Victoire référendaire dorénavant pratiquement impossible

Il est temps dans ces conditions que le Québec passe à autre chose, même si cela ne sera pas facile

Ben, fonçons avec les moyens d'un demi-État... Et le vote référendaire exige-t-il que tous aient le droit de voter? Quid des immigrants récents qui n'habiteront plus le Québec dans un an ou deux? Ne soyons pas naïfs!



Chaque fois que je m'aventure au centre-ville de Montréal, j'ai la curieuse sensation de rajeunir. Si la tendance se maintient et si je vis encore une dizaine d'années, je retrouverai alors assurément le Downtown Montreal que j'ai connu en 1968 à mon arrivée de Suisse! La langue anglaise y était encore reine.
Je dois donc maintenant admettre, à mon corps défendant, que le sort de la langue française au Québec est définitivement scellé: une lente «louisianisation» de la province est maintenant inévitable. La rapidité de cette évolution dépendra des mesures que pourront prendre nos dirigeants à l'avenir pour protéger notre langue, malgré tous les obstacles constitutionnels imposés par Ottawa. Ceux et celles qui prétendent que la langue française n'est pas en danger au Québec sont soit des «pros» de la désinformation, soit des naïfs indécrottables. Que tous les sceptiques viennent faire un tour au centre-ville de Montréal!
Seule l'indépendance aurait pu, et cela n'est même pas certain, assurer la survie de notre langue en Amérique du Nord. L'échec référendaire de 1995 a définitivement sonné le glas de ce bel espoir! Car toute victoire référendaire est dorénavant sinon mathématiquement, du moins pratiquement impossible. N'oublions pas que, lors de la dernière consultation populaire, la volonté de près de deux francophones sur trois a été balayée par une volonté contraire de 95% des allophones et des anglophones. Compte tenu des vagues d'immigration successives et du taux de natalité très bas de la population francophone de souche, la situation ne peut que se dégrader d'année en année.
Il est clair que les immigrants allophones, même francisés par la loi 101, n'auront jamais à coeur la survie du français comme peuvent l'avoir les francophones de souche. D'autre part, le poids politique  du Québec s'amenuisera progressivement au sein de la fédération canadienne, étant donné que sa population augmente moins rapidement que celles des autres provinces. Il faut cesser de pratiquer la politique de l'autruche: les carottes sont cuites. Attaquée de l'extérieur de la province et de moins en moins défendue à l'intérieur, la langue française ne tiendra pas la distance au Québec. Les futures générations de francophones, prises au piège démographique, faites comme des rats, ne pourront plus inverser la tendance.
Ce n'est pas de gaieté de coeur que je fais ce constat que peu de Québécoises et de Québécois osent faire à haute voix, le sujet étant encore assez tabou. Je me rends compte cependant que de plus en plus de francophones en viennent, consciemment ou non, à la même conclusion. Comment expliquer autrement la débandade du Bloc québécois et les luttes intestines au sein du Parti québécois entre réalistes et idéalistes? Les francophones qui ont voté non en 1995 savourent certainement leur triomphe définitif, mais se tiennent plutôt cois, préférant ne pas trop se vanter d'une victoire obtenue grâce aux anglophones et aux groupes ethniques.
Il est temps dans ces conditions que le Québec passe à autre chose, même si cela ne sera pas facile. Il y a tellement de problèmes sérieux à régler dont la solution a été empêchée ou différée par la lutte fratricide qui oppose depuis des décennies souverainistes et fédéralistes: la dette de l'État explose, la corruption sévit dans la construction et sûrement ailleurs, les hôpitaux sont débordés, notre environnement est sérieusement menacé... Et le problème des accommodements raisonnables va se poser avec de plus en plus d'acuité à Montréal.
Il faudrait, pour diriger la province, des hommes qui ne soient pas trop marqués par leurs positions constitutionnelles antérieures. L'idée d'un nouveau parti politique est excellente. M. François Legault est-il l'homme idéal pour le diriger? Ce n'est vraiment pas un homme nouveau, mais c'est actuellement le seul candidat et le temps presse. J'attends pour me faire une opinion de savoir par qui il sera entouré.
Il m'est difficile cependant d'être très optimiste: les problèmes constitutionnels ne viendront-ils hanter en permanence ces nouveaux politiciens? Poser la question, c'est y répondre! La guerre des clans, si nécessaire à la survie du PLQ et du PQ, n'est manifestement pas prête de se terminer. Je m'en rends compte chaque jour!
Michel Gallay, Montréal


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