Québec -- L'équipe de candidats «à la Lévesque» que le chef péquiste André Boisclair a promis de constituer pourrait compter dans ses rangs Lisette Lapointe, épouse de l'ancien premier ministre Jacques Parizeau, indépendantiste de la première heure et ancienne attachée de presse à l'époque des premiers mandats du PQ.
Mme Lapointe a confirmé au Devoir hier qu'elle songe à faire le saut en politique active. «C'est quelque chose qui me plairait beaucoup. Il y a beaucoup de choses que j'ai aimé faire en politique. Et je pense que je pourrais encore servir les gens», a-t-elle affirmé spontanément. Elle a toutefois insisté pour dire qu'«aucune décision finale n'était prise», qu'elle «n'avait rien à annoncer», qu'elle n'en était qu'au stade de «regarder» et «d'analyser», mais elle a ajouté ceci : «M'occuper d'un comté, ce serait pour moi une affaire formidable.»
Mme Lapointe, qui a 63 ans, estime au reste que la période actuelle se prête bien à une candidature. «À l'époque de M. Bouchard ou de M. Landry, ce n'était pas envisageable, mais maintenant, avec le nouveau départ au Parti québécois, ce l'est.» Au surplus, elle dit «croire profondément en André Boisclair», dont elle a soutenu la candidature avec énergie lors de la course à la chefferie de l'automne 2005. Dans une lettre ouverte intitulée [«Tiens bon, André !»->www.vigile.net/05-11/5.html#5], qu'elle avait publiée dans nos pages le 5 novembre 2005, soit dix jours avant la fin de la course, elle s'était portée à la défense du candidat Boisclair : «J'avais jusqu'à maintenant gardé le silence sur ma préférence, écrivait-elle. [...] Mais aujourd'hui, avec [...] cette campagne de dénigrement qui fait rage à ton endroit, je tiens à te manifester ouvertement et publiquement mon appui, ma solidarité, ma confiance. Je le fais à titre personnel et en mon seul nom.» Depuis lors, Mme Lapointe s'est faite très visible lors des grands moments de l'accession de M. Boisclair au poste de chef de l'opposition, notamment le soir de sa victoire à Québec, le 15 novembre 2005, où elle était montée sur scène aux côtés du vainqueur. Aussi, le 14 août dernier, lorsque M. Boisclair a été élu dans Pointe-aux-Trembles, Mme Lapointe était présente, aux côtés de son mari, Jacques Parizeau.
Ce dernier s'est d'ailleurs considérablement rapproché du nouveau chef depuis ce jour de juin 2005 où il avait affirmé, dans une entrevue à L'Annuaire du Québec, que le nouveau programme péquiste était plein de «conneries» et qu'il ne comprenait pas le respect qu'André Boisclair, alors candidat à la direction, vouait à ce document : «Je ne sais pas s'il l'a lu, mais il a "le plus grand respect". Ça aide, ça !», s'était esclaffé M. Parizeau à l'époque. Par la suite, pendant la course, l'ancien premier ministre s'en était tenu à un strict devoir de réserve. Après l'élection de M. Boisclair, à l'Université Laval, en février 2006, M. Parizeau l'avait appelé «mon chef» et était même allé jusqu'à affirmer, à propos des débuts d'André Boisclair à la tête du PQ : «En un certain sens, il fait bien mieux que moi.»
Quel comté ?
Quant à Mme Lapointe, elle a beau vouloir porter les couleurs du Parti québécois, mais dans quelle circonscription ? «Heureusement pour le parti, beaucoup de bons comtés sont occupés», a-t-elle fait remarquer hier. Cela complique cependant les choses pour tous les aspirants ainsi que pour les dirigeants de la formation politique. Pourquoi pas Deux-Montagnes, comté adjacent à Mirabel, dont la députée péquiste depuis 1994, Hélène Robert, a annoncé qu'elle se retirait ? Mme Lapointe a confirmé avoir rencontré la députée sortante en juin dernier pour lui «demander conseil». Selon nos sources, Mme Robert souhaiterait que dans la lutte à sa succession, il y ait une candidature féminine. Pour l'instant, seuls deux candidats se sont pointés dans Deux-Montagnes : Benoît Charette, de la Fondation du cardinal Léger, et Daniel Goyer, de l'UPA, qu'on décrit comme un fidèle de M. Parizeau. Le président de l'exécutif péquiste de Deux-Montagnes, René Tousignant, soutient du reste qu'aucune approche n'a été faite auprès de lui par Mme Lapointe jusqu'à maintenant.
