Assurance-emploi - Une sénatrice conservatrice plaide pour le rapatriement

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Toutes les contradictions du régime fédéral sont en train d'être exposées tour à tour

N’en déplaise au gouvernement Harper, la sénatrice conservatrice Diane Bellemare estime qu’il serait plus logique que les provinces gèrent elles-mêmes le régime d’assurance-emploi. Selon l’économiste, il est ainsi « urgent » que ce scénario soit étudié.

Nommée sénatrice à l’automne 2012, Mme Bellemare soutient dans un livre publié mardi que les « provinces peuvent faire mieux que le fédéral » pour administrer efficacement le régime. Celles-ci sont mieux placées pour « tenir compte de la diversité des besoins des marchés du travail au Canada, pour s’attaquer à la faiblesse du taux de couverture du programme d’assurance-emploi et à son interaction avec les dépenses de l’aide sociale », écrit-elle dans Créer et partager la prospérité (Presses de l’Université du Québec).

Les provinces auraient aussi une meilleure capacité d’action pour « résoudre la problématique du développement des compétences », pense Diane Bellemare. Globalement, elle se dit « convaincue que cela [le rapatriement des prestations] permettrait de réduire considérablement la durée à l’aide sociale ainsi que celle où sont versées les prestations de l’assurance-emploi ».

Car si les provinces avaient à la fois « la responsabilité des prestations d’assurance-emploi et des mesures d’emploi et de formation, elles pourraient mieux les coordonner et réduire le nombre de prestations » versées, pense la sénatrice.

En 1986, Mme Bellemare avait coécrit un premier livre abordant cette question. À l’époque, elle avait proposé différentes recommandations « visant à donner au Québec la maîtrise d’oeuvre de la politique active du marché du travail », mais sans aller jusqu’à demander le rapatriement des prestations de revenus du programme d’assurance-emploi. « Aujourd’hui, il est urgent de se pencher sur la réalisation d’un tel scénario », croit-elle.

Position péquiste

Cette position rejoint essentiellement celle du gouvernement péquiste à Québec. Pauline Marois avait fait de la question du rapatriement un engagement électoral lors de la dernière campagne. La Commission nationale d’examen sur l’assurance-emploi, que président Gilles Duceppe et Rita Dionne-Marsolais, a notamment pour mandat « d’établir les paramètres d’un régime d’assurance-emploi qui concorderait avec les besoins du marché du travail québécois ».

Deux avis juridiques déposés devant la Commission rappellent toutefois qu’il faudrait un amendement constitutionnel pour que la compétence législative en matière d’assurance-emploi soit transférée à Québec. Québec pourrait sinon se rabattre sur la signature d’une entente administrative par laquelle Ottawa lui déléguerait une partie de son pouvoir. Mais cette entente serait nécessairement « fragile » et limitée, disent les constitutionnalistes Benoît Pelletier et Henri Brun.

Le point de vue de Diane Bellemare la place en contradiction avec la position officielle du gouvernement conservateur. « On n’a pas le mandat de démanteler la fédération », répondait notamment le ministre Christian Paradis à ce sujet, au lendemain de l’élection du Parti québécois l’an dernier.

Mme Bellemare avait déjà critiqué la réforme de l’assurance-emploi dans une lettre publiée dans Le Devoir au printemps 2012. Elle craignait que les modifications ne fassent en sorte que plusieurs chômeurs fréquents optent pour la « sécurité de l’aide sociale plutôt que d’occuper de petits boulots ». En obligeant certains chômeurs à accepter n’importe quel boulot, « le gouvernement risque d’augmenter la désuétude des compétences nouvellement acquises », disait-elle.

Dans son livre, elle ne parle pas spécifiquement de la réforme, mais en critique bien des fondements : inciter les gens à déménager là où il y a des emplois « découle d’une analyse tronquée » de la réalité du marché de l’emploi, dit-elle. De même, « il est faux de penser que le fait de couper à l’assurance-emploi réduira le chômage », croit aussi Mme Bellemare.

À son avis, il faut plutôt miser sur des mesures de formation en entreprise et de formation continue - et permettre ce genre de formation pendant que les gens touchent des prestations. Or, c’est là quelque chose que les obligations imposées aux prestataires empêchent dans les faits, relève Diane Bellemare.


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