YANN MARTEL : les effets de l’anglais

peu de gens croient à la disparition de la langue française au Québec

Écoles passerelles - Loi 115


Le fils

Né en Espagne de parents québécois, Yann Martel vit à Saskatoon. Francophone, il écrit en anglais. Il a vécu dans de nombreux pays et a étudié la philosophie aux universités Trent et Concordia. Son recueil de nouvelles The Facts behind the Helsinki Roccamatios, paru en français sous le titre Paul en Finlande, a gagné divers prix, a été publié en plusieurs langues et a été encensé par la critique....

Les parents

Émile Martel est un diplomate, poète, conteur et traducteur québécois né en 1941 à Amos. Il est le frère de Réginald Martel et le père de Yann Martel.
Il a fait ses études à l'Université d'Ottawa, à l'Université Laval à Québec et à l'Université de Salamanque en Espagne. Il a ensuite été professeur de langue et de littérature française à l'Université d'Alaska et à l'Université de Victoria.

Ce sont les parents de Yann Martel, Nicole et Émile Martel, tous deux traducteurs de métier, qui ont effectué la traduction française de Life of Pi (Booker Prize 2002).

La conjointe

Alice Kuipers est née à Londres en 1979. Elle a étudié à Manchester et vit aujourd'hui à Saskatoon, Canada.

Les effets de l’anglais

Yann Martel est né de parents québécois mais, ayant fait ses études en anglais, c’est dans cette langue qu’il écrit. L’intention ici n’est pas d’analyser l’œuvre de Yann Martel ni de la critiquer mais bien de réfléchir sur les impacts d’une éducation scolaire en anglais dans une famille dont la langue maternelle est le français.

Nicole et Émile Martel, en tant que diplomates et étant appelés à travailler à l’étranger, ont estimé que le choix de l’anglais pour leur garçon était le bon. Sans remettre en question cette décision, il n’en demeure pas moins que Yann Martel écrit en anglais et que ce sont ses parents qui traduisent ses livres en français. La conjointe de l’écrivain est Anglaise et écrit en anglais. Le couple vit en Saskatchewan, une province anglaise du Canada. Ils ont un fils possiblement bilingue ou non, mais dont l’anglais est (ou sera) la langue première.

Ces faits n’ont pas pour but de discréditer un auteur canadien à succès mais doivent nous amener à nous interroger sur les impacts qu’auront les écoles passerelles sur le Québec français de même que le libre choix de la langue d’études au niveau collégial et universitaire, ainsi que le surfinancement du réseau scolaire anglais.

Il est clair qu’un jeune qui, à la fin du secondaire, étudie en anglais, a de fortes chances de faire de l’anglais sa langue identitaire. Est-ce dans cette langue qu’il transmettra ses valeurs à ses enfants ? De quelle façon se percevront ces derniers ? À quel groupe linguistique appartiendront-ils ? Que liront-ils ? De quelles sources tireront-ils leurs informations ? Quels intérêts défendront-ils ? Pour qui voteront-ils ? Quelles salles de cinéma et de théâtre fréquenteront-ils ? Malgré leur nom à consonance française, combien de mots pourront-ils prononcer dans cette langue ?

Déjà, de plus en plus de Québécois, dont le (la) conjoint(e) est Canadien ou d’origine autre, choisissent de vivre en anglais (souvent sous le prétexte que la personne aimée ne parle pas français) sans avoir nécessairement fait d’études dans cette langue. Est-ce par paresse ou pour se donner un sentiment de supériorité, toujours est-il que, tôt ou tard, la langue parlée à la maison prend le dessus et devient celle avec laquelle on pense et on agit.

Une personne québécoise qui vit en anglais devient canadienne. Pour ne pas donner à son (sa) conjoint(e) à penser qu’elle l’exclut, elle met la télé et la radio en anglais. Les activités à l’extérieur se pratiquent en anglais (voyages, cours prénataux, épicerie, restaurant). Les amis, la famille et les voisins, mus par une même bonté d’âme, ont également recours à l’anglais pour converser avec cet individu qui ne parle que deux mots de français (bien qu’il soit né ici ou ait passé plus de vingt ans au Québec).

