Le Parti québécois, a déclaré Pauline Marois, c’est «quelque chose comme un grand parti».
Photo : Jacques Nadeau - Le Devoir
Pauline Marois a gagné son pari. Elle a obtenu 93,08% dans le vote de confiance qui s’est tenu lors du XVIe congrès du parti à Montréal, samedi. «Cette solidarité, cette union des forces du Parti québécois, quant à moi, ça me donne la détermination, l’énergie et la volonté surtout de remettre en marche notre projet de pays», a-t-elle déclaré quelques secondes après le dévoilement du résultat, peu après 19h. La participation au scrutin des quelque 1700 participants au congrès a été élevée, atteignant 98,7%.
Reprenant le thème de son discours de la veille, Pauline Marois a lancé : «Nous nous dirigeons vers une victoire, une victoire qui pourra avoir des conséquences absolument formidables pour le Québec.» Le Parti québécois, c’est «quelque chose comme un grand parti», a-t-elle déclaré, paraphrasant ainsi une phrase célèbre du fondateur René Lévesque. Plus tôt, sur la scène du congrès, émue, elle avait lancé : «Ma victoire, c’est votre victoire. C’est la victoire d’un parti uni, d’un parti solidaire, d’un parti qui a le goût de proposer au peuple du Québec que nous nous donnions un pays.»
Un record
Avec ce pourcentage de confiance, Pauline Marois bat un record au PQ, qui n’a connu que quatre consultations de ce genre dans ses 42 ans d’histoire. La procédure fut introduite dans les statuts du parti en juin 1987 alors que Pierre-Marc Johnson était chef.
C’est toutefois Jacques Parizeau qui, le premier, a dû se soumettre à cette règle en novembre 1991, obtenant alors 92 %. Cinq ans plus tard, Lucien Bouchard avait presque claqué la porte après n’avoir recueilli que 76,7%. En 2000, il améliorait son score à 91%. Mais c’était moins de neuf mois avant de démissionner. Quant à Bernard Landry, il avait annoncé sa démission en plein congrès en 2005, profondément déçu de son 76,2%.
Lors d’une consultation d’un autre genre, tenue par la poste, René Lévesque avait obtenu un pourcentage supérieur à celui de Mme Marois. Entre décembre 1981 et février 1982, M. Lévesque, déçu des décisions de militants lors d’un congrès, avait organisé ce qu’il est convenu d’appeler le «renérendum». Résultat : 95% de oui, 3,5% de non, et 1,5% d'annulations. 48% des électeurs éligibles avaient alors voté.
Un défi
La semaine dernière, un ministre du gouvernement Charest, Pierre Moreau, avait lancé un défi à Pauline Marois. À ses yeux, si elle souhaitait rivaliser avec ses adversaires Jean Charest (97,23 % en mars 2008) et Gérard Deltell (97,1%), elle n’avait d’autre choix que d’atteindre le seuil de 95% de confiance.
Par ailleurs, si les péquistes ont confiance en leur chef à 93,08%, un sondage Léger Marketing-Le Devoir dévoilé aujourd'hui a révélé que 64% d’entre eux seulement estiment que Pauline Marois est «la bonne personne pour faire le pays du Québec».
Demie victoire des «purs et durs»
La journée de samedi a été consacrée aux débats en atelier sur la proposition principale, un brouillon de programme du parti qui a été présenté en juin 2010. En matinée, une partie de la fameuse «proposition Crémazie» a franchi une première étape. Celle-ci, présentée par l’épouse de Jacques Parizeau, Lisette Lapointe, veut contraindre un éventuel gouvernement du PQ à s’engager à dépenser de l’argent public pour promouvoir la souveraineté : «Le gouvernement du Parti québécois prendra les moyens techniques et juridiques nécessaires pour parachever les études, préciser les projets et en assurer la diffusion dans le public.»
Les militants réunis en ateliers ont donc donné à cette proposition son passeport pour la commission plénière qui doit se tenir dimanche, où elle sera discutée par tous les participants au congrès. Après un débat animé, 141 ont voté pour la proposition et 78 contre. L’aile parlementaire se situait dans ce dernier camp, les députés présents — dont Pascal Bérubé, Alexandre Cloutier, Sylvain Simard, François Gendron, Nicolas Girard et Stéphane Bédard— intervenant au micro pour décourager les militants de l’appuyer.
De la députation, Bernard Drainville fut un des seuls à voter en faveur de la proposition Crémazie. Le candidat à la présidence Daniel Turp a aussi défendu vivement la «légitimité» pour un gouvernement souverainiste de dépenser les fonds publics. Au sortir de l’atelier, Lisette Lapointe s’est dite ravie du vote et a soutenu que le travail allait continuer pour faire adopter cette partie de proposition en plénière. C’était là une victoire importante pour les plus «pressés» de la souveraineté puisque au cours des dernières semaines, le comité directeur du congrès avait jugé la proposition irrecevable.
L’association de Crémazie était allée en appel et avait finalement eu gain de cause deux jours avant le début du congrès; non sans que sa proposition soit scindée. L’autre paragraphe, qui plaidait pour la création d’une «Commission de préparation à la réalisation de la souveraineté», a été battu à plate-couture dans un autre atelier portant sur les statuts du parti.
Lisette Lapointe a toujours soutenu qu’il ne s’agissait pas de mener une fronde contre sa chef et que cette dernière pouvait compter sur sa loyauté. Lors de l’annonce du résultat, Mme Lapointe a d’ailleurs eu ces mots : «C’est extraordinaire, c’est formidable, on vient de vivre une journée mémorable et on avance.»
Loi 101 et gel des droits de scolarité
Deux autres sujets avaient déjà attiré l’attention des observateurs : le projet d’appliquer la loi 101 au Cégep et la position du parti sur les droits de scolarité à l’université. La première idée, défendue par Pierre Curzi depuis plusieurs mois, est déjà dans la «proposition principale» et aucune proposition ne visait à l’éliminer.
Dimanche, en plénière, les militants devront choisir si ces dispositions doivent s’étendre aux écoles de formation professionnelle. Par ailleurs, les militants du même atelier ont adopté une proposition pour revenir à l’unilinguisme dans l’affichage au Québec. De l’aveu même de partisans de cette proposition, elle n’a pas beaucoup de chance de survivre aux débats en plénière dimanche.
Quant aux frais de scolarité, le débat n’a pas été aussi déchirant que plusieurs au parti ne l’avaient craint. Un compromis a rallié pratiquement tout le monde : le PQ imposera un gel des droits de scolarité à partir de 2012. Une fois au pouvoir, un gouvernement péquiste organiserait un sommet sur la question, au terme duquel il adopterait une loi cadre en la matière. La formule, qui recoupe celle proposée par les jeunes péquistes, sera présentée en plénière.
Notons que dimanche matin, le chef du Bloc Gilles Duceppe, actuellement en campagne, sera de passage au congrès et s’adressera aux militants péquistes. Dans un message vidéo diffusé dans la salle du congrès hier, on entendait M. Duceppe affirmer que Pauline Marois serait la première première ministre du Québec.
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