Les liaisons dangereuses

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Honni soit qui mal y pense !

Au moment où la FTQ et son président sortant, Michel Arsenault, se retrouvent sur la sellette, il est de bonne guerre, pour les partis d’opposition, de chercher à exploiter la liaison privilégiée que le PQ entretient avec la plus grosse centrale syndicale au Québec.

Il est clair qu’au fil des années, la FTQ et les gouvernements issus du PQ se sont rendu mutuellement service. En soi, cela n’a rien d’étonnant, ni de scandaleux. Il est aussi naturel pour le mouvement syndical de favoriser un parti qui a traditionnellement affiché un « préjugé favorable envers les travailleurs » que pour le patronat d’appuyer celui qui ne cesse de réclamer un meilleur « climat d’affaires ».

Dimanche soir, Radio-Canada rapportait que Pauline Marois avait rencontré M. Arsenault en tête-à-tête à deux reprises à l’époque où elle était encore chef de l’opposition. Pire encore, ils se seraient vus au club 357c, devenu hautement suspect depuis que la commission Charbonneau l’a présenté comme le lieu de rendez-vous préféré des magouilleurs montréalais.

La première rencontre, en octobre 2008, aurait eu lieu trois mois après - et non pas avant - que le Fonds de solidarité eut investi 3 millions dans une entreprise, Capital BLF, dont le mari de Mme Marois, Claude Blanchet, lui-même un ancien président du Fonds, détenait à l’époque 12 % des actions et où travaillent toujours deux membres de leur famille.

Que la perspective de voir Mme Marois devenir un jour première ministre ait pu influencer la direction du Fonds, c’est bien possible, mais M. Arsenault n’avait certainement pas besoin de la rencontrer pour savoir qu’après trois mandats libéraux d’affilée, une victoire du PQ était envisageable. On peut sans doute s’interroger sur les raisons pour lesquelles les actifs de M. Blanchet dans Capital BLF n’ont pas été placés dans une fiducie sans droit de regard, mais cela ne signifie pas qu’il y a eu influence indue.

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Il est possible d’imaginer une multitude de raisons pour lesquelles un chef syndical et le chef de l’opposition - ou le premier ministre - souhaitent se rencontrer. À l’époque, M. Arsenault n’était pas encore le personnage infréquentable qu’il est devenu récemment. En octobre 2008, les journalistes du Journal de Québec venaient de passer 16 mois en lockout. Qui sait, M. Arsenault voulait peut-être sensibiliser Mme Marois à la nécessité de moderniser la loi anti-briseurs de grève ?

Les libéraux se sont indignés du procès par association qu’on a fait à Philippe Couillard en raison de ses liens avec Arthur Porter, qui fuit la justice, mais ils n’ont jamais hésité à attribuer la bonne fortune de son mari, qui n’a jamais été accusé de quoi que ce soit, à l’influence occulte de Mme Marois.

Certains estiment que tous les coups sont permis en politique. S’il est vrai que la nomination de M. Blanchet à la présidence de la SGF à des conditions particulièrement avantageuses, alors que Mme Marois siégeait au Conseil des ministres, prêtait à controverse, il devrait quand même y avoir des limites. Jean-Marc Fournier avait été franchement odieux quand il avait lancé qu’elle serait bien aise de continuer à toucher la généreuse pension de son mari dans l’éventualité de son décès.

Coïncidence, Michel Arsenault, qui a annoncé son départ prochain, comparaît aujourd’hui même devant une commission parlementaire dont les partis d’opposition ont réclamé la convocation, en principe pour rassurer les investisseurs qu’ont pu inquiéter les révélations de la commission Charbonneau sur les relations que le Fonds de solidarité a développées avec le crime organisé. Inévitablement, le dossier de Capital BLF sera soulevé, malgré l’étroitesse du mandat de la commission.

Cela n’est cependant pas suffisant pour le mentor du rat pack libéral, Pierre Paradis, qui estime que la première ministre devrait elle-même s’expliquer. « C’est délicat de mélanger vie privée et vie publique, a-t-il expliqué à La Presse, et c’est à elle que revient le fardeau de la preuve. »
Le député de Brome-Missisquoi est un spécialiste des procès en tout genre : procès d’intention, procès par association… Il a été mis au monde politiquement par la commission parlementaire sur le sac de la baie James, qui avait gardé le gouvernement Lévesque sur le gril pendant neuf longues semaines. Maintenant que les documents relatifs aux perquisitions effectuées par l’UPAC ont laissé entrevoir l’existence d’un « système » de financement occulte au PLQ, il devient impérieux de mettre tout le monde dans le même bain de boue.

Dans notre système de droit, ce n’est cependant pas à l’accusé de prouver son innocence, mais plutôt à son accusateur de démontrer sa culpabilité. Mme Marois assure qu’elle ne parle jamais des affaires de son mari avec qui que ce soit. Je ne vois aucune raison d’en douter.


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