Retour sur une votation

« le problème de fond n'est pas plus le minaret que la burqa : c’est celui de l'immigration massive », et a précisé qu’il ne menait « pas de croisade contre les musulmans »

FRANCE - débat sur l'identité nationale


Éditorial - Le récent référendum suisse sur les minarets a été l’occasion, ces derniers dix jours, d’un nombre incalculable de commentaires et de prises de positions, aussi affligeantes, pour la plupart, les unes que les autres, qu’elles soient issues des milieux qui se sont scandalisés ou qui se sont réjouis du résultat de cette consultation populaire.
Du côté des « anti » deux choses m’ont frappé : la haine de la démocratie et l’hypocrisie.
La haine de la démocratie, et donc du peuple, la journaliste Agathe Duparc l’a illustrée, on ne peut mieux, dans Le Monde du 4 décembre. Ses questions posées à Micheline Calmy-Rey, ministre des Affaires étrangères de la Confédération, reprenaient servilement les arguments des Cohn-Bendit, Mamère et consorts, à savoir que le vote anti-minaret révèle une faille dans le modèle référendaire helvétique (s’il s’était agit d’une votation sur la dépénalisation des drogues douces les mêmes auraient applaudi…), que sur des « questions aussi émotionnelles » il faudrait empêcher les votations populaires, qu’il faut que les Suisses revotent (jusqu’à ce qu’ils votent « comme il faut »..), etc. Venant d’un journal et de politiques qui n’ont, habituellement, que le respect de la démocratie et des grands principes à la bouche, il y a là de quoi sourire… de mépris !
Mais ce n’est pas tout, il y a peut être encore pire, à savoir l’hypocrisie. Il n’aura échappé à personne que le président du CRIF, Richard Prasquier, « au nom de la communauté juive de France », a fait part de « sa forte désapprobation » et de « son inquiétude » au lendemain du référendum. Gilles Bernheim, le « grand rabbin de France », a abondé dans son sens se déclarant « résolument contre » le résultat de la votation qu’il considère comme « une décision injuste ». Les organisations juives européennes, dont la Conférence des rabbins européens, leur ont emboîté le pas déclarant ce vote populaire « injustifiable »… Quant à l’ancien ambassadeur israélien en Suisse Itshak Meir il a choisi Aroutz Sheva (l’agence de presse de la droite sioniste la plus radicale) pour déclarer que « les juifs doivent s’inquiéter » de cette décision…
Or aucun de ces éminents représentants de la communauté hébraïque ne s’est inquiété ni ému de la « loi anti-minarets » qui était au même moment discutée à la Knesset et sur laquelle les grand médias occidentaux sont restés très discrets. De même, aucun de ces éminents représentants de la communauté hébraïque ne s’est inquiété ni ému de la réaction de la « rue juive » française qui, elle, n’a pas cachée sa joie lors du résultat de la votation suisse. C’est en effet sur les sites les plus favorables à Israël que l’on a trouvé les articles les plus dithyrambiques concernant cette « victoire contre l’Eurabia » (la prime revenant sans doute à Drzz.info, qui n’est pas un site anodin car il compte Pierre-André Taguieff et Bat Y’eor parmi ses « consultants » et il s’est félicité, il y a peu, qu’un de ceux-ci ait été honoré par … le Mossad !) Alors hypocrisie et double langage ? Incontestablement.
Du côté des « pour », c’est surtout l’irréalisme qui m’a frappé. Le vote suisse a été l’occasion de sondages qui ont montré que l’opinion publique européenne penchait globalement dans le même sens et, pour ne citer que la France, que 41 % de nos concitoyens étaient même hostiles à la construction de mosquées. De là à conclure que la « reconquête » était proche et que l’islamophobie allait être le graal électoral, il n’y avait qu’un pas, que beaucoup ont franchi. Cela sans prendre en compte les raisons extrêmement diverses générant une hostilité à l’islam, raisons qui sont d’ailleurs parfois les mêmes que celles qui génèrent une hostilité vis-à-vis du mouvement national. L’inquiétude face à l’islam ne recoupe que très partiellement la volonté de défendre sa nation ou le sens de l’identité nationale et on sait, par différentes études, qu’au moment du vote, l’hostilité à la religion mahométane n’influe sur le choix électoral fondamental que de manière marginale et que le potentiel électoral des partis essentiellement anti-musulmans n’est estimé qu’à 2 à 3 %…
Bruno Gollnisch a bien perçu ce problème lui qui, tout en se félicitant du vote suisse, a rappelé que « le problème de fond n'est pas plus le minaret que la burqa : c’est celui de l'immigration massive », et a précisé qu’il ne menait « pas de croisade contre les musulmans ». Marine Le Pen pour sa part a parfaitement senti le piège en orientant le combat du Front national non pas dans la lutte contre l’islam, mais dans l’opposition à ses manifestations publiques inacceptables et dans la défense de la laïcité.
Il reste que le référendum suisse aura au moins eu l’avantage d’entraîner une libération de la parole et une prise de conscience. Le débat n’est pas clos, à mon sens il débute juste, et les réponses idéologiques, stratégiques et tactiques qu’il conviendra d’y apporter ne pourront mûrir que quand le calme sera revenu dans les esprits.


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