Jeux de pouvoir

Après le trou, le tas

17. Actualité archives 2007




QUÉBEC -- Vous souvenez-vous ? Lorsque Jean Charest avait pris le pouvoir en avril 2003, son premier geste avait été de confier un mandat à l'ex-Vérificateur général Guy Breton qui avait «trouvé un trou» de 4,3 milliards dans le budget électoral de Pauline Marois. Quatre ans plus tard, c'est plutôt d'un tas dont il faut parler...
Le premier mai 2003, avant même la première réunion de son cabinet, le nouveau premier ministre plantait le décor pour renier rapidement son principal engagement électoral, celui de baisser les impôts des Québécois d'un milliard par année durant quatre ans.
L'impasse financière de 4,3 milliards «laissée par les péquistes» obligerait son gouvernement à se serrer la ceinture «pour mettre de l'ordre dans les finances publiques» et à retarder plusieurs de ses promesses électorales, avait averti Jean Charest.
Il faut croire que les libéraux ont développé des talents d'administrateur hors pair depuis ce temps...
Non seulement leurs trois derniers budgets ont été équilibrés - encore que cela mérite beaucoup de nuances - mais en plus, leur gouvernement a trouvé des montagnes de beaux dollars qui leur permettent de dépenser à tout vent depuis le printemps dernier.
En fait, les engagements du gouvernement de Jean Charest depuis mai totalisent plus de quatre milliards de dollars, soit un tas aussi imposant que le trou béant dans lequel nous étions supposés être au printemps 2003.
C'est bien pour dire combien étranges sont les choses parfois...
La machine à fric s'est emballée
Ma collègue du Devoir, Kathleen Lévesque, avait fait un travail de moine en août dernier en recensant tous les engagements pris par le gouvernement durant les quatre mois précédents, alors que Jean Charest voulait s'ouvrir une fenêtre électorale pour l'automne.
Elle en avait trouvé pour trois milliards de dollars ! Juste ça.
Et depuis septembre, la machine à fric gouvernementale a à peine ralenti. Au moins un autre beau milliard a été engagé cet automne dans des annonces de toutes sortes, selon un rapide relevé fait par le Journal.
Il ne faut pas être un grand devin pour prédire que ce rythme va de nouveau s'accélérer dès le début de janvier.
Cette fois, Jean Charest n'attendra pas la reprise des travaux parlementaires en mars pour déclencher des élections générales. Il va y aller aussitôt que février, peut-être même avant le dépôt du budget fédéral.
Tout cela pour dire que notre dramatique trou de 4,3 milliards de 2003 n'est plus maintenant qu'un mauvais souvenir, au mieux une pièce d'anthologie, signée Jean Charest, sur l'art de faire de la politique.
À défaut d'avoir bénéficié des baisses d'impôt promises, cela nous donne une belle leçon.
Et la dette qui monte toujours...
Le parti qui avait promis de mettre de l'ordre dans les finances publiques est maintenant celui qui est prêt à faire toutes les pirouettes nécessaires pour conserver son pouvoir de poivrer partout des subventions.
Lorsque les libéraux ont pris le pouvoir en avril 2003, la dette du gouvernement était de 111,3 milliards de dollars. Au 31 mars 2006, elle atteignait 118,3 milliards, un bond de 7 milliards en trois ans.
Une bonne partie de cette hausse est attribuable à des emprunts pour payer la liste d'épicerie.
Ainsi, par exemple, Québec emprunte un peu plus d'un milliard par année pour compenser les profits d'Hydro-Québec que le gouvernement n'encaisse pas. Ce milliard sert aux dépenses de programmes.
Un bond
L'an prochain, la dette fera un bond plus considérable qu'à l'habitude. Le ministre des Finances, Michel Audet, a décidé d'emprunter un montant de 2,5 milliards qui sera versé à la dette pour rembourser le gouvernement fédéral, qui lui a versé trop d'argent dans ses transferts durant les dernières années. Ces sommes servaient aussi à boucler le budget.
Autrement dit, le déficit zéro n'existe pas et nous empruntons toujours pour maintenir nos services et satisfaire les besoins électoralistes de nos dirigeants.
ychartrand@journalmtl.com


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