Refusant d'épiloguer sur les discussions qu'elle a pu avoir avec André Boisclair, Mme Lapointe a conclu : «S'il a une place pour moi, si les gens veulent me faire confiance, j'y songerais très certainement.»
Recrutement
Par ailleurs, selon nos sources, le chef péquiste et son équipe sont à pied d'oeuvre pour remplir l'ambitieuse promesse de former «une équipe aussi talentueuse que celle que René Lévesque a dirigée».
La tâche serait plutôt ardue pour le moment, alors que le rendez-vous électoral ne semble plus être pour l'automne. «Mais les sondages récents nous ont aidés», a noté une source péquiste. Il reste que plusieurs jeunes candidats potentiels refusent de plonger en raison de la difficulté «de la conciliation politique-famille», dit-on.
Steven Guilbault, porte-parole bien connu de Greenpeace, a par exemple décliné la semaine dernière l'offre de se porter candidat pour le Parti québécois. Joint à Montréal mercredi, l'écologiste a confirmé qu'il avait discuté de la chose avec le chef péquiste. «Je suis un sympathisant de la cause», a-t-il expliqué. Des considérations familiales (notamment un «bébé en route») mais aussi la primauté de la cause de l'environnement l'ont conduit, a-t-il dit, à refuser l'offre qu'on lui avait faite.
M. Boisclair et son entourage auraient aussi essuyé plusieurs refus de la part de ceux qu'on nomme «les anciens jeunes», ces ex-membres de commissions jeunesse de partis souverainistes, maintenant au seuil de la quarantaine ou jeunes quadragénaires. Certains d'entre eux, anciens attachés politiques péquistes, occuperaient maintenant des emplois importants dans des sociétés d'État ou de grandes entreprises dirigées par des sympathisants libéraux et refuseraient même qu'on les approche, de peur de lancer des rumeurs qui mettraient leur emploi en danger.
Proche d'André Boisclair, l'avocat Éric Bédard, fils de l'ancien ministre Marc-André Bédard et frère du député Stéphane Bédard (Chicoutimi), s'est montré très prudent, voire évasif, à propos d'une candidature potentielle lorsque joint par Le Devoir. Il n'a toutefois pas exclu cette possibilité.
Selon plusieurs sources, le médecin Réjean Thomas, président de la clinique L'Actuel, aurait à toutes fins utiles accepté de briguer les suffrages pour le Parti québécois lors des prochaines élections. Cet ami intime d'André Boisclair avait été défait par 641 voix dans Saint-Henri-Saint-Anne en 1994, sous la bannière du PQ. M. Thomas n'a toutefois pas rappelé Le Devoir hier.
Il semble acquis que François Rebello, ancien militant étudiant et ancien candidat bloquiste dans Outremont (2004), défendra les couleurs péquistes dans La Prairie, une circonscription qui, en 2003, a élu un libéral pour la première fois en 30 ans. Le syndicaliste Marc Laviolette, membre du club politique SPQ libre, avait envisagé de se présenter dans cette circonscription mais a finalement abandonné cette perspective.
Enfin, certaines personnalités qui n'ont pas été sollicitées par le chef péquiste disent toutefois qu'elles étudieraient une offre de sa part. Lorsque interrogé à ce sujet par Le Devoir, le président de l'Union des artistes et comédien très connu Pierre Curzi, qui travaille sur le front de la diversité culturelle depuis plus de cinq ans, a lancé : «Ah ! mon dieu, si on me l'offrait, je réfléchirais. Mais pour le moment, je suis assez fermement engagé comme président de l'Union et je songe à solliciter un nouveau mandat.»
Lisette Lapointe plonge avec Boisclair
Réjean Thomas et François Rebello brigueraient aussi les suffrages pour le PQ
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