Trudeau en Inde: une mission économique qui a «très peu de substance»

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« On dirait une brochure de voyage du Lonely Planet payée par les contribuables. »

Le voyage de Justin Trudeau en Inde s’annonce déjà comme une déception sur le plan économique, s’entendent pour dire certains spécialistes.


«Il y a très peu de substance qui entoure ce voyage. On dirait une brochure de voyage du Lonely Planet payée par les contribuables», se désole Vivek Dehejia, professeur d’économie à l’Université Carleton d’Ottawa. Il n’a pas été possible de connaître mardi le coût projeté du voyage.


Au-delà des visites de lieux sacrés et des photos de famille en habits traditionnels, le premier ministre du Canada a peu de rencontres officielles de prévues durant les sept jours de voyage, ce qui fait dire à l’expert qu’aucune annonce majeure n’est à prévoir.


«Le Canada doit faire mieux. Les relations économiques entre les deux pays sont à un très bas niveau», a expliqué celui qui se trouve à Mumbai en marge de la visite.


En mode rattrapage


Avec 1,3 milliard d’habitants, un PIB de plus de 2200 milliards $ et une croissance d’environ 7 %, l’Inde est la septième plus grande économie de la planète, selon la Banque mondiale.


Pourtant, les échanges commerciaux entre les deux pays totalisent 8 milliards $ à l’heure actuelle. Ce chiffre équivaut à cinq jours de commerce entre le Canada et les États-Unis, observe le spécialiste de politique indienne de l’Université de Sherbrooke, Serge Granger.


«Il y a beaucoup de rattrapage à faire. L’Inde n’a jamais vraiment été prise au sérieux par le Canada», a expliqué le professeur.


Selon lui, le Canada arrive «les mains vides». «Certains Indiens perçoivent le voyage comme du maraudage électoral» pour séduire la communauté indo-canadienne, souligne M. Granger, ce qui explique en partie l’accueil froid réservé à Justin Trudeau.


Le premier ministre indien, Narendra Modi, n’était pas à l’aéroport pour l’arrivée de M. Trudeau. Il a plutôt délégué son ministre de l’Agriculture. M. Modi n’a pas non plus accompagné le premier ministre canadien dans ses déplacements dans sa région natale du Gujarat, comme il le fait parfois avec d’autres dignitaires.


Les deux politiciens se rencontreront vendredi, à Delhi.


Libre-échange au point mort


Le Canada a entamé en 2010, sous l’impulsion du gouvernement Harper, la négociation d’un traité de libre-échange avec l’Inde. Si le dossier n’avance pas, c’est notamment parce que le fédéral cherche en ce moment à promouvoir des accords assortis de valeurs progressistes et inclusives, comme le répète souvent Justin Trudeau.


«L’Inde ne veut pas se faire faire la morale», illustre l’expert en économie Vivek Dehejia.


Il y a un «fossé énorme» entre les deux pays, note quant à lui Serge Granger. Le professeur rappelle que l’Inde n’adoptera pas de sitôt des mesures fortes sur le travail des enfants, l’équité salariale ou la syndicalisation.


Au terme d’une journée de rencontres avec des chefs d’entreprise à Mumbai, Justin Trudeau a annoncé mardi des partenariats commerciaux d’une valeur de 1 milliard $ entre des compagnies indiennes et canadiennes.


L’essentiel de ces investissements partent du Canada vers l’Inde. En vertu de ces ententes, 250 millions $ seront investis au pays et permettront de créer plus de 5800 emplois, selon Ottawa.