Transparence trompeuse

L'affaire des CPE



(Québec) Accusé par l'opposition d'avoir accordé des permis de garderie à des donateurs du Parti libéral, le ministre de la Famille permettra aux deux associations de garderies publiques et privées de prendre connaissance des évaluations de chacun des 2000 projets présentés au ministère. Cette pseudo-transparence est insuffisante pour rassurer les contribuables et les parents qui utilisent les services de garde à 7 $ par jour.
Le gouvernement consacre plus de 1,5 milliard $ par année au système de garde composé de centres de la petite enfance (CPE) et de garderies privées. Les parents font confiance à ces garderies dont le programme éducatif, le personnel et les installations doivent répondre aux exigences fixées par le ministère.
Or, les observations du député péquiste Nicolas Girard laissent supposer que la qualité ne serait pas le seul critère pour adhérer au réseau subventionné. Une contribution au Parti libéral du Québec serait un atout et permettrait d'atténuer les faiblesses d'un projet.
Le député Girard a relevé que six garderies privées de la région des Laurentides, dont les présidents, vice-présidents ou administrateurs ont donné au PLQ, ont obtenu 319 des 464 places à 7 $, soit 70 % de celles-ci. Qui plus est, il relève que des garderies ayant décroché la note D ont néanmoins été autorisées à offrir des places supplémentaires.
Simple hasard? Peut-être. À moins que les fonds publics ne deviennent l'unique source de financement des partis politiques, ceux-ci doivent compter sur les contributions des citoyens. Le risque que des dons s'apparentent à un retour d'ascenseur est donc inévitable.
Dans le climat de suspicion et d'allégations de patronage qui règne au Québec et devant le refus du gouvernement de faire la lumière dans l'industrie de la construction, les prétentions de l'opposition sur le réseau des garderies soulèvent automatiquement un doute. Injustement peut-être, il est difficile de croire à un pur hasard.
Pour rassurer la population et tenter de faire taire l'opposition, le ministre Tony Tomassi permettra à l'Association des garderies privées du Québec et à l'Association des centres de la petite enfance d'examiner au ministère et à huis clos, les évaluations de tous les projets soumis en 2008. Ce geste, qui se veut d'ouverture et de transparence, est de la poudre aux yeux.
Le gouvernement transfère à deux associations dont il subventionne les membres la responsabilité de déterminer si le processus d'attribution des places à 7 $ a été bien suivi et n'a pas été influencé par une contribution au Parti libéral. En quelques heures, ces deux petites associations devront scruter le travail accompli par des dizaines de fonctionnaires en quelques mois, et dire ensuite aux Québécois si oui ou non ce sont les meilleurs projets de garderie qui ont été autorisés. Ce n'est pas leur rôle.
Le vérificateur général est plus crédible et mieux outillé pour déterminer si les règles établies au ministère favorisent une bonne utilisation des fonds publics, atteignent les objectifs de la politique familiale et sont scrupuleusement suivies. Le Vérificateur n'a pas scruté les activités du ministère de la Famille depuis 1998-1999. Il est temps de le faire.
Le financement des partis n'est cependant pas du ressort du Vérificateur. Il faut donc se tourner vers le Directeur général des élections (DGE). Or, le montant maximal de contribution ne semble pas avoir été dépassé et rien ne permet de douter de la qualité d'électeur des donateurs. Ont-ils été obligés de verser une contribution? Pas facile à prouver.
Le projet de loi 78 déposé récemment par les libéraux prévoit qu'une contribution doit être faite sans compensation ni contrepartie. Bien peu pour aider dans l'avenir le DGE à départager ce qui est vraiment le fruit du hasard. D'où l'importance de l'éthique d'un parti et d'un gouvernement.


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