Les Albertains influents suivent les élections québécoises avec un intérêt particulièrement vif parce que nombre d'eux savent qu'il s'agit d'un point tournant de la politique canadienne.
Les autres provinces canadiennes ont besoin d'un gouvernement du Québec qui définit et articule avec force les aspirations québécoises et qui poursuit la défense musclée des compétences québécoises face aux empiètements du gouvernement fédéral.
Les remarquables habiletés politiques de Stephen Harper ainsi que l'élan machiavélique qu'il a manifesté et qui a ravagé l'opposition libérale (laissant Stéphane Dion abasourdi et sans défense devant une pluie de demi-vérités et des insinuations) démontrent qu'il est prêt à tout pour parvenir à ses fins.
Et si cela signifie repousser les limites des compétences et écarter du coude les intérêts légitimes des provinces, qui pourra l'arrêter? Le Québec et l'Alberta l'ont fait historiquement. Et cette alliance doit se poursuivre quel que soit le parti qui formera le prochain gouvernement du Québec.
Nous sommes en train d'apprendre en Alberta que la couleur politique du premier ministre n'a pas d'importance et que ce n'est même pas pertinent qu'il ait été élu dans une circonscription albertaine. Tout comme les Québécois, nous comprenons que ce n'est pas parce que le premier ministre est issu de votre province qu'il fera mousser les intérêts de votre province. Nous sommes encore un peu sous le choc ici à cet égard, mais nous en avons suffisamment vu pour savoir que M. Harper est véritablement un premier ministre canadien qui repoussera sans relâche et même brutalement les limites du pouvoir fédéral.
Voyez les cinq priorités du gouvernement Harper. Deux d'entre elles, la garde d'enfants et des périodes d'attente garanties pour les soins de santé, sont purement de compétence provinciale. Et ce n'est pas comme si ces priorités n'étaient que de belles paroles lancées en campagne électorale. En février, Tony Clement, le ministre fédéral de la Santé, a tenté de forcer les provinces à s'engager à garantir des périodes d'attente. Informé de cette initiative de dernière minute pour contraindre les ministres de la Santé provinciaux, territoriaux et fédéral à assister à une réunion, le représentant albertain a décidé de rester chez lui. (...)
La Chine
De la même façon, M. Harper a agi directement à l'encontre des intérêts de l'Alberta à cause de son approche confuse en ce qui concerne la Chine. En premier lieu, Stockwell Day insiste pour dire que le Canada est un nid d'espions chinois. Et puis, David Emerson, fait des pieds et des mains pour gagner la clientèle de la Chine. Et cela au moment où l'Alberta tente de trouver d'autres débouchés que les États-Unis pour ses produits énergétiques. M. Harper insinue que les investissements chinois dans le secteur énergétique albertain ne sont pas désirables ni bienvenus. Puis, il envoie Jim Flaherty faire mousser les affaires en Chine. Et pendant tout ce temps, M. Harper clame qu'il ne sacrifiera pas les droits de la personne en Chine sur l'autel du dollar tout puissant. Un noble sentiment.
Pourtant, Jean Chrétien et Paul Martin ont soulevé la question des droits de la personne auprès des autorités chinoises, ont obtenu que les Canadiens jouent un rôle dans la formation des juges chinois et dans l'amélioration de la règle de droit en Chine, et ils ont fait participer des fonctionnaires canadiens et chinois de haut rang au suivi de l'avancement des droits de la personne. Et ce faisant, ils ont fait croître le commerce avec la Chine au bénéfice de l'Alberta. Pourquoi un premier ministre originaire de l'Alberta jetterait-il tout ça par-dessus bord?
L'Alberta a consacré trois décennies à établir un engagement constructif avec la Chine et à bâtir une relation fondée sur la patience, la prudence et la persistance. Cela s'est finalement traduit par le fait que la Chine est devenu le deuxième partenaire commercial en importance de l'Alberta. Lorsqu'une chute du marché boursier de Shanghai entraîne une dégringolade des autres Bourses dans le monde, lorsque les États-Unis continuent d'emprunter 1 milliard$US chaque jour de la Chine pour financer sa guerre en Irak et pour réduire les impôts des Américains les plus riches, voilà des preuves évidentes de l'influence et du pouvoir de la Chine. Les Albertains accordent une grande valeur à la relation habile et nuancée de leur province avec la Chine et à l'influence positive que la province a acquise ce faisant. Voilà qui est maintenant mis en péril par la démagogie irresponsable du gouvernement Harper.
Tout cela est survenu dans un contexte de gouvernement minoritaire. Si M. Harper forme un gouvernement majoritaire, ce qu'il pourrait bien réussir à faire, qui limitera son exercice du pouvoir fédéral?
Le Québec et l'Alberta doivent encore une fois monter aux barricades. Nous espérons ardemment que vos élections donneront un partenaire fort, lucide pour résister à l'impulsion centraliste et centralisante d'un gouvernement national porté sur le contrôle.
Ken Chapman
Satya Das
Les auteurs dirigent Cambridge Strategies Inc. un groupe-conseil albertain en politique publique.
Alberta-Québec, même combat
Québec 2007 - le facteur «Canada»
Ken Chapman2 articles
L'auteur dirige Cambridge Strategies Inc. un groupe-conseil albertain en politique publique.
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