"Qu'est-ce qu'on fête aujourd'hui ?"

Fête des Patriotes 2008


Et la journaliste demande: "Qu'est-ce qu'on fête aujourd'hui ?" Et
l'homme de répondre: "Les Patriotes." "Bravo" fait la journaliste....
"Et c'est qui les Patriotes ?" "J'le sais pas" de rétorquer l'interrogé.
La journaliste prend un malin plaisir à continuer son enquête avec chaque
fois le même résultat. À quelque part, ça fait mal et pour un prof
d'histoire ça fait encore bien plus mal.
Qui sont ces inconnus de Patriotes ? Pourquoi certaines personnes se
bouchent-elles le nez lorsqu'elles en entendent parler ? Pourquoi dit-on
qu'une telle fête est source de division ? La coupable, c'est l'ignorance
et souvent, elle est crasse.
Certains pensent que les Patriotes sont exclusivement reliés aux
francophones. Erreur. Dans le Parti patriote, on retrouvait aussi des
anglophones. Pensons à Wolfred Nelson, Robert Nelson, Thomas-Storrow
Brown, John Neilson. Pensons aussi à l'irlandais O'Callahan. Il serait
peut-être bon de mentionner que sauf John Neilson, il s'agissait souvent
des plus extrémistes. N'est-ce pas Wolfred Nelson qui a crié: "le temps
des discours est terminé, il est maintenant temps de faire fondre nos plats
et nos cuillers pour en faire des balles." Ceux qui pensent que l'aventure
patriote est un simple épisode de la lutte entre francophones et anglophones n'ont pas compris grand chose.
***
Les Patriotes luttaient pour la démocratie. La population avait le droit
de vote mais le pouvoir lui échappait. Il était exercé par une minorité de
grands commerçants et de parvenus sous la protection du gouverneur et de
son armée. Ce gouverneur nommé par Londres avait un droit de vie et de
mort sur toutes les lois votées par l'assemblée élue par le peuple. La
révolte patriote a été bien sûr une expression de frustration des
francophones mais elle fut aussi une lutte contre l'oppression, une lutte
pour établir la démocratie. Et on les a écrasés impitoyablement. Il y a eu
des morts, des exilés, des pendus. Est-ce que ce sont des motifs de honte
? Y a-t-il de quoi se boucher le nez ?
À cette époque, il y avait deux Canadas, le Bas majoritaire francophone et
le Haut presque exclusivement anglophone. En 1837, il y a eu également un
soulèvement dans le Haut-Canada. Pourquoi ? Pour avoir des institutions
démocratiques également. Il y a même eu des contacts entre les Réformistes
du Haut-Canada et les Patriotes du Bas-Canada parce qu'essentiellement,
leur combat était le même. Dans le Haut-Canada également, la révolte fut
écrasée dans le sang. Il y a eu des pendus et des exilés qui ont pris le
même bateau que nos Patriotes en direction de l'Australie.
***
S'il y a une fête que nous pourrions fêter en même temps que les
anglophones, c'est bien celle-là. Ce serait se rappeler notre très longue
quête pour l'obtention d'institutions démocratiques. Même Durham, dans son
célèbre rapport, donne raison à ceux qui réclamaient que les ministres
soient responsables devant les élus du peuple. L'Angleterre ne jugera pas
bon de donner suite à cette recommandation en 1840. Il faudra attendre
encore une peu. Au contraire, cette fête devrait unir anglophones et
francophone mais il semble qu'on ne veut pas partager avec nous même ce
qu'on peut avoir en commun.
Il y a de sérieuses lacunes dans l'enseignement de l'histoire chez nous.
On ne l'enseigne pas assez et elle est trop diluée avec d'autres choses.
C'est devenu une dérision d'avoir une devise comme la nôtre. Comme si ce
n'était pas assez, [il y a toute une école d'historiens qui travaillent à
occulter des repères importants de notre histoire->mot363] comme la Conquête,
l'Insurrection patriote, la Révolution tranquille. On est pas sorti de
l'auberge.
Désolant.

-- Envoi via le site Vigile.net (http://www.vigile.net/) --

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Gilles Ouimet66 articles

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Né à Mont-Laurier en 1947. Études primaires à cet endroit. Études classiques à Mont-Laurier et Hull entre 1961 et 1968. Diplômé en histoire de l’Université Laval en 1971. Enseignant à la polyvalente de Mont-Laurier entre 1971 et 2005. Directeur d’une troupe de théâtre amateur (Troupe Montserrat) depuis 2000. Écriture pour le théâtre, notamment une pièce à l’occasion du centenaire de Mont-Laurier en 1985 (Les Grands d’ici), une autre à l’occasion du 150e anniversaire du soulèvement des Patriotes (Le demi-Lys...et le Lion) en 1987 (prix du public lors du festival de théâtre amateur de Sherbrooke en 1988 et 2e prix au festival canadien de théâtre d’Halifax la même année). En préparation, une pièce sur Louis Riel (La dernière Nuit de Louis Riel). Membre fondateur de la Société d’histoire et de généalogie des Hautes-Laurentides. Retraité de l’enseignement depuis 2005.





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