Poussée de haine au pays, selon Statistique Canada

Le Québec n’est toutefois pas le foyer d’intolérance que certains décrivent parfois

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La preuve que le racisme systémique n'existe pas au Québec






Pour une seconde année consécutive, les crimes à caractère haineux — contre l’ethnie ou la religion d’autrui — sont en hausse au Canada. Mais malgré un certain discours dépeignant le Québec comme une terre hostile à la diversité, la province fait relativement bonne figure au palmarès de l’intolérance, aucune de ses villes ne faisant partie des dix où le taux d’incidents rapportés par la police est le plus élevé.


 

Selon Statistique Canada, le nombre de crimes haineux perpétrés au Canada et qualifiés comme tels par la police a augmenté de 5 % en 2015 par rapport à 2014, ou de 17 % par rapport à 2013, avec 1362 affaires criminelles contre 1295 en 2014 et 1167 l’année précédente. Il faut remonter à 2012 pour retrouver un total supérieur (1414 cas). Ce constat général cache cependant des nuances importantes : entre 2014 et 2015, les crimes motivés par la haine de l’orientation sexuelle ont diminué (-9 %), tandis que ceux motivés par la détestation de la religion ont augmenté (+9 %), et ceux visant une religion en particulier, l’islam, ont explosé (+61 %).


 

Il y a ainsi eu 159 incidents impliquant des musulmans en 2015 contre 99 en 2014, 65 en 2013 et 45 l’année d’avant. Inversement, les Juifs, qui ont longtemps fait les frais de cette vindicte gratuite, profitent d’une mini-accalmie alors que les cas les visant sont passés de 213 à 178 en 2015 (-16 %). En chiffres absolus, ce sont quand même eux qui font l’objet du plus grand nombre de cas de nature religieuse, prend le soin de rappeler le Conseil consultatif des relations juives et israéliennes.


 

Cette tendance à l’ostracisation du musulman se répercute dans les crimes à caractère ethnique. Certes, ce sont encore les Noirs qui font l’objet, en chiffres absolus, du plus grand nombre de crimes haineux fondés sur l’ethnie (224 cas en 2015, en légère baisse par rapport à l’année précédente). Mais les Arabes ou les ressortissants de l’Asie de l’Ouest ont subi une hausse importante d’infractions les visant : 92 cas contre 69 en 2014 (+33 %) et 48 en 2013 (+92 %).


 

Statistique Canada classe par ailleurs les 33 régions métropolitaines canadiennes comptant au moins 100 000 habitants en fonction de leur taux de crimes déclarés par la police. Sept des dix premières sont ontariennes, avec Thunder Bay en première place (taux de 22,3 crimes haineux par 100 000 habitants), Ottawa en cinquième (taux de 7,3) et Toronto en septième (taux de 4,9). Montréal, la première région métropolitaine québécoise du palmarès, arrive au onzième rang (taux de 4,2), tout juste devant Sherbrooke (taux de 4). La ville de Québec arrive en seizième place avec un taux de 3,5 crimes haineux par 100 000 habitants tandis que Gatineau, la ville soeur d’Ottawa, arrive au 19e rang avec un taux de 2,4. Il s’agit néanmoins d’une détérioration de la situation pour plusieurs villes québécoises dont les taux de crimes haineux étaient inférieurs en 2013 (Montréal était à 3, Québec à 2,4 et Gatineau à 1,5).


 

La porte-parole du Conseil canadien des femmes musulmanes (CCFM), Amira Elghawaby, met en garde contre la tentation de lire dans ces statistiques la preuve que les choses se portent mieux au Québec qu’ailleurs. L’analyse de Statistique Canada repose sur les crimes haineux déclarés par la police.


 

« Ces chiffres représentent les crimes haineux rapportés à la police que la police accepte de qualifier de crimes haineux. Or notre expérience démontre que ce n’est pas toujours clair ou évident, aux yeux de la police, qu’il s’agit d’un crime haineux », dit Mme Elghawaby. Elle soutient à titre d’exemple que la police n’avait pas qualifié comme tel le fait que quelqu’un avait déposé une tête de cochon ensanglantée devant le Centre culturel islamique de Québec en plein ramadan en juin 2016. Le Service de police de la Ville de Québec indique plutôt qu’aucun suspect n’a été appréhendé et que l’affaire a été classée. « Il n’y a pas assez d’éducation des policiers de première ligne pour bien comprendre ce qu’est un crime haineux. »


 

Sensibilisation


 

Inversement, il ne faut pas toujours considérer comme négatif le fait que les cas rapportés par la police soient en augmentation, reconnaît la porte-parole du CCFM. Thunder Bay est un cas type en la matière, elle qui trône en tête de palmarès depuis 2013. Oui, cette ville connaît un grand nombre de cas, qui visent les autochtones en particulier. « Mais il y a eu une campagne de sensibilisation publique [en 2012 et 2013] pour inciter les gens à dénoncer les crimes haineux, rappelle-t-elle. Alors, ce n’est pas nécessairement mauvais que le chiffre soit élevé, car il ne signifie pas nécessairement que cette ville est la pire. »


 

Mme Elghawaby, comme des représentants des communautés autochtones, noires et juives, ont demandé en conférence de presse que les forces policières soient obligées non seulement de transmettre leurs données à Statistique Canada, mais de les rendre publiques dans les communautés qu’elles desservent, et ce, rapidement, afin de préserver le lien de confiance. « À Toronto, les données de 2016 sont déjà publiées ! » illustre-t-elle.


 
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