QUÉBEC

L’équilibre budgétaire n’est qu’un «mirage»

Un ex-haut fonctionnaire ne pose pas le même diagnostic que le gouvernement Couillard

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Ce gouvernement n’est qu’un mirage

L’atteinte de l’équilibre budgétaire en 2015-2016 n’est qu’un « mirage », affirme l’ancien haut fonctionnaire Denis Bédard, après avoir retourné dans tous les sens les finances publiques du Québec.

En réalité, le Québec accusera cette année un déficit de 4,8 milliards de dollars, conclut-il après avoir développé le concept de « solde financier intégré ». Celui-ci offre ainsi un « portrait plus complet » des finances publiques, car il tient compte de la variation annuelle de la dette brute pour les immobilisations nettes et pour les placements, prêts et avances, indique M. Bédard.

Ainsi, l’ancien mandarin de l’État met de côté le concept d’« équilibre budgétaire » tel que défini dans la Loi sur l’équilibre budgétaire (LEB), puisqu’« il ne permet pas de tenir compte de l’ensemble des engagements découlant des opérations budgétaires et financières » du gouvernement québécois.

« Sur le plan international, on considère qu’un gouvernement est en équilibre budgétaire quand il est en même temps en équilibre financier, c’est-à-dire lorsqu’il n’emprunte plus », explique-t-il en entretien au Devoir. Or, l’État québécois empruntera cette année un montant net de 4,8 milliards pour couvrir les dépenses prévues dans le Plan québécois des infrastructures (PQI) et les sommes nécessaires pour les placements, prêts et avances.

Le gouvernement libéral revendique avec fierté l’atteinte de l’équilibre budgétaire durant la première moitié de son mandat. « On a multiplié les efforts, pendant deux ans, pour rétablir l’équilibre budgétaire. […] C’est l’équilibre budgétaire qui nous donne les marges de manoeuvre pour investir 1,2 milliard de dollars en éducation, relancer les stratégies économiques qui sont saluées de partout », répétait le premier ministre Philippe Couillard en Chambre mardi.

Pourtant, le solde financier sera écrit à l’encre rouge au cours des trois prochaines années (-4,8 milliards en 2016-2017, -2,0 milliards en 2017-2018 et -1,7 milliard en 2018-2019) en dépit de la volonté du Conseil du trésor de dégager des nouvelles économies de quelque 900 millions par année, poursuit M. Bédard.

« Perspective positive » ?

Les membres de l’équipe Couillard ont « redressé les finances publiques » en faisant fondre le déficit du solde financier intégré de 6,6 à 2,9 milliards en deux ans (2013-2014 à 2015-2016), convient M. Bédard, qui a notamment été ex-sous-ministre adjoint au ministère des Finances et ex-secrétaire au Conseil du trésor. Cela dit, le gouvernement libéral a tort d’entretenir l’idée que « la crise des finances publiques est maintenant réglée ».

L’agence de crédit Standard Poor’s (S P) a consenti la semaine dernière une cote de crédit de A + assortie d’une « perspective positive » plutôt qu’une « perspective stable » au Québec.

Le gouvernement québécois est soumis à des « contraintes concernant les dépenses » et des « impôts relativement élevés », a souligné l’agence, anticipant une croissance des dépenses consolidées d’au moins 4 % au cours des prochaines années au Québec. De son côté, le gouvernement libéral prévoit une croissance des dépenses de seulement 2,3 %.

M. Bédard estime que l’évaluation de S P « ne changerien à l’ampleur [des] problèmes réels » du Québec. « L’atteinte de l’équilibre budgétaire a été faite en aplatissant le niveau des programmes sans avoir vraiment corrigé la dynamique de la croissance des dépenses », souligne le membre du Réseau d’expertise en conseil stratégique (RECS), qui regroupe d’anciens administrateurs d’État.


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