« J'arrive »

Crise de leadership au PQ

Le Parti québécois a remporté haut la main les complémentaires de Taillon et Pointe-aux-Trembles, deux châteaux forts qu'il conserve. Bien que sans surprise, ces victoires constituent un point tournant pour cette formation en ce qu'elles marquent la réconciliation entre la vieille et la nouvelle garde incarnée par son nouveau chef, André Boisclair, qui fera son entrée à l'Assemblée nationale.
Ce serait faire erreur que de tirer des résultats de ces élections des projections sur le comportement futur des électeurs québécois. Elles n'ont pas valeur de baromètre. Avec raison, le ministre Claude Béchard soulignait hier qu'en avril 2003, le Parti québécois avait remporté ces deux circonscriptions, ce qui n'avait pourtant pas empêché le Parti libéral de lui ravir le pouvoir.
Ce qu'il faut en retenir est plutôt la stabilité du comportement des électeurs péquistes. On aurait pu s'attendre à ce que l'insatisfaction et la déception créées par l'arrivée de M. Boisclair à la tête du PQ en novembre dernier provoquent un mouvement d'abstention chez ses partisans, voire un transfert de voix à Québec solidaire. C'est ce sur quoi misaient les libéraux, qui ont rêvé un instant de pouvoir l'emporter dans Taillon. Malgré tout, Marie Malavoy a maintenu à peu de chose près le score enregistré par Pauline Marois en 2003.
Les résultats de lundi soir dans ce comté confirment que le PQ est en voie de retrouver son unité. M. Boisclair, en choisissant Mme Malavoy pour tenter de succéder dans ce comté à celle qui fut sa principale adversaire au leadership, signalait son désir de faire oublier ses tentatives de tasser la vieille garde. À titre d'ancienne présidente du parti et d'amie très proche de Pauline Marois, Marie Malavoy pouvait mieux que quiconque symboliser cette réconciliation, que la présence lundi soir de Jacques Parizeau aux côtés de M. Boisclair venait aussi confirmer.
Le signal donné par le nouveau chef est ce qui aura par ailleurs permis au PQ de ne pas être débordé sur sa gauche par l'autre parti souverainiste qu'est Québec solidaire. Celui-ci n'a pas réussi à rééditer son exploit de Sainte-Marie-Saint-Jacques, où il avait recueilli 22 % des suffrages. Malgré cela, ce parti demeure une menace dans la mesure où, lors d'élections générales, il pourrait priver les péquistes d'une victoire dans les comtés où un millier de voix peut faire toute la différence.
L'unité apparemment retrouvée du PQ reste à consolider. Beaucoup de militants veulent maintenant voir ce que saura faire leur nouveau chef depuis le parquet de l'Assemblée nationale. Son «J'arrive» exprimé avec force traduit son enthousiasme à se retrouver au Salon bleu mais aussi une assurance présomptueuse de ses forces. Ses 15 années passées tant sur les banquettes du gouvernement que sur celles de l'opposition l'ont certes aguerri au jeu parlementaire, mais ce qu'on attend du chef de l'opposition officielle n'est pas tant d'être le meilleur au jeu du croc-en-jambes politique que de s'affirmer sur le plan des idées et des politiques.
À moins d'un an des prochaines élections, la grande faiblesse du PQ en général et de son chef en particulier est d'être forts en critiques et pauvres en propositions structurées. Le slogan des quatre E résume bien les priorités de M. Boisclair que sont l'éducation, l'économie, l'environnement et l'espoir, ce dernier signifiant la souveraineté, mais pour l'instant, ce n'est rien d'autre qu'un condensé publicitaire. Ce qui sera le programme électoral du PQ d'André Boisclair reste à définir. C'est là qu'on verra sa capacité à explorer de nouvelles avenues et à réaliser des consensus, car ses militants ne se contenteront pas du mot «espoir» pour définir leur engagement envers la souveraineté. Pour gagner, il ne peut pas se contenter d'être à la hauteur de Jean Charest : il lui faut le dépasser.
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bdescoteaux@ledevoir.ca


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