SRC - Christiane Charette

Quand l'excitée de la SRC se dégonfle

Médias - information, concentration, reproduction

Ai-je vraiment vu le visage hideux de la censure?
Mardi matin, de bonne heure, je pris la route en direction de Matane, là où j’étais attendu chez Radio-Canada. J’habite Sainte-Anne-des-Monts en Gaspésie, et pour me rendre au studio matanais de cette société d’État, je devais compter une bonne heure. La raison de ce voyage : la veille, les recherchistes de l’émission de Christiane Charette m’avaient invité à participer à l’émission du lendemain pour parler de mon nouveau livre intitulé Quebec bashing. Morceaux d’anthologie. Du Lac Meech à la délirante Jan Wong. Une bonne occasion de diffuser le message indépendantiste, me disais-je alors.
Connaissant Radio-Canada et son mandat lié à l’unité canadienne, je dois dire que je fus quelque peu surpris par cette invitation. Je me disais que le contenu de mon livre qui plongeait le nez du Canada anglais dans ses propres turpitudes à l’égard du Québec n’était rien pour plaire à la haute direction de ce média qui verse plus souvent qu’autrement dans la propagande fédéraliste. Naïf que je suis, je me dis alors que les temps étaient peut-être en train de changer, que l’organisation du Québécois devenait moins contournable qu’auparavant, d'où l'invitation que je reçus. Quel naïf j’étais!
Arrivé au studio de Radio-Canada, tout se passe bien. Les gens sont affables et heureux de nous accueillir, moi et ma copine. On me conduit prestement dans une salle d’où on me mettra très bientôt en contact avec le studio de Montréal. La technicienne de Matane me fait faire les tests de son, elle m’explique le fonctionnement du casque d’écoute, etc. Tout va bien. C’est ensuite le tour des techniciens de Montréal de communiquer avec moi afin de vérifier que le son est bon. Tout est encore correct, tout fonctionne rondement. Montréal me dit alors que j’entrerai en onde à 9h08 environ. Il est alors 8h55. Je me prépare, répète mes formules les plus percutantes dans ma tête, bref, je suis prêt à rugir.
J’entends dans mon casque d’écoute que le thème de l’émission est enfin lancé. J’entends Christiane Charrette présenter le contenu de son émission. Je m’aperçois alors que je ne commencerai pas l’émission comme prévu. Pas grave, que je me suis dit. L’important est de défendre les positions indépendantistes au cours de cette émission, et ce, peu importe quand je pourrai le faire. Plus Charette parle pour toujours mieux présenter son émission, et moins ma présence se fait sentir. Je vois ma copine dans l’autre studio qui commence à remuer et qui questionne le réalisateur matanais. Je trouve ça un peu inquiétant. La présentation de l’émission se termine et -Ô surprise-, je n’y figure pas. Ma copine demande au même réalisateur s’il est possible que j’aie été cavalièrement retiré de l’émission. Celui-ci lui répond que non, que jamais une telle chose n’ait arrivé, que Christiane Charette s’apprête fort probablement à dire à ses auditeurs que, pour commencer l’émission, elle reçoit Patrick Bourgeois. Cela ne se produit pas. C’est plutôt le téléphone qui sonne alors dans l’autre studio. Ce n’est décidément pas bon signe, c’est le moins que l’on puisse dire.
Le réalisateur matanais me fait alors signe, à travers la vitre, de venir le rejoindre dans l’autre studio. J’abandonne mon casque d’écoute, et m’exécute. Une fois rendu de l’autre côté de la vitre, il me dit que le réalisateur de l’émission de Christiane Charette, Bruno Guglielimineti, est au téléphone et il veut me parler. Je prends le combiné. Celui-ci me dit alors : « M. Bourgeois, on ne peut pas vous passer, on a trop de matériel dans l’émission d’aujourd’hui (NDLR : ils ne pouvaient pas s’en rendre compte la veille, lors de la réunion de production, et non pas à 9h03 le matin même de l’émission?). « Votre livre touche un sujet fort complexe, c’est très dense, et on ne croit pas que seulement sept minutes pour le ploguer soit suffisant ». En lieu et place d’une entrevue en cette matinée, Guglielimineti me propose autre chose : « Le mieux, ce serait de faire venir d’autres personnes pour discuter avec vous du contenu de votre livre. Mais on aurait besoin de temps pour trouver des lecteurs prêts à se prêter à l’exercice ». Je lui réponds -parce que j’avais bien compris qu’ils n’inviteraient pas Pierre Falardeau pour venir corroborer mes dires- : « Coudonc, est-ce un piège à cons que vous me tendez là? ». Guglielimineti de me répondre : « Bien sûr que non, ce n’est pas le genre de la maison ». « On n’est jamais trop prudent », lui ai-je alors répliqué. Avant de raccrocher, le réalisateur montréalais me promet 75$ pour me dédommager pour mon déplacement, un cachet d’invité qu’il appelait ça.
Je raccroche, et je ne suis pas très content, c’est évident. C’est que j’avais bien compris que je venais de perdre mon tour, que Radio-Canada allait maintenant prétexter que personne n’a accepté de venir discuter de mon livre avec moi, à l’émission de Christiane Charette et que, dans ces circonstances, c’est bien dommage, mais je devrai oublier la « plogue » pour mon livre de séparatiste!!!
Je vois dans le visage des membres du personnel de Radio-Canada de Matane qu’ils sont éberlués. Ils n’en reviennent tout simplement pas du manque de respect dont je suis alors victime, et ils ne se gênent pas pour me le dire. La réceptionniste, quant à elle, est quasiment furieuse. « Ça ne se fait pas des affaires de même », m’a-t-elle dit. Et que dire de ma copine, elle dont les sentiments sont d’ordinaire, dans de telles circonstances, toujours fort tempérés : « J’espère que tu vas te battre! ». « Mais qu’est-ce que tu veux que j’y fasse? », lui ai-je alors dit. « Je ne peux quand même pas les forcer à m’interviewer, c’est eux qui contrôlent la criss de boîte, et nos dirigeants patentés du mouvement indépendantiste l’acceptent sans broncher. Ils trouvent ça normal qu’on soit ainsi exclu des ondes qu’on finance pourtant avec nos criss de taxes! ». C’est dans cet état d’esprit qu’on a quitté le studio matanais de Radio-Canada.
De retour à la maison, j’ai appelé mon fidèle conseiller René Boulanger, lui qui a toujours le don de me remonter le moral. Il m’a alors dit : « Patrick, tu déranges, tu les attaques et c’est normal que tu reçoives des coups. Ce qu’il faut faire maintenant, c’est trouver la meilleure façon d’embarrasser Radio-Canada avec cette affaire ». On parle et on jase afin d’identifier la meilleure stratégie, et finalement, Boulanger a une idée lumineuse, pour ne pas dire géniale. Il me la confie, me l’explique et me convainc dès lors. « J’endosse totalement ton plan mon René », que je lui ai alors dit. « Ça va péter en bordel si on réussit notre coup », ajoutai-je.
Il nous reste maintenant à tout préparer pour que notre plan réussisse avant de pouvoir vous en présenter les détails. Mais promis, on le fera. C’est ma blonde qui va être contente parce que oui, on va se battre, et pour vrai!
Patrick Bourgeois


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