Air Canada n’est pas l’allié de Montréal? Le transporteur canadien, dont le siège social est toujours dans la métropole québécoise, favorise le développement de Toronto, et ce, depuis plusieurs décennies.
C’est un pionnier de l’industrie touristique, Michel Archambault, aujourd’hui président du Bureau des gouverneurs de la Chaire de tourisme Transat, qui nous le rappelait dans les pages du Devoir ce week-end.
Sans vol direct vers l’Asie et l’Amérique du Sud, des marchés émergents, Montréal va rater l’extraordinaire boom touristique annoncé d’ici à 2025. En transitant par millions par Toronto, les Québécois y versent une taxe évaluée depuis une décennie à des centaines de millions de dollars. Et la valeur économique d’un lien direct international est inestimable, écrit M. Archambault: des retombées entre 50 et 200 millions de dollars…
Prié de s’expliquer, à la suite de sa courte allocution devant la Chambre de commerce de Montréal, le président d’Air Canada, Calin Rovinescu, a plutôt pris les jambes à son cou et il est sorti par une porte arrière de la salle, afin d’éviter les journalistes. La grande classe!
Montréal n’est plus le deuxième aéroport du pays (c’est Vancouver) et sera bientôt quatrième, derrière Calgary… Oui, Air Canada a laissé tomber Montréal.
Le ministre responsable de la métropole, Jean-François Lisée, essaiera bien de faire quelque chose, il l’a promis, mais selon moi, Air Canada est une cause perdue. Pour que Montréal vive selon les règles de l’offre et de la demande, il faut, une fois pour toutes, déréglementer le ciel canadien et l’ouvrir à la concurrence étrangère.
Montréal, ciel ouvert
Contrairement à l’Europe et à l’Asie, des marchés déréglementés, et aux États-Unis, qui a un accord de ciel ouvert avec l’Europe depuis 2008, le Canada est un marché fermé à la concurrence internationale. Une compagnie américaine, par exemple, ne peut offrir des liaisons Montréal-Toronto, mais seulement des liaisons entre son pays d’origine (dans ce cas-ci les États-Unis) et une destination canadienne.
En Europe, l’Irlandaise Ryanair s’en donne à cœur joie et offre des Barcelone-Rome à 100$ aller-retour... Idem pour les EasyJet et autres compagnies «low cost» qui ont bouleversé les cartes et forcé les transporteurs nationaux à offrir, eux aussi, des prix raisonnables.
À l’inverse, voyager en avion au Canada, et vers la plupart des destinations américaines, est une sinécure, et il en coûte cher. On nous répète, pour justifier les prix élevés, que le Canada est un vaste pays peu densément peuplé. Ok. Mais cet argument ne tient pas lorsqu’il est question de liaisons entre des villes comme Montréal et New York ou Boston.
Combien coûte un aller-retour entre Montréal et Boston? Une heure de vol? 463$ pour un vol avec escale (donc 5 à 6 heures de voyagement, l’équivalent de se rendre à Paris), et… 1050$ pour un vol direct!
De plus en plus de Canadiens qui habitent le sud du pays vont tout naturellement vers les aéroports américains pour voyager non seulement aux États-Unis, mais aussi au Mexique, dans les Caraïbes, même en Europe, car les billets sont moins chers.
On parle plus français dans les aéroports de Burlington et de Plattsburgh (que s’affiche comme l’ «aéroport américain de Montréal») qu’anglais.
Un ciel canadien réglementé gonfle artificiellement les prix. Et les taxes sur les aéroports sont aussi très élevées. Il y a huit ans, l’Institut économique de Montréal écrivait, dans «Transport aérien: Pour un Canada à ciel ouvert», que le ministère fédéral des Transports semblait prêt à profiter du mouvement actuel d’ouverture des marchés de transport aérien à l’échelle internationale.
«Il envisage notamment la possibilité de permettre aux transporteurs étrangers d’offrir des vols entre les villes canadiennes et de revoir à la hausse la limite imposée à la propriété étrangère des transporteurs nationaux, actuellement fixée à 25 %. Il s’agirait dans les deux cas d’excellentes nouvelles pour les consommateurs et l’économie du pays en général.»
Ça va faire bientôt dix ans. L’Asie, l’Europe, les Etats-Unis, ont tous franchi le pas. En attendant, la croissance de l’aéroport de Montréal stagne et les consommateurs payent trop cher pour leur déplacement.
Évidemment, un ciel ouvert ouvrirait la porte à une concurrence féroce pour notre transporteur national, Air Canada. Mais franchement, qui s’en fout?
Air Canada
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