Remaniement, renouvellement: idées usées

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Les libéraux en panique

Promettre le « renouvellement », le « changement », c’est sans doute l’idée la plus vieille en démocratie.


Tous les camps politiques la reprennent toujours à différents degrés. C’est à l’équipe qui sera la plus crédible pour porter cet espoir consubstantiel (si vous permettez un mot du jour) à nos insatiables démocraties.


Transformation


Ainsi, Philippe Couillard a déjà annoncé il y a deux semaines qu’il amorçait une phase de « transformation ». Il a commencé par congédier son directeur de cabinet Jean-Louis Dufresne. Le chef libéral aurait bien pu attendre après la défaite dans Louis-Hébert, mais son caucus ne lui a pas trop donné le choix : une fronde s’organisait en son sein ! Dans la semaine qui vient, le premier ministre sera presque contraint d’abattre une de ses dernières cartes lui permettant de donner l’impression d’un renouvellement : remanier son cabinet.


L’exercice ne plaît pas particulièrement à M. Couillard : « Ces choix ne sont jamais faciles pour un premier ministre, et tous mes prédécesseurs vous diront qu’une journée comme celle d’hier est à la fois exaltante et difficile », confiait-il lors du dernier exercice du type, le 28 janvier 2016. Comme à l’époque, il sait que plusieurs de ses 68 députés s’imaginent très bien dans une limousine.


Le remaniement se fera donc en partie pour des raisons internes, pour calmer une certaine grogne.


Combattre l’usure


Aux ambitieux déçus, M. Couillard rappellera peut-être la formule qu’il avait utilisée lors de la formation de son premier conseil, en 2014 : « Être ministre est certainement un honneur, mais ce n’est pas une récompense : c’est une exigence ; c’est un devoir d’État. » Gageons qu’il aura peu de succès...


La raison principale du remaniement ? Combattre l’usure prématurée de ce gouvernement, dont plusieurs membres étaient déjà dans le paysage à l’ère Charest.


En fait, l’idée même d’un renouvellement de l’équipe Couillard a quelque chose d’usé. Lors du remaniement précédent, en janvier 2016, M. Couillard parlait déjà d’une équipe ministérielle « dynamique, compétente, expérimentée, renouvelée ».


À ses yeux, le remaniement marquait « un nouvel élan ». La rigueur budgétaire, c’était terminé. « Nous avons passé le cap qui donne accès à des eaux plus tranquilles. »


Les eaux ministérielles n’ont rien eu de tranquille depuis toutefois, bouleversées qu’elles furent par de nombreux ajustements : malade, Pierre Moreau s’absenta un an ; Sébastien Proulx le remplaça ; Hélène David passa de la culture à l’enseignement supérieur ; Luc Fortin la remplaça à la culture ; Jacques Daoust démissionna avant de quitter ce monde l’été dernier ; Sam Hamad fut expulsé, remplacé par Leitao, puis par Moreau ; on suspendit Pierre Paradis, que Laurent Lessard remplaça ; depuis, ce dernier trouve ses deux maroquins bien lourds.


À un an des élections, il sera ardu ne serait-ce que de donner l’illusion d’un renouvellement.


Les principaux membres du conseil des ministres sont quasiment inamovibles. Gaétan Barrette répète sur toutes les tribunes qu’il souhaite conserver la Santé.


Avec les surplus budgétaires à venir, M. Couillard a besoin de celui qui incarne la bonne gestion, Carlos Leitao, pour rappeler cette authentique bonne nouvelle (au moins sur le plan fiscal).


Pour le reste, faire monter de nouveaux visages risque de donner l’impression de mettre du vin nouveau dans de vieilles « outres ».


Ce sera forcément un renouvellement éphémère, d’abord puisque le bateau perdra des matelots avant le prochain scrutin. De plus, à l’été 2018, les priorités de l’État seront reléguées bien loin après les urgences électorales.


Une période où l’on nous promettra, le pari est facile, d’autres « nouveaux renouvellements ».


Le carnet de la semaine


Éloquente recrue



Simon Clark/Agence QMI


Genevieve Guilbault


La politique est un art du langage et avec l’élection de la caquiste Geneviève Guilbault dans Louis-Hébert, l’Assemblée nationale s’enrichit en quelque sorte d’une artiste. « Je pense que l'attitude de M. Couillard par rapport à cette commission-là et par rapport aux questions d'immigration et identitaires en général est indûment opiniâtre et fermée », a-t-elle par exemple déclaré avec aplomb lors de sa première conférence de presse au parlement. « Indûment opiniâtre » : voilà le signe d’un vocabulaire recherché et précis, ce qui n’est pas pour déplaire à votre serviteur, alias #mononc101.


Note à la nouvelle GG



Photo AFP


Julie Payette


Formidable rappel à Julie Payette, la nouvelle gouverneure générale du Dominion (dûment installée cette semaine dans le faste monarchique) de la part du sociologue Joseph-Yvon Thériault, de l’UQAM, sur Facebook : « Je viens de vous entendre dire (vous l’aviez déjà dit) que de là-haut, dans l’espace, lorsqu’on regarde la Terre, il n’y a pas de frontières. Effectivement à cette hauteur, la Terre est une grosse roche, on n’y voit pas la vie et la culture. C’est la vie et la culture qui créent les frontières et produisent ce que la Terre a d’original. Bienvenue sur terre ! »


Bonnardellerie



Photo d'archives, Simon Clark


Francois Bonnardel


« Ce sont des faits factuels ! » a lancé, outré, le leader caquiste François Bonnardel, dans une tirade par laquelle il se portait à la défense de son collègue Simon Jolin-Barrette, que la ministre Rita de Santis avait qualifié de « malhonnête ». Des « faits factuels », quel réel pléonasme pléonastique ! Il y a longtemps que le député de Granby nous avait gratifiés d’une telle bonnardellerie. On l’en remercie !