Garderies: le vérificateur général enquête

L'opposition accentue ses attaques contre Tony Tomassi, qui refuse de répondre

L'affaire des CPE


Robert Dutrisac - Québec — Tandis que le ministre de la Famille, Tony Tomassi, est assiégé par l'opposition officielle pendant l'étude des crédits de son ministère, le vérificateur général du Québec, Renaud Lachance, confirme qu'il s'apprête à entreprendre des «travaux préliminaires» en vue de procéder à une enquête sur les services de garde.
Renaud Lachance, qui participait à une conférence de presse aux côtés du nouveau commissaire au développement durable, Jean Cinq-Mars, a révélé hier qu'il avait fait parvenir au ministère il y a deux semaines une lettre pour annoncer qu'il fera des travaux préliminaires en vue de déterminer s'il y a un «potentiel de vérification» et, si tel est le cas, définir quel serait l'objet de la vérification. «C'est des procédures standards, a souligné Renaud Lachance. Lorsqu'on va dans un ministère, on envoie une lettre annonçant les travaux préliminaires. Dans cette lettre-là, on regarde l'ensemble des activités.»
Le vérificateur général a soutenu qu'il aurait indiqué son intention de procéder à ces travaux même en l'absence de la controverse politique qui entoure l'attribution des places en garderie. «J'ai envoyé cette lettre pour deux raisons. La première raison, c'est que c'est un ministère au budget important — plus de deux milliards de dollars. Et ça fait plus de dix ans qu'on n'a pas conduit de vérification dans leur ministère.»
Malgré toute la délicatesse que M. Lachance y met, le vérificateur général avait tout de même sourcillé le mois dernier lorsque des allégations avaient surgi concernant l'existence d'un marché de revente de permis de garderies privées, ce que le Parti québécois avait qualifié de «racket». Le vérificateur général peut se donner lui-même un mandat d'enquête s'il croit que des accrocs présumés dans la gestion des fonds publics doivent être examinés. Il y a un peu plus d'un mois, sa porte-parole, Raymonde Côté-Tremblay, avait souligné à La Presse le nombre important de présumées irrégularités qui circulent quant à l'attribution de places subventionnées à des garderies privées. «Ça mérite qu'on évalue la pertinence de faire un mandat de vérification ou pas», avait-elle dit.
Échanges houleux
Lors de la période de questions à l'Assemblée nationale, Tony Tomassi a encore été la cible d'attaques de la part du député de Gouin et critique de l'opposition officielle en matière de services de garde, Nicolas Girard. Reprenant une information diffusée sur le réseau TVA, le député a demandé au ministre si c'était «encore le fruit du hasard» que l'entreprise Garnier Construction, qui appartient à un de ses amis et donateurs à la caisse du Parti libéral, Joe Borsellino, ait réalisé des travaux pour une des garderies de Josephine et Loredana Primiani, deux ex-membres de la direction de Lafontaine, la circonscription que représente M. Tomassi. Les deux militants ont obtenu 178 places pour trois garderies depuis 2003.
Le ministre a répondu que contrairement aux centres de la petite enfance (CPE), les coûts de construction d'une garderie privée sont à la charge exclusive de son propriétaire. Un CPE, qui est une organisation sans but lucratif, doit procéder par appel d'offres puisque c'est l'État qui assume le coût des immobilisations; par contre, le propriétaire d'une garderie privée peut choisir l'entrepreneur qu'il veut.
Mais ce n'était là qu'un hors-d'oeuvre pour Nicolas Girard.
Durant l'étude des crédits du ministère qui a suivi, le député a répété à plusieurs reprises la même question: «Est-ce que le Groupe Genco ou une autre entreprise apparentée, qui appartient à la famille du ministre, a réalisé des travaux de construction ou de rénovation dans des garderies?» Sans obtenir de réponse. Le ministre s'est contenté de répéter ce qu'il avait dit pendant la période de questions. «Même réponse», a-t-il répliqué chaque fois que le député péquiste revenait à la charge. L'étude des crédits fut particulièrement houleuse: outrée, la députée de Taschereau, Agnès Maltais, s'est indignée du fait que la sous-ministre remette un document au whip libéral, Pierre Moreau, sans que l'opposition puisse en obtenir copie.
Dans la déclaration d'intérêts que tout ministre doit remettre au premier ministre, Tony Tomassi affirme qu'il est propriétaire d'une société immobilière, le Groupe Immobiliare-Genco inc. Il a précisé hier que cette entreprise n'était aucunement active dans le domaine de la construction.
Son père, Donato, est actionnaire majoritaire de 9057-8808 Québec inc., ou Groupe Genco, dont les activités décrites dans le registre des entreprises sont: entrepreneur général, restauration après sinistre. Une autre entreprise, dont Dino Tomassi est actionnaire majoritaire, Les Entreprises de construction Genco, est active dans la construction, selon le registre.
Or, selon les vérifications faites auprès de la Régie du bâtiment du Québec et de la Commission de la construction du Québec, ces deux entreprises n'ont pas de permis d'entrepreneur et ne sont pas actives dans le domaine. Dans le cas du Groupe Genco, il n'a plus de permis d'entrepreneur depuis août 2005.


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