centre d’intenses pressions de deux camps. «C’était ça le débat. Est-ce qu’on se prépare une constitution interne québécoise dans le contexte fédéral ou si on prépare un projet de ce qu’elle serait si le Québec était souverain?»
Daniel Turp juge pour sa part que c’était une erreur du gouvernement péquiste de ne pas endosser à l’époque le projet Morin et emprunter la voie d’une Constitution. Une erreur qu’il invitera ce matin le ministre Benoît Pelletier à éviter alors qu’ils se croiseront au Congrès canadien des affaires constitutionnelles, à Québec. «L’idée de la Constitution québécoise a fait son chemin et fait l’objet d’un très large consensus, dit M. Turp. Ça ferait avancer le Québec.»
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