Les Québécois aiment pratiquer leur anglais. Quelle merveilleuse chance s’offre d’avoir un beau-frère, une belle-sœur ou un collègue de travail, qui parle anglais ! Or, si on apprend une langue, on peut aussi la perdre. À force d’être exposé à l’anglais, à force de le parler, de le lire, de l’écrire, de réfléchir dans cette langue, les mots s’oublient. Ils sont mis entre guillemets. La façon de parler le français change. Elle prend les intonations de l’anglais. Elle devient nasillarde. De fait, on croit avoir affaire à une personne de langue anglaise qui connaît le français mais qui traduit de l’anglais au français avec les erreurs que cela entraîne. Le reste suit.

Les chiffres indiquent que le français au Québec est en train de subir le sort qu’il connaît dans les provinces canadiennes, ce que la majeure partie des Québécois préfèrent nier (ce qui leur évite d’avoir à lutter). Quelques-uns la défendent. Certains, dont la ministre Saint-Pierre, estiment que le français se porte très bien merci et qu’il faut participer à l’épanouissement de l’anglais au Québec pour avoir bonne presse à l’étranger. D’autres réussissent à se convaincre que l’anglicisation du Québec ne concerne que Montréal. D’autres encore confondent bilinguisme (le fait de posséder deux langues) et anglicisation (le fait de délaisser le français au profit de l’anglais). Par conséquent, peu de gens croient à la disparition de la langue française au Québec. Mais alors, comment survivra-t-elle ?

Invitation

http://www.youtube.com/watch?v=Q5_0IaoZvwk

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Château de banlieue

Mieux vaut en rire que d'en pleurer !


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11 commentaires

  • Archives de Vigile Répondre

    17 novembre 2010

    Yann Martel s'exprime très bien en français et ce, beaucoup plus éloquemment que la majorité des Québécois ayant "étudié" en français au Québec. La pauvreté du français écrit et parlé des jeunes québécois ayant terminé leurs études secondaires (sans mentionner le haut taux de décrochage) est affligeante.
    Yann Martel maîtrise le français et l'anglais parfaitement tandis que la majorité des jeunes québécois s'exprime de façon approximative en français et en anglais. Je suis Québécoise et j'aime la langue française. Ce que je ne comprends pas, c'est cet acharnement à se restreindre à une seule langue que nous ne respectons même pas. Avant de s'indigner sur le fait que des jeunes puissent avoir la possibilité d'étudier en anglais, il faudrait s'attaquer tout d'abord à la façon dont nous traitons notre langue. " Moi, genre, j'ai pogné toute ça avant toute le monde qui ont rien compris."

  • Archives de Vigile Répondre

    17 septembre 2010

    La loi constitutionnelle du Canada et les lois 101-104-103
    Le texte de l’Acte de l’Amérique du Nord britannique de 1867 – la loi constitutionnelle du Canada – reconnaît à l’article 90 au gouvernement fédéral un droit de désaveu des lois provinciales. Il a été utilisé à 112 reprises dans l’histoire du Canada et pour la dernière fois en 1943.
    D’un point de vue politique, son utilisation est de caractère explosif parce qu’il ramène les provinces au rang de grosses municipalités.
    C’est évidemment plus élégant de confier le désaveu à des juges d’une Cour suprême d’une neutralité au-dessus de tout soupçon.
    Ces juges interprètent une Charte des droits qui, sur les questions linguistiques, a été élaborée par Pierre Elliott Trudeau très précisément pour contrer la loi 101. Tous les autres articles de la Charte sont des généralités comme c’est la coutume pour des documents de ce genre, mais l’article 23 qui porte sur la question linguistique entre dans les détails avec la précision d’une loi fiscale.
    Le Québec, unanimement, n’a jamais reconnu la Constitution de 1982 et sa Charte des droits. Il n’a pas à reconnaître l’interprétation que donnent de cette loi des juges nommés par le gouvernement d’une autre nation.

