Marois dans les câbles

Pacte électoral - gauche et souverainiste



Vous souvenez-vous de quoi parlaient les médias, il y a un an?
Des 33 mineurs chiliens? Oui, oui, bien sûr. Mais ici, au Québec?
Nous parlions de la commission Bastarache, qui commençait à peine ses audiences publiques, et des probables répercussions funestes sur le gouvernement Charest.
L'opposition péquiste se frottait les mains: le PQ était en tête dans les sondages (40% au général et 45% chez les francophones), et deux Québécois sur trois (66%!) souhaitaient le départ de Jean Charest.
Un an plus tard, M. Charest joue les commis voyageurs en Asie en suivant de loin, et probablement avec satisfaction, les déboires du Parti québécois et en répétant qu'il ne déclenchera pas d'élections hâtives cet automne, même si la situation lui est redevenue favorable.
Le premier ministre peut, en effet, rire dans sa barbe: depuis trois mois, son principal rival politique s'autodétruit, et l'opposition officielle est inscrite aux abonnés absents.
Pauline Marois a bien essayé de jouer son rôle de chef de l'opposition après l'effondrement d'une poutre sur l'autoroute Ville-Marie et, cette semaine, en plaidant pour un nouveau pont Champlain. Mais la crise au PQ occulte tout le reste et paralyse tant son parti que son caucus.
Comme si la dernière semaine n'avait pas été assez dure, un autre coup, direct celui-là, est venu hier du député démissionnaire Pierre Curzi. Après avoir dit à mon collègue Tommy Chouinard qu'il serait prêt à revenir au PQ s'il adoptait les recommandations formulées jeudi par le député Bernard Drainville, il a précisé, en entrevue au 98,5 FM, qu'il faudrait aussi que Pauline Marois s'en aille et qu'il serait prêt à se porter candidat pour la remplacer. Pauline Marois comptait déjà de nombreux détracteurs dans son parti; elle a maintenant un rival déclaré.
Il s'agit, à ce jour, de l'attaque la plus rude contre Mme Marois. Potentiellement la plus dommageable aussi puisque Pierre Curzi est l'une des figures les plus populaires du mouvement souverainiste, tant chez les «pressés» que chez les «pas pressés».
Dans l'état de panique actuel au PQ, certains pourraient être tentés de sacrifier une chef peu populaire et contestée dans son propre parti pour la remplacer par un chef relativement nouveau en politique, connu, charismatique et capable de ramener la paix dans la famille.
Plusieurs ont vu le rapport Drainville comme une nouvelle fronde contre Mme Marois parce qu'il remet en question sa stratégie référendaire. «Rapport Drainville. Belle idée. Beau pavé», a écrit hier le député Yves-François Blanchet sur Twitter.
Disons que la sortie de M. Drainville tombe particulièrement mal pour la chef du PQ.
Bernard Drainville, à qui on prête de grandes ambitions, affirme être loyal et dit vouloir travailler avec Pauline Marois, mais d'autres utilisent maintenant son rapport comme cheval de Troie, ce qui ne fait qu'aggraver la crise au PQ.
En gros, Pierre Curzi dit: «Le PQ doit changer, mais Pauline Marois est incapable d'imposer les changements nécessaires.»
Après cette sortie, le leadership de Mme Marois ne tient plus qu'à un fil. Il suffirait que deux ou trois députés la désavouent publiquement pour la pousser vers la sortie. On sait qu'il y a maintenant au moins un prétendant à sa succession.
D'autres pourraient se déclarer, mais des personnes proches de Gilles Duceppe m'ont joint cette semaine pour me dire que, contrairement à ce que j'ai écrit mercredi, l'ancien chef du Bloc ne «manoeuvre» pas dans le but de remplacer éventuellement Pauline Marois. M. Duceppe a bel et bien rencontré récemment les anciens chefs du PQ, mais ces entretiens n'avaient rien à voir, assure-t-on, avec la direction du PQ. On me dit même que M. Duceppe «n'est plus politicien depuis le 2 mai» - une information que le principal intéressé s'est toutefois bien gardé de rendre publique. Après la dégelée du Bloc, aux dernières élections, Gilles Duceppe a répété qu'il avait besoin de temps pour assimiler le choc et qu'il voulait prendre du recul, mais il n'a pas exclu un éventuel retour aux affaires. Idem lors d'entrevues radio récentes, notamment chez Dutrizac, au 98,5 FM.
Le populisme à la rescousse de la démocratie
La désaffection de la population pour la politique a ceci de bon qu'elle force les politiciens à chercher des solutions... Ce qui ne veut toutefois pas dire que toutes leurs idées soient bonnes!
Ironiquement, certains se tournent vers le populisme pour trouver des remèdes à une démocratie malade. C'est le cas de Bernard Drainville, qui nous propose de multiplier les référendums sur tous les sujets si une minorité de citoyens le réclament, et une forme de recall nouveau genre qui permettrait de congédier un député avant la fin de son mandat.
L'idée frivole de la semaine revient toutefois à François Legault, qui promet, s'il forme un jour le gouvernement, de se faire hara-kiri après un mandat de cinq ans. Donc, après 1825 jours, le gouvernement démissionne en bloc (c'est du moins ce que je comprends de cette étrange idée) et tout le monde quitte Québec. Limiter le mandat des élus, je veux bien, mais apposer une date de péremption sur un gouvernement, voilà un gage d'instabilité assurée. Et puis cinq ans, c'est court.
Je veux bien que l'expression à la mode soit «faire de la politique autrement», mais ça, c'est plutôt «n'importe quoi pour faire différent».
Pour joindre notre chroniqueur: vincent.marissal@lapresse.ca


Laissez un commentaire



Aucun commentaire trouvé