L’une des grandes utilités du recensement détaillé obligatoire, qui a fait de Statistique Canada une des agences les plus respectées au monde, demeure la planification des politiques sociales et économiques. On pouvait s’appuyer sur du solide et du concret pour expliquer le bien-fondé desdites politiques. Vous n’avez plus de données socio-économiques robustes pour planifier vos politiques publiques? Racontez n’importe quoi pour les justifier. Alors oui: qui ne recense, ment.
Avec la disparition de la méthode actuelle, finie la science derrière les décisions de divers paliers de gouvernement qui avaient accès à ces données confidentielles. J’insiste sur la confidentialité puisque la bande à Harper tente de justifier la décision de rendre le formulaire plus court et volontaire par une soi-disant « invasion de la vie privée ». Ils savent pourtant très bien qu’il ne s’est jamais produit une seule fuite de renseignements personnels provenant du recensement. Même les services secrets canadiens n’y ont pas accès de par la loi.
Le spirituel Maxime Bernier avait même prétendu avoir reçu 1000 plaintes par jour du temps où il était ministre, avant d’égarer certains dossiers top secret – ça, c’est mauvais pour la confidentialité M. Bernier. Vérification faite: seulement 3 plaintes ont été reçues au cours des deux derniers recensements (2001 et 2006) et aucune n’a été jugée recevable. Outre les propos de Maxime Bernier, on a même tenté de nous faire croire que Statistique Canada endossait le plan du gouvernement. Réponse du statisticien en chef de l’institution: il a démissionné pour marquer son profond désaccord. Ce n’est certainement pas la vérité qui empêchera cette tonitruante équipe de bien nous gouverner!
Précisons qu’un recensement obligatoire ne signifie pas les travaux forcés non plus. Envoyé à 20% des foyers tous les cinq ans, il fait donc en sorte qu’un foyer le remplisse une fois tous les 25 ans en moyenne. Une heure, deux ou trois fois dans sa vie, ne représente pas un coût très élevé si cela permet à une myriade d’organismes de mieux faire leur travail économique, social ou législatif dont nous bénéficions tous. Et contrairement à la légende urbaine, jamais personne n’a fait de prison pour avoir refusé de remplir le questionnaire.
On nous dit que le recensement sera maintenant rempli par plus de foyers, mais sur une base volontaire. Cette méthode amènera de forts biais dans les réponses, obtenues de groupes trop semblables (les volontaires) pour être représentatives de toute la société. Par exemple, les gens très riches et les plus démunis seront sans doute peu nombreux à retourner le formulaire. Et cet envoi plus massif, bien que moins fiable scientifiquement, coûtera 30 millions de dollars de plus.
En fait, depuis l’annonce de cette décision des Conservateurs, le monde des affaires, les syndicats, des chercheurs, des municipalités et des groupes communautaires, entre autres, ont fait valoir que c’était une erreur de laisser s’éteindre une base de données aussi cruciale. Si tant de gens issus de milieux souvent antagonistes se sont retrouvés sur cette question, il doit y avoir un brin de vérité quelque part. Pour les défenseurs du fait francophone en Amérique, il est également catastrophique de savoir que le meilleur outil de suivi de l’évolution des groupes linguistiques ne sera plus aussi complet. Au Québec comme hors Québec, on ne pourra plus suivre le recul du français sur son propre territoire.
Ailleurs dans le monde, on vise à améliorer la qualité des recensements devant leur évidente utilité scientifique et socio-économique. Pendant ce temps, le gouvernement canadien nous propose d’affaiblir nos connaissances de notre société et de ses mutations. Il serait temps pour le Québec de demander à ce qu’on lui remette les ressources financières correspondantes afin qu’il effectue lui-même le recensement sur son territoire.
Et dire que les conservateurs avaient fait de l'imputabilité et de la transparence leur grande promesse en arrivant au pouvoir. Leur bâillonnement des médias et leur projet de recensement se rapprochent plutôt de l’opacité. Mais quand on y pense, on ne peut pas se surprendre que ce gouvernement ne réalise pas l’utilité pour la science d’un recensement détaillé et obligatoire, alors que plusieurs des ministres fédéraux sont créationnistes. C’est vrai qu’en les regardant, on ne peut pas croire à l’évolution.
Jean-Martin Aussant
Député de Nicolet-Yamaska
Qui ne recense, ment
Recensement 2011
Jean-Martin Aussant17 articles
Député de Nicolet-Yamaska
7 juin 2011
_ Conférence de presse de M. Jean-Martin Aussant, député de Nicolet-Yamaska
Sujet : [Le point sur son avenir politique->http://www.assnat.qc.ca/fr/video-audio/AudioVideo-36653.html]
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Député de Nicolet-Yamaska
7 juin 2011
_ Conférence de presse de M. Jean-Martin Aussant, député de Nicolet-Yamaska
Sujet : [Le point sur son avenir politique->http://www.assnat.qc.ca/fr/video-audio/AudioVideo-36653.html]
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1 commentaire
Gilles Verrier Répondre
27 septembre 2010Un Office de la statistique du Québec pourrait supplier.
Non ? Avons-nous à ce point besoin du Canada ? Nous faut-il connaître précisément le nombre d'Innus sans statut de la Terre de Baffin. Merci de nous expliquer.
GV