Les défis afghans

Afghanistan - une guerre masquée

On peut faire un débat légitime sur l'efficacité de la mission et sur les moyens de l'améliorer ou de la réorienter après 2009. Mais permettez-moi de répondre à certaines interrogations.

Pourquoi sommes-nous en Afghanistan?
Notre mission a plusieurs objectifs. Tout d'abord, pour stabiliser l'État afghan, ravagé par des décennies de guerre et de tyrannie.
Nous travaillons à appuyer le gouvernement démocratiquement élu et à faire en sorte que ce pays ne retombe pas entre les mains des terroristes. Nous accomplissons cet objectif de diverses façons.
D'abord en participant à la formation de plus de 30 000 soldats de l'Armée nationale afghane. Plus d'une soixantaine de Canadiens forment également des policiers afghans. La sécurité ne sera vraiment consolidée à moyen terme dans ce pays que lorsque les Afghans eux-mêmes pourront l'assurer. Et c'est ce que nous les aidons à réaliser.
Le Canada a aussi contribué à former des dizaines de juges et d'avocats de façon à mettre en place un système judiciaire crédible et efficace. Sans un tel système, la justice et les droits humains fondamentaux resteront lettre morte en Afghanistan.
Le second grand objectif de la mission canadienne est de nature humanitaire. La liste de ce qui a été accompli grâce à l'aide canadienne est tellement longue qu'il est impossible d'en faire une énumération exhaustive. Les efforts du Canada en matière de développement à Kandahar change la donne dans des domaines d'une importance cruciale comme la santé, l'éducation et le développement communautaire. Ces dizaines de milliers de citoyens de cette province voient des améliorations tangibles à leur vie quotidienne.
Aujourd'hui, plus de 80% des citoyens afghans ont accès à des soins de santé, alors qu'ils n'étaient que 9% il y a cinq ans. Il s'agit d'un progrès incontestable.
Plus de 350 000 enfants ont été vaccinés contre la polio dans la province de Kandahar. Une unité d'obstétrique a été mise sur pied grâce à l'aide canadienne à l'hôpital de Kandahar.
Le Canada a contribué à mettre en place 4000 écoles et à former 9000 enseignants. Cela bénéficiera à 120 000 enfants, dont plus de 85% sont des filles. À Kandahar même, plusieurs milliers d'adultes ont appris à lire et à écrire grâce à l'aide canadienne.
Notre mission en Afghanistan a pour but d'aider les gens à rebâtir leurs vies après des années d'oppression. Elle a pour but de veiller à ce qu'ils aient les ressources nécessaires pour réaliser leurs aspirations. C'est une mission de stabilisation. Une mission de développement. C'est notre plus importante mission: une mission qui défend la liberté, la démocratie, les droits fondamentaux et le respect du droit.
Pour qu'elle puisse s'accomplir, il faut toutefois assurer la sécurité sur le territoire afghan. Une sécurité toujours menacée par les talibans, qui veulent ramener leur régime totalitaire. La démocratie et la stabilité politique ne peuvent exister dans un climat de terreur. On ne peut pas offrir des services de santé et d'éducation dans l'anarchie. On ne peut pas contribuer au développement économique dans le chaos. La sécurité est le pilier indispensable sur lequel s'appuie tout le reste.
C'est pourquoi nos soldats jouent un rôle indispensable. Leur mission est risquée, c'est vrai. Ils savent quels sont les risques, mais ils sont là. Les hommes et les femmes qui portent l'uniforme sont prêts à risquer leur vie afin de servir leur pays et aider les autres. Ils ont été formés précisément pour accomplir cette tâche. Et tous sont fiers de servir le Canada et d'aider les Afghans.
Notre premier ministre s'est exprimé clairement: toute prolongation de notre mission militaire au-delà de février 2009 devra être approuvée par le Parlement. À ceux qui réclament le retrait immédiat des troupes canadiennes en Afghanistan, et à ceux qui restent incertains quant aux progrès accomplis - à ceux-là je dis: le Canada ne peut pas, sans perdre toute crédibilité à l'échelle internationale, simplement renier sa parole et abandonner une mission aussi cruciale.
Nous ne pouvons pas tout simplement abandonner les Afghans à leur sort, car cela compromettrait tout le travail de développement et de renforcement de la sécurité accompli sur le terrain.
Je voudrais m'adresser directement aux Québécois qui souhaitent qu'on mette fin dès maintenant à cette mission. Je sais que vous êtes des gens fiers et responsables, des gens de parole. Les Québécois finissent le travail qu'ils ont commencé quand ils se sont engagés à le faire.
Mercredi, le président afghan, Hamid Karzai, s'est adressé aux Québécois. Il a dit: « Mon message pour le Québec est que les fils et les filles du Québec qui remplissent aujourd'hui leur mission en Afghanistan jouent un rôle extrêmement important. Non seulement pour l'Afghanistan, mais aussi pour le Canada et pour nous tous sur cette planète.»
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Maxime Bernier
L'auteur est ministre des Affaires étrangères du Canada.


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