    Pour ce faire, il peut utiliser la clause dérogatoire qui, rappelons-le, a été inscrite dans la Constitution lors de son rapatriement en 1982 à la demande expresse des provinces anglophones.
    C’est aujourd’hui le seul espace qui reste au Québec pour exercer son droit à l’autodétermination. Mais encore faut-il avoir le courage politique pour le faire.
    Source ; Pierre Dubuc,l’Aut’Journal,16 septembre 2010

  • Archives de Vigile Répondre

    16 septembre 2010

    Des autres exemples :
    Mme Geneviève Rock est une étudiante de deuxième cycle de langue anglaise à Concordia. Elle étudiait pour son baccalauréat à University of British Columbia. Elle est aussi une mère célibataire. Le père de ses enfants est un anglophone de la Colombie-Britannique.
    Bien que ses enfants aient le droit d'étudier au réseau anglais, elle eux envoyé à l'école française. De plus, elle parle toujours aux enfants en français, tous les temps.
    M. Sylvain Campeau étudiais a McGill. Il travaillait à Paris et à Calgary. Selon lui, la culture de Calgary est plus proche que la culture de Paris à la culture de Montréal. Par ailleurs, il a dit que la seule similarité entre la France et le Québec est la langue.
    Aujourd'hui, Sylvain est professeur de francisation pour les immigrants à CEGEP de Vieux-Montréal.

  • Archives de Vigile Répondre

    14 septembre 2010

    je suis née au N._B. et fais une partie de mes études au primaire au Québec,puis à l'école publique qui était majoritairement anglophone dans cette province.J'ai fait mon collège classique bilingue, mais les religieuses nous ont appris la beauté et la richesse de notre langue.Après mes études, je suis vnue enseigner le français au Québec, et quoique bilingue,j'ai tours refusé d'enseigner l'anglais.Il faut à tout prix défendre notre langue,et il est évident que celle-çi est menacée à Montréal.Je vis à Rimouski et je crois que je serais toujours en colère si je devais voir ma langue massacrée ou totalement ignorée à Montréal.De voir cette loi 103, encore une fois diluer la loi 101 par une ministre francophone ,je trouve cela choquant, inacceptable,irrespectueux de notre peuple.J'ai consciemment voulu venir au Québec pour vivre en français, et j'ai essayé d'inculquer à mes élèves la fiereté pour leur langue et leur culture.....

  • Archives de Vigile Répondre

    13 septembre 2010

    À propos des frères Trudeau, il est vrai qu'en réalité, leur langue maternelle est l'anglais et que c'est le français qui est leur langue seconde. J'avais oublié ce fait dans mon précédent commentaire.
    Leur cas montre quand même fort bien les limites du bilinguisme familial. Sauf rarissime exception, il y a toujours une des deux langues qui écope.
    Si le français a si mal survécu au bilinguisme au sein de la famille Trudeau, ça donne une idée de ce que peut valoir la politique des langues officielles dont se vantait tant le paternel !
    Luc Potvin

  • Archives de Vigile Répondre

    13 septembre 2010

    L'apprentissage précoce de l'anglais langue seconde est-il une bonne chose ?
    Il suffit d'écouter parler les frères Trudeau pour constater que non. Leur cas est on ne peut plus exemplaire.
    Quoique salaud, leur père possédait une culture générale à tout le moins potable, admettons-le. Riche, il n'a pas manqué d'envoyer ses rejetons dans les meilleures écoles, du moins les plus réputées. Or, malgré tous les avantages dont ils ont joui, Justin et Alexandre baragouinent un français inférieur à celui de Jean Chrétien, ce qui, franchement, dépasse l'entendement.
    Leur père leur a-t-il déjà reproché leur «lousy french» ? On ne le saura sans doute jamais. Chose sûre, il lui fut beaucoup plus facile, à l'époque, de conspuer celui, pourtant éminemment pardonnable, de nos compatriotes les plus mal pris, les plus durement frappés par l'injustice sociale.
    Luc Potvin
    Verdun

  • Archives de Vigile Répondre

    13 septembre 2010

    Madame,
    Vos propos directs illustrent efficacement votre thèse. Nous nous rejoignons de plusieurs manières. J'ai récemment fait parvenir à Monsieur Yann Martel, par l'intermédiare de son éditeur, une copie d'une lettre exposant l'importance qu'aura eu l'immigration sur la marginalisation des francophones et maintenant l'importance vitale d'une immigration francotrope pour la survie du fait français dans les provinces anglosaxonnes, et l'impérieuse nécessité d'inscrire dans des écoles francophones les enfants dits "ayant droit" à l'éducation en français (essentiellement la lettre adressée au Commissaire aux langues officielles, sous http://www.vigile.net/Francophones-hors-Quebec,29627
    Par ailleurs vos préoccupations quant à certains comportements linguistiques recoupent une partie de l'objet de propos adressés à la ministre Madame C. StPierre en avril dernier, et que n'ayant pas reçu l'attention que méritait la gravité de la situation je décidai de publier récemment sous http://www.imperatif-francais.org/bienvenu/articles/2010/integration-et-francisation-des-immigrants.html.
    Un programme de conscientisation de l'importance de comportements linguistiques sains s'impose, littéralement.
    Bien votre
    MP

  • Archives de Vigile Répondre

    13 septembre 2010

    Madame Moreno,
    Vous écrivez : « Les Québécois aiment pratiquer leur anglais. Quelle merveilleuse chance s’offre d’avoir un beau-frère, une belle-sœur ou un collègue de travail, qui parle anglais ! »
    Mais, Madame Moreno, la grande majorité des Québécois le parlent - et ne parlons surtout pas de l'écrire! - tout aussi mal que le français. Le débat de la langue est une affaire d'élites. Le français, comme le latin, disparaîtra et les gens ne s'en apercevront pas. Comment le pourraient-ils, n'étant même pas conscients qu'ils parlent?
    André Meloche
    P.S. Si c'est pour parler de « business » ou de sport que les Québécois veulent absolument parler anglais, qu'on leur laisse massacrer la langue de Shakespeare, auteur qu'ils ne liront probablement jamais, n'étant même pas capables de lire en français un Miron, un Ferron. Car toute langue exige un effort de jaillissement hors de soi. Nietzsche écrivait qu'il était inutile d'apprendre une autre langue avant d'avoir maîtrisé la sienne...

  • Jean-François-le-Québécois Répondre

    12 septembre 2010

    @ Caroline Moreno:
    «... ce que la majeure partie des Québécois préfèrent nier (ce qui leur évite d’avoir à lutter).»
    Cela est cohérent, avec l'attitude québécoise contemporaine, je le crains. Trop d'entre nous, ont très peur d'affronter la réalité... Un peu comme quelqu'un qui trop triste de voir sa maison en feu, qui demeurerait à l'intérieur, plutôt que de faire face à la réalité que rerpésenterait l'incendie. Quitte à mourrir dans les flammes, si ça leur permettait de vivre quelques minutes nostalgiques, avant que la réalité, inévitablement, ne les rattrape...
    Je trouve que notre nation québécoise, aujourd'hui, est quelque peu psychotique, collectivement.

  • Archives de Vigile Répondre

    12 septembre 2010

    Pour nous remercier de notre accueil lors d'une séance de signature à la succursale Champigny de Renaud-Bray, Yann Martel a signé une affiche avec pour seul commentaire un gros «Marci» (digne de Gerry).

  • L'engagé Répondre

    12 septembre 2010

    Merci pour ce texte d'une grande intelligence, posé, et par là très convaincant.
    Il y a longtemps que le cas Martel me fatigue, si je salue son oeuvre , son génie littéraire est effectivement lié à sa grande maitrise poétique de l'anglais.
    À le lire, on sent que pour lui, le débat national au Québec semble dépassé, mais sa dimension francophone est, elle aussi, dépassée par sa plume.
    Il est universel, et par là, il est lu, mais dans son cas, il a d'autant plus perdu au passage qu'il n'est sans doute plus en mesure d'en faire le bilan.
    Un Québec indépendant, avec de belles délégations/ambassades dans les provinces et les États des États-Unis, un État octroyant des bourses d'études québécoises permettrait aux futur Yann Martel d'écrire en français et d'être lu sans devoir écrire en anglais, et d'être traduit en anglais par après...
    Il est dur d'avoir une littérature nationale... sans nation.