La victoire du Parti libéral était attendue. Mais elle n'est pas aussi convaincante que ce qui avait été prédit. Jean Charest sera seul, comme il le souhaitait, à tenir le gouvernail pour traverser la tempête économique qui s'annonce, quoique sous étroite surveillance de l'opposition
Après la quasi-défaite de 2007, Jean Charest s'était consacré à refaire son image pour adopter le ton et le style d'un leader rassembleur, contrastant avec la version précédente du politicien qui remettait en cause les acquis de la Révolution tranquille. Il croyait sa métamorphose si bien réussie qu'il a même osé conclure sa campagne sur un étonnant appel aux souverainistes à se ranger derrière lui. Malgré son assurance, la majorité a failli lui échapper hier soir.
Le nouveau Jean Charest qui s'est présenté à cette élection s'inspirait du cheminement suivi à son époque par Robert Bourassa. Pour être fidèle à son modèle, il devra dans ce prochain mandat chercher à être premier ministre de tous les Québécois. Il devra être à leur écoute. Ceux-ci ne devraient pas avoir à descendre dans la rue, comme ils ont dû le faire par le passé, pour le faire renoncer au projet de la centrale du Suroît et à la privatisation du mont Orford. Sa priorité devra être plutôt de mobiliser ses concitoyens, notamment autour du thème de la création d'emploi.
Comme l'avait fait tant de fois son célèbre prédécesseur, Jean Charest a fait de l'économie l'enjeu de cette élection. On attendra donc de lui qu'il agisse rapidement et qu'il mette en place un plan d'action fort, sans tergiverser comme son homologue fédéral l'a fait. Sitôt connu le prochain budget fédéral, il devrait saisir l'Assemblée nationale d'un discours sur le budget. En ces derniers jours de campagne, le chef libéral s'est montré un brin hésitant à réagir énergiquement au ralentissement attendu, encouragé probablement par la bonne tenue de l'emploi au Québec. Il ne doit surtout pas présumer que le pire est passé, ni que les Québécois se contenteront de demi-mesures.
Premier ministre de tous les Québécois, Jean Charest devra l'être aussi dans la défense de l'identité québécoise. Pour nous convaincre de sa volonté d'agir, il a repris ces derniers mois le thème cher à Robert Bourassa de la souveraineté culturelle. Il a même osé une intrusion dans la campagne électorale fédérale pour demander à Ottawa de reconnaître au Québec le rôle de maître d'oeuvre des investissements en matière de culture. Il a si souvent dit ces dernières années que «le fruit n'est pas mûr», qu'il est difficile de savoir s'il fera l'effort d'aller goûter à ce fruit.
Jean Charest a tenté au cours de cette campagne de briser l'image du «Canadien d'abord» qu'il gardait de son passage en politique fédérale. Ces derniers jours, il s'est même dit «Québécois d'abord», ce que l'on n'a pas entendu souvent de sa bouche. Capitaine Québec plutôt que capitaine Canada, quoi! L'élection étant chose du passé, reste à voir si la nouvelle image du premier ministre résistera à l'épreuve des faits. Se retrouver à l'Assemblée nationale à la tête d'un gouvernement tout juste majoritaire devrait l'inciter à être le leader rassembleur qu'il a dit qu'il serait. C'est ainsi que l'ont voulu les électeurs en se gardant dans un réflexe de prudence de lui donner une trop forte majorité.
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