La chasse est ouverte!

2006 textes seuls



Encore une fois, les médias du Québec ont décidé de servir les intérêts du pouvoir fédéral à Ottawa et de nous créer de toutes pièces une petite déclaration-choc du célèbre dramaturge Michel Tremblay qui, a-t-on prétendu à tort, ne croirait plus en l'indépendance du Québec.

Or, nous apprenions le lendemain, après que Gilles Duceppe se soit entretenu avec le grand écrivain, que Michel Tremblay n'avait fait que souligner que l'économie a pris beaucoup trop de place dans le discours indépendantiste québécois, le rendant moins attrayant. Malgré cela, Michel Tremblay s'est dit toujours indépendantiste. Il ne fait donc que déplorer que le combat pour la langue et la culture ait été évacué du discours souverainiste ces dernières années. Et c'est pour cette critique du discours indépendantiste que tout ce qu'il y a de journalistes au Québec lui ont fait dire qu'il ne croyait plus dans le projet! Est-il un souverainiste plutôt tiède? Sans doute. Il l'a toujours été! Rien de nouveau sous le soleil de Key West! Pas de nouvelle là-dedans! Comme entreprise de désinformation, nous avons là un exemple aussi patent que pathétique.

L'affaire allait en rester là croyez-vous? Le chat étant sorti du sac dans le cas de Michel Tremblay après les rectifications de Gilles Duceppe, il fallait bien que nos journalistes fédéralistes trouvent un autre célèbre souverainiste pour dénaturer ses propos et le présenter tel un converti au Canada coast to coast! Après avoir tenté de faire dire n'importe quoi à Michel Tremblay, pourquoi ne pas tenter sa chance sur l'autre plus célèbre dramaturge du Québec : Robert Lepage.

Ainsi, les journalistes se sont précipités sur Lepage pour recueillir ses états d'âmes. Constat : Lepage trouve lui aussi le projet souverainiste trop axé sur l'économie et donc moins attrayant. Et il déplore l'absence d'un chef d'envergure (comme Lucien Bouchard, par exemple!) pour incarner l'option. Est-il devenu fédéraliste? Pas du tout! Pourtant l'agence Canadian Press s'empressera de titrer sa dépêche : « Après Michel Tremblay, Robert Lepage remet la souveraineté en question! ». C'est à vomir. Deux souverainistes critiquent la façon de présenter le projet indépendantiste et on tente de faire croire qu'ils sont devenus d'ardents fédéralistes. Quelle bassesse! Aucun danger que ces journalistes rédigent plutôt leurs articles à partir de cette déclaration de Lepage : « Quand je suis ici au Québec, même à Ottawa, je ne me sens pas Canadien, mais pas du tout. Je sens les deux solitudes. Je sens les deux pays ». Pas si mal pour un supposé néo-fédéraliste! Lepage est-il un souverainiste tiède lui aussi? Ni plus ni moins qu'avant : il l'a toujours été! Mais chez Gesca et Radio-Canada, on « fait » la nouvelle. Littéralement.

Après le scandale des commandites, les fédéralistes sont en si mauvaise posture qu'ils sont encore une fois prêts à tout pour mousser le statu quo. Regardez-les bien aller, la chasse aux séparatistes supposément repentis est lancée! Toute critique d'une personnalité québécoise à l'endroit du PQ, de son chef, du Bloc ou d'un aspect du projet indépendantiste sera interprétée par les chiens de garde du pouvoir comme un reniement de la cause nationale. Et ils en feront leurs choux gras, évidemment.

Avis à ceux que traquent les journalistes en mal de vedettes du fédéralisme : tournez-vous donc la langue sept fois dans la bouche avant de parler et, si vous n'avez rien de constructif à dire, taisez-vous donc. Y'en a marre de donner aux journalistes de Gesca et de CP matière à désinformer la population quant à notre projet national. Et si certaines personnalités décident réellement de tourner le dos à la souveraineté pour cause de fatigue constitutionnelle, nous répondrons comme Pierre Falardeau l'a fait à Yvon Deschamps il y a quelques années : si vous êtes fatigués de l'indépendance, allez donc vous coucher. Nous refusons de croire que le peuple québécois préfère la dépendance et nous refuserons de nous laisser décourager par les états d'âmes de tout un chacun.

Pierre-Luc Bégin
Dir. Éditions du Québécois


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