Libre opinion - M. Bolduc, les études québécoises sont une «vraie affaire»

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Trop profond pour les Libéraux

Les toutes premières initiatives posées par les ministres nouvellement désignés ont une très haute valeur symbolique en tant que signes de ruptures éclatantes, de gestes futurs ou de sensibilités nouvelles. Or, dans le cas du nouveau responsable de l’Enseignement supérieur, Yves Bolduc, les décisions des dernières semaines signalent un parti pris systématique de défaire tout ce qu’a accompli son prédécesseur. Pire encore, elles manifestent une insensibilité, voire un mépris inquiétant de la recherche, en particulier en ce qui concerne les études québécoises.

Abolissant d’un trait de plume le programme de chaires consacrées à l’identité québécoise, le ministre déclarait en effet : « Les gens veulent qu’on s’occupe des vraies affaires. »

Le nouveau ministre était-il conscient, alors, qu’en reprenant un slogan de campagne pour l’appliquer brutalement à des questions de recherche universitaire, il entonnait la vieille ritournelle anti-intellectuelle hantant depuis longtemps notre histoire, lui qui a pourtant la responsabilité de défendre bec et ongles la valeur du travail intellectuel dans la société québécoise ? Probablement pas, hélas ! Étudier le Québec, son histoire, sa langue, sa culture, y compris sa désolante tradition anti-intellectuelle, ce ne sont visiblement pas, pour Bolduc, de « vraies affaires ».

Le projet de chaires consacrées à l’identité québécoise n’allait, bien entendu, pas de soi. L’existence même des chaires dans les universités, quelles qu’elles soient, ne fait pas l’unanimité. Et le fait qu’on entendait les consacrer à la question de l’identité pouvait donner à penser qu’elles relevaient de trop près des perspectives nationalistes du précédent gouvernement.

L’initiative soulevait donc des interrogations tout à fait légitimes. Cependant, leur abolition brutale et irréfléchie signifie aussi, et plus largement, une dévalorisation des études dans leur ensemble comme secteur de recherche. Or, « si ce n’est pas le gouvernement du Québec qui voit à la promotion des études québécoises, personne d’autre ne le fera et ces études seront vouées à la marginalité », déclarait récemment le sociologue Joseph-Yvon Thériault dans le magazine de l’Acfas. Nous sommes entièrement d’accord avec lui sur ce point.

Si le ministre Bolduc ne renonce pas à son projet d’abolition de ces chaires, il doit s’engager résolument dans la défense et la promotion d’autres mécanismes institutionnels voués au développement d’études indispensables pour comprendre en profondeur le Québec d’hier et d’aujourd’hui. C’est là une « vraie affaire » qui devrait être, avant bien d’autres, au centre des préoccupations gouvernementales et de ses propres priorités ministérielles.

*Marie-Andrée Beaudet, Département des littératures, Université Laval
Luc Bellemare, Département d’études littéraires, UQAM
Marie-Andrée Bergeron, Département d’études littéraires, UQAM
Marc André Bernier, Département de lettres et communication sociale, UQTR
Lise Bizzoni, UQAM
Aurélien Boivin, Département des littératures, Université Laval
Émile Bordeleau-Pitre, Département d’études littéraires, UQAM
Annie Cantin, Université Laval
Claudine Caron, Département d’études littéraires, UQAM
Anne Caumartin, études françaises, Collège militaire royal de Saint-Jean
Jean-Pierre Couture, École d’études politiques, Université d’Ottawa
Gilbert David, Département des littératures de langue française, Université de Montréal
Robert Dion, Département d’études littéraires, UQAM
Sébastien Dulude, Département de lettres et communication sociale, UQTR
François Dumont, Département des littératures, Université Laval
Dominique Garand, Département d’études littéraires, UQAM
Lise Gauvin, Département des littératures de langue française, Université de Montréal
Véronique Grondines, Département des littératures de langue française, Université de Montréal
Élyse Guay, Département d’études littéraires, UQAM
Hervé Guay, Département de lettres et communication sociale, UQTR
Jean-François Hamel, Département d’études littéraires, UQAM
Dominic Hardy, Département d’histoire de l’art, UQAM
François Hébert, Département des littératures de langue française, Université de Montréal
Yves Jubinville, École supérieure de théâtre, UQAM
Germain Lacasse, Département d'histoire de l'art et d'études cinématographiques, Université de Montréal
Laurier Lacroix, Département d’histoire de l’art, UQAM
Michel Lacroix, Département d’études littéraires, UQAM
Yvan Lamonde, Département de langue et littérature françaises, Université McGill
Vincent Lambert, Département d’études littéraires, UQAM
Gilles Lapointe, Département d’histoire de l’art, UQAM
Martine-Emmanuelle Lapointe, Département des littératures de langue française, Université de Montréal
Karime Larose, Département des littératures de langue française, Université de Montréal
Julien Lefort-Favreau, Département d’études littéraires, UQAM
Louis Patrick Leroux, Département d'études françaises, Université Concordia
Thomas Mainguy, Département d’études littéraires, UQAM
Benoit Melançon, Département des littératures de langue française, Université de Montréal
Ginette Michaud, Département d’études littéraires, UQAM
Nathalie Miglioli, Département des sciences historiques, Université Laval
Élisabeth Nardout-Lafarge, Département des littératures de langue française, Université de Montréal
Christiane Ndiaye, Département des littératures de langue française, Université de Montréal
Jacques Paquin, Département de lettres et communication sociale, UQTR
Jacques Pelletier, Département d’études littéraires, UQAM
Laurence Pelletier, Département d’études littéraires, UQAM
Martin Petitclerc, Département d'histoire, UQAM
Patrick Poirier, Université de Montréal
Johanne Prud'homme, Département de lettres et communication sociale, Université du Québec à Trois-Rivières
Lucas Prud'homme-Rheault, Département d’études littéraires, UQAM
Marie-Ève Riel, Département d’études littéraires, UQAM
Lucie Robert, Département d’études littéraires, UQAM
Frédéric Rondeau, Modern Languages & Classics, University of Maine
Thérèse St-Gelais, Département d’histoire de l’art, UQAM
Lori Saint-Martin, Département d’études littéraires, UQAM
Pierre-Paul Saint-Onge, UQAM
Mariloue Sainte-Marie, Bibliothèque et Archives nationales du Québec
Sylvano Santini, Département d’études littéraires, UQAM
Stéphane Savard, Département d'histoire, UQAM
Chantal Savoie, Département d’études littéraires, UQAM
Antoine Soare, Département des littératures de langue française, Université de Montréal
Jean-Pierre Sirois-Trahan, Département des littératures, Université Laval
Louise Vigneault, Département d’histoire de l’art et d’études cinématographiques, Université de Montréal
Nathalie Watteyne, Département de lettres et communications, Université de Sherbrooke


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