Exit "ze" ministère

Chronique de Patrice Boileau

Il n’aura duré que le temps des roses. Peu après son couronnement à la direction du Parti québécois, Pauline Marois aura finalement décidé de renoncer à créer un « ministère de la Souveraineté », si son parti devait former le prochain gouvernement québécois.
Après avoir solennellement renoncé à tenir un référendum sur la souveraineté du Québec durant les deux ou trois prochains mandats péquistes, la nouvelle députée de la circonscription de Charlevoix a posé un geste supplémentaire afin de bien faire comprendre à ceux qui espéraient encore une chance d’entrevoir un autre avenir, qu’ils ne la trouveraient pas au sein de sa formation politique.
Avouons néanmoins que la création d’un ministère qui ensuite ne reçoit pas d’enveloppe budgétaire pour fonctionner, risque d’éprouver des difficultés à être pris au sérieux dans la population. Comble d’ironie, celui qui aurait souffert de cette situation concerne l’article 1 du Parti québécois; sa raison d’être! Il y a des limites à sombrer dans l’auto dérision. La chef du PQ n’avait finalement d’autres choix que de le saborder, maintenant qu’elle se résigne à amener son parti jouer dans un carré de sable délimité par Ottawa.
Bien des grains vont toutefois enrayer la machine péquiste dans les prochaines semaines. Enlisé, tout comme les autres formations politiques qui ratatinent dans le même désert fédéral, le Parti Québécois, qui a longtemps prétendu que l’efficacité loge ailleurs, sera accusé de renoncer à ses convictions profondes. On lui reprochera presque d’accepter de se contenter dorénavant des miettes d’Ottawa, comme ses rivaux politiques.
Incapable dorénavant de se démarquer, puisque vidé de son projet fondamental, le PQ ouvre toute grande la porte du pouvoir à l’Action démocratique. Celui-ci est le seul des partis fédéralistes qui n’a toujours pas formé le gouvernement. Il peut maintenant espérer faire élire une majorité de députés. Une formation résolument souverainiste l’en aurait peut-être empêché, s’il présentait cette option de façon novatrice. Malheureusement, plus rien ne semble capable de protéger les Québécois, comme ils le sont présentement, grâce à la présence d’un gouvernement minoritaire à l’Assemblée nationale.
La création d’un ministère de la Souveraineté, jouissant d’un budget raisonnable, aurait-il permis au Parti Québécois d’exprimer son option indépendantiste, même s’il a dit renoncer à tenir un référendum dans les prochaines années? La clientèle traditionnelle du PQ serait-elle demeurée au sein de cette formation politique? Aurait-on assisté au retour d’autres électeurs qui ont appuyé à la dernière élection l’ADQ, permettant même aux troupes de Pauline Marois d’aspirer au pouvoir? Probable que non. Un ministère voué à expliquer et à préparer un projet de pays qui ne sera finalement pas proposé aux Québécois ne rime à rien. À ce compte, il vaut mieux tout mettre en veilleuse, ce que font visiblement les péquistes.
Cette profession de foi quasi fédéraliste ne satisfera pas les adversaires fédéralistes. Après les railleries d’usage, ceux-ci harcèleront les élus péquistes jusqu’à ce qu’ils expient entièrement leur imprudence souverainiste. Toutes traces persistantes de ce péché politique seront impitoyablement jugées à l’image du tribunal de l’Inquisition. On forcera donc le Parti Québécois à radier de son programme son article 1 afin de prouver, sans l’ombre d’un doute, qu’il cherchera véritablement à développer le Québec à l’intérieur du Canada.
Durant les prochaines semaines, le PQ va donc dépenser beaucoup d’énergie à repousser les attaques de ses rivaux qui chercheront à lui attacher le grelot souverainiste. La prochaine campagne électorale risque de se dérouler également dans ce climat de suspicion. Les candidats péquistes, à l’image de l’apôtre Pierre, seront forcés de renier l’option de leur père fondateur, René Lévesque, avant que ne se déroulent trois mandats…
En décidant de renoncer à la formation d’un ministère de la Souveraineté, la leader du Parti Québécois, Pauline Marois, pose un autre geste qui encouragera les partis fédéralistes à la confronter à son article 1. De le conserver la rendra suspecte à leurs yeux. Parions qu’il n’en faudra pas plus pour déclencher une campagne médiatique afin de convaincre les Québécois que les objectifs politiques du PQ sont toujours aussi ambigus. Comme quoi, un parti qui se veut indépendantiste a finalement intérêt à proposer son option à la population lorsque celle-ci est conviée aux urnes.
Patrice Boileau




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1 commentaire

  • Archives de Vigile Répondre

    10 octobre 2007

    La salut du souverainisme passe probablement par la prise du pouvoir par l'ADQ qui a dans son programme d'autonomisme : La collecte de tous les impôts; le changement de nom de la Province de Québec à..État autonome du Québec; l'adoption d'une constitution québécoise; encadrement du pouvoir de dépenser du fédéral; l'élargissement des pouvoirs internationaux etc...
    Si l'ADQ réussit tout ça dans le Canada...adieu la souveraineté pour longtemps mais, s'il échoue, bonjour souveraineté par le PQ et l'ADQ ensemble...à mon idée.
    Autrement, si le PQ prend le pouvoir, il va devoir gouverner une province dans le Canada. S'il réussit, ça va être une raison pour voter NON à un référendum pour se séparer d'un Canada amélioré et s'il échoue, ils vont se dire que le PQ est bien mal parti pour faire la souveraineté puisqu'il ne peut même pas gouverner correctement une province.
    Le PQ au pouvoir au Québec province est une situation de PERDANT-PERDANT pour son option. Ceux qui, au contraire, pensent que l'amélioration de la place du Québec dans le Canada va inciter les Québécois à faire l'indépendance, sont mieux de réfléchir encore un peu. On est moins tenté de se séparé d'une chose quand elle est améliorée...voyons donc !