Bombardier: ce n’était qu’un rêve

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La fin d'une époque pour Bombardier


Le voyageur désorienté qui descend à la gare de Berlin ne peut manquer d’être impressionné par l’immense signe «Bombardier» accroché au plafond de ce haut lieu du transport ferroviaire. De quoi ragaillardir le Québécois, après des mois et des années de nouvelles allant de mauvaises à gênantes pour notre fleuron.  


C’est fini, tout ça. Désormais, la division Transport de Bombardier, comptant plus de 40 000 employés dans le monde, ne sera plus québécoise. Étouffée par sa dette astronomique contractée dans le développement de la Série C, la descendante de l’Auto-Neige Bombardier Ltée vend à l’européenne Alstom, sa concurrente de longue date.   


On se souviendra des publicités diffusées lors de grands rendez-vous télévisuels où des gens exprimaient leur fierté en voyant, dans le ciel, un avion produit par Bombardier. C’est fini aussi. Vendus, les programmes CRJ et Q400. Cédée à Airbus, la Série C, devenue A220. Mise à l’abri depuis longtemps, la division Produits récréatifs.   


Protéger la valeur  


Tout ce qui reste de Bombardier, c’est la construction et la vente de jets privés pour les ultrariches. 10 800 emplois, quand même, et une chaîne d’approvisionnement à ne pas dédaigner. Sauf qu’il n’y aura plus ce sentiment de fierté en sachant qu’on voyage dans un produit de Bombardier, en dépit de tout l’argent que le contribuable aura versé dans une des entreprises fumeuses de la famille Bombardier-Beaudoin.    


L’absurde aura donné raison sur un point au patriarche Laurent Beaudoin : la Confédération canadienne était plus solide que l’entreprise qu’elle menaçait de déménager.   


Dans le contexte, le gouvernement Legault a fait aussi bien qu’il pouvait faire. On a protégé une partie de la valeur investie par les contribuables québécois dans le A220 et consolidé la présence, ici, du géant Airbus, le tout en dépit du retrait de Bombardier. On doit déjà travailler fort pour assurer le maintien des emplois de la division Transport à La Pocatière.    


Les cadeaux  


N’empêche qu’on garde un goût amer en se rappelant tous les cadeaux. Le «fling-flang» et les lois d’urgence pour s’assurer que Bombardier obtienne le contrat du renouvellement des voitures du métro de Montréal ; les retards de livraison et les difficultés de mises en service des commandes destinées à Toronto ou à New York qui ont affaibli la division et miné sa réputation ; tous les millions engloutis et les milliards investis dans une cimenterie ; les bonus aux dirigeants pendant que l’action baissait et que les mises à pied se multipliaient.   


Ce n’était qu’un rêve, donc, le joueur québécois qui ferait la barbe aux géants Boeing et Siemens. Il en reste une usine ferroviaire qui pourrait profiter du contexte international favorable, tant qu’on la dote d’une direction qui travaille sur le sens du monde. Reste également une filière aéronautique vitale pour l’économie québécoise, mais désormais dirigée par un chef d’orchestre affaibli.    


En attendant de savoir comment s’en tireront les travailleurs, on ne s’en fait pas trop pour les dirigeants, Alain Bellemare en tête, qui seront sans doute récompensés pour ce démantèlement en règle. 




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