Aveux, dénouement, renouement et remaniement…

Chronique de Louis Lapointe


La journée du 25 juin 2008 passera-t-elle à l’histoire ? S’il n’en tient
qu’à nos deux premiers ministres minoritaires, la réponse devrait être non.
Jean Charest et Stephen Harper se sont hâtés de vider l’agenda politique
de l’année qui prenait fin avant de commencer un été qu’ils souhaiteront
sans histoires. Ils pourront ainsi profiter des fêtes du 400e de Québec
pour mousser davantage leur popularité respective dans une région qui
pourrait bien leur permettre d’être réélus s’il y avait bientôt élections,
à Québec tout comme à Ottawa. Déjà, en fin de semaine, Jean Charest
inaugurait la promenade Samuel-De Champlain sur les berges du fleuve près
de Sillery, ne repoussant pas l’idée de l’agrandir bientôt. Tout sera fait
pour plaire aux Québécois, tant cette région est stratégique pour la survie
de ces deux gouvernements minoritaires. D'ailleurs, les Québécois attendent
avec impatience des nouvelles de Stephen Harper au sujet des ruines de leur
ancien manège militaire.
Cette journée du 25 juin a commencé avec un dénouement attendu, la
démission de Philippe Couillard. Si le ministre sénior avait eu la moindre
chance de devenir premier ministre dans les prochains mois, il n’aurait
probablement jamais quitté ses fonctions. Or, Jean Charest est là pour
rester, il peut même se permettre de demeurer encore longtemps dans une
cohabitation que les Québécois apprécient de plus en plus si l’on se fie
aux sondages des derniers mois. Tout cela grâce à la faiblesse de Mario
Dumont qui n’osera jamais défaire le gouvernement, de peur que l’ADQ
disparaisse totalement de la carte électorale.
L’arrivée d’un nouveau ministre provenant de l’extérieur des banquettes de
l’Assemblée Nationale a peut-être évité à Jean Charest les inconvénients
d’un remaniement, mais ne changera rien au fait que les urgences des
hôpitaux sont parmi les lieux les plus chauds que l’été nous apporte
invariablement chaque année. Des urgences débordées l’été sont une
fatalité, tout comme les moustiques le sont en cette saison de
prédilection. Parions qu’ils auraient été nombreux dans les urgences du
Québec à préférer les moustiques et à envier l’ancien ministre qui passera
probablement l’été les pieds dans l’eau fraîche à taquiner le salmonidé au
milieu d’une nuée d’insectes. Si le docteur Yves Bolduc, son successeur, a
connu de nombreux étés chauds dans les urgences de la province, il n’a
toutefois pas encore goûté à la médecine de l’opposition qui ne se gênera
certainement pas pour le piquer, parfois au vif, lui et son chef, dès que
l’occasion se présentera. Espérons qu’il est vacciné contre ce genre
d’attaque !
Puis ce fut le tour de Stephen Harper à nous annoncer son remaniement. La
minceur de ses troupes ne pouvait être plus éloquente. Un non élu prend du
gallon, un néophyte est promu aux travaux publics et un anglophone se voit
confier les langues officielles. Comment faire oublier rapidement un pareil
désastre et un tel aveu de faiblesse?
Le hasard faisant bien les choses, cela ne fut pas sans compter sur la
collaboration imminente de l’ineffable Maxime Bernier qui est passé aux
aveux au pays des Jos Louis et autres petits gâteaux Vachon, le jour même
où son patron tentait malhabilement de réparer les pots qu’il avait
lui-même contribué à casser.
Maxime Bernier est fier, franc et honnête, comme tout bon Beauceron
prétend l’être. On l’a vu hier soir se remettre hâtivement à la tâche et se
retrousser les manches afin de créer une diversion pour venir en aide à son
premier ministre. À le voir aller parmi les siens, nul doute qu’il
reprendra rapidement du galon et renouera avec le succès fulgurant qu’a
connu sa carrière avant que cette monumentale chute advienne.
Essentiellement, nous avons appris que Maxime Bernier ne connaissait pas
le passé trouble de Julie Couillard et que personne ne l’en avait informé,
ni la principale intéressée, ni la GRC. Le père de Maxime Bernier parle
d’arnaque, alors que la réaction du gouvernement suggérait plutôt qu’il
s’agissait d’une simple couillonnade entre conjoints. Une question demeure
toutefois sans réponse, pourquoi la GRC n’a pas informé ni Maxime Bernier,
ni le Conseil privé du passé trouble de Julie Couillard ? Un sujet que ne
manqueront pas d’aborder les nombreux journalistes qui, tel un déploiement
de moustiques, poursuivront le premier ministre du Canada dans tous ses
déplacements et ses apparitions publiques.
Un été chaud que cette journée du 25 juin 2008 ne réussira pas à
totalement occulter, malgré toutes les vaines espérances des faiseurs
d’images.
Louis Lapointe

Brossard
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L'auteur a été avocat, chroniqueur, directeur de l'École du Barreau, cadre universitaire, administrateur d'un établissement du réseau de la santé et des services sociaux et administrateur de fondation.





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