(Québec) Si le gouvernement Charest croyait se refaire une crédibilité en dépêchant l'Unité permanente anticorruption (UPAC) à Montréal, c'est raté. La crise qui sévit à l'autre bout de la 20 vient plutôt réanimer le besoin de mener une vaste commission d'enquête sur les allégations de corruption et de collusion dans l'industrie de la construction et dans l'octroi des contrats publics, partout au Québec.
Le ministre de la Sécurité publique, Robert Dutil, a eu un réflexe politique cette semaine. Devant les pratiques illégales d'espionnage menées par l'administration de Gérald Tremblay et devant les allégations de corruption, il s'est empressé de mandater son embryonnaire Unité permanente anticorruption pour faire la lumière.
Le hic? On aurait souhaité que le gouvernement libéral soit toujours aussi à l'écoute de l'inquiétude du public et aussi prompt à mettre de l'ordre dans sa cour que dans celle des autres.
À tort ou à raison, son zèle apparaît aujourd'hui suspect. On s'étonne aussi que l'unité qui doit faire frémir les délinquants et réduire leur appétit de fonds publics ait besoin d'un signal du ministre de la Sécurité publique pour s'activer.
En début de semaine, le ministre Dutil a dit être profondément inquiet de voir dans les journaux et à la télévision ce qui se passe à Montréal. D'où le recours à l'UPAC. « Nous ne pouvons pas tolérer, sur la base d'allégations, l'affaiblissement et la remise en question d'une institution comme la Ville de Montréal», a fait valoir le ministre.
Comme si le Québec tout entier ne vivait pas une crise de confiance depuis plusieurs mois! Faut-il rappeler que des soupçons de corruption, de collusion et d'emprise du crime organisé circulent depuis deux ans dans les journaux, à la télévision et à l'Assemblée nationale et que les libéraux s'y sont d'abord attaqués par doses homéopathiques? La fameuse UPAC dont ils ont annoncé la création en février visait certes à mieux coordonner les efforts de tous, mais surtout à faire taire une fois pour toutes les voix exigeant la tenue d'une commission d'enquête indépendante.
En vain. Le calme a été de courte durée. Rien n'est réglé. Et pas besoin des échanges hostiles à l'Assemblée nationale entre libéraux et péquistes à propos de la firme de sécurité BCIA, pour tirer cette conclusion.
En voyant ce qui se passe à la Ville de Montréal, le public ne peut que présumer qu'il ne s'agit pas d'une exception. Trop de nouvelles troublantes ont fait la manchette depuis deux ans. Les villes de Montréal, de Laval, de Mascouche, de Terrebonne et de Saint-Jérôme ont été sur la sellette. L'octroi de contrats ou de permis du gouvernement du Québec a aussi soulevé des doutes.
Et une question hante sans cesse : un vaste système de collusion et de corruption s'est-il implanté au gouvernement et dans les municipalités du Québec pour favoriser les partis politiques et leurs amis, et flouer les contribuables? Existe-t-il au sein de l'appareil gouvernemental et dans diverses instances des personnes qui ferment volontairement les yeux sur des irrégularités? Nous revenons au point de départ avec les derniers événements à Montréal.
Il n'importe pas seulement de restaurer la confiance des Montréalais à l'égard de leur administration, mais aussi de restaurer la confiance de tous les Québécois à l'égard de leurs institutions.
Bien sûr, le gouvernement Charest continuera de s'opposer à la tenue d'une commission d'enquête, estimant avoir mis en place les meilleurs outils au monde pour contrer le crime organisé et la corruption, et faire régner le sens éthique. Malgré tout, force est de constater que les libéraux traînent le même boulet depuis deux ans et que la méfiance persiste.
Un zèle suspect
Si le gouvernement Charest croyait se refaire une crédibilité en dépêchant l'Unité permanente anticorruption (UPAC) à Montréal, c'est raté